Immobilier : une banque propose des prêts sur… 35 ans !
Agathe Boussard et Delphine Denuit| 08 mars 2018, 18h28 | MAJ : 09 mars 2018, 7h41
En Alsace et Lorraine, une banque régionale propose un prêt sur une durée de 35 ans. Un record ! LP/Olivier Boitet
Profitant de taux d’intérêt au plus bas, une filiale du Crédit Mutuel Arkea permet depuis peu d’emprunter sur une durée record. Pour les plus jeunes mais pas seulement.
Emprunter sur 35 ans ? C’est possible ! Avec l’allongement de la durée de vie des Français, une banque régionale fait le pari de commercialiser un prêt sur une durée record. Du jamais-vu depuis plus d’une décennie, de mémoire de banquier.
Le Crédit Foncier Communal d’Alsace et de Lorraine (CFCAL) a lancé ces derniers mois un crédit d’acquisition d’une durée exceptionnelle de 35 ans au taux d’intérêt de 2,55 % (hors assurances). Les produits de cette banque strasbourgeoise, filiale à 100 % du Crédit Mutuel Arkéa, sont exclusivement distribués par courtiers. Spécialiste du rachat de crédits, elle a décidé de frapper un grand coup dans le secteur très feutré des crédits bancaires.
Un produit qui s’adresse d’abord aux primo-accédants
« Notre produit s’adresse d’abord aux emprunteurs jeunes évidemment, qui rêvent de devenir propriétaires de leur logement. Mais aussi à tous ceux qui disposent de biens et veulent investir de nouveau ainsi qu’aux actifs, propriétaires de leur logement principal et disposant de trop faibles revenus pour pouvoir emprunter à plus courte échéance », précise Emmanuelle François, directrice générale du CFCAL.
Et déjà, ça marche. Selon nos informations, les crédits sur 35 ans atteignent déjà 15 % du portefeuille de contrats du CFCAL (45 % rien que sur les plus de 25 ans). Le courtier en crédits immobiliers Cafpi a déjà commercialisé entre janvier et février huit de ces contrats au très long cours. C’est certes marginal dans l’activité du groupe qui revendique 8 747 prêts signés sur cette période mais le mouvement séduit à en croire la banque.
30 % des prêts sur plus de 25 ans
Les grands acteurs traditionnels sont aux aguets, distants à l’égard de cette « initiative d’une micro-banque régionale » qu’ils suivent malgré tout de très près. « On est loin d’une tendance de fond », temporise Maël Bernier, porte-parole du courtier Meilleurtaux. Pourtant, on assiste bien à un renversement de tendance en matière de durée des prêts.
« Alors qu’il y a encore quatre ans, seuls 15 % des prêts immobiliers s’échelonnaient sur plus de 25 ans, on en recense en février plus de 30 %, explique Michel Mouillart, économiste spécialiste de l’immobilier. On revient sur des durées moyennes de contrats à plus de 25 ans d’avant la grande dépression de 2008 ».
Des taux d’intérêt toujours bas
Et une fois n’est pas coutume, ce rallongement profite aux emprunteurs. « Depuis la fin de l’année 2017, dans un contexte de hausse des prix de l’immobilier (NDLR : + 4,2 % entre 2016-2017 selon la Fnaim), les banques prêtent à nouveau sur plus de 25 ans, y compris sur 30 ans et même sur 35 ans ! », constate Sandrine Allonier, directrice des relations Banques pour le courtier Vousfinancer, à l’origine d’une étude sur le sujet.
Les prêts sur 25 ans, aux taux prohibitifs jusque-là, reviennent en grâce avec la persistance de taux d’intérêt bas. « On en compte à gogo avec une réelle volonté de distribuer ces crédits de la part des banques alors qu’avant, ils servaient davantage de figuration », souligne Maël Bernier.
Emprunter plus longtemps ne revient pas beaucoup plus cher
Grâce aux taux bas, emprunter plus longtemps ne revient pas beaucoup plus cher et surtout permet à ceux qui ne le pouvaient pas d’emprunter. En tête desquels, les primo-accédants, ces jeunes aspirants à devenir propriétaires de leur toit. « Or cette cible, très convoitée des banques, les boude justement depuis l’entrée en vigueur le 1er janvier de la nouvelle réglementation supprimant les APL Accession dans le neuf et restreignant le prêt à taux zéro, explique Sandrine Allonier. Chez nous, le nombre de dossiers déposés par des primo-accédants recule de 20 % sur les deux premiers mois de l’année ». Chez Cafpi, leur part a carrément chuté de 60 % en décembre à 46 % en février… Une hémorragie que tous espèrent endiguer avec le rallongement de la durée des prêts.
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