Les statistiques du post précédent viewtopic.php?p=1131190#p1131190
se basaient sur les chiffres INSEE de 2007. Eurostat a publié en février une mise à jour de ces statistiques jusqu’en 2009 (série ilc_lvho02, source : http://appsso.eurostat.ec.europa.eu/nui ... 02&lang=fr).
Sur 3 ans les variations sont très faibles sauf pour quelques cas intéressants.
En 2007 les chiffres Eurostat sont légèrement différents de ceux de l’INSEE mais le classement entre pays reste sensiblement le même.
Si on se restreint à la « vieille Europe » le classement des pays en fonction du taux de propriétaires occupants & de locataires varie un peu sur cette courte période agitée par la crise financière. Eurostat ne donne pas de chiffre actualisé pour l’Allemagne en 2007-2008-2009, par défaut j’ai donc pris en compte le dernier taux connu de 53.3% en 2005 pour ce pays de locataires.
Classement Eurostat en 2007 : année de référence avant la crise
Commentaires :
les PIGSU sont les champions de la propriété (à crédit)
Le paradis fiscal Luxembourgeois est un petit monde à part
Classement Eurostat en 2008 : Année de la généralisation de la crise en Europe
Commentaires : les PIGS confirment mais le Luxembourg s’effrite.
En 2009 :Année tumultueuse entre « rebond » financier et crises de la dette souveraine
Commentaires : Le Luxembourg baisse franchement et retombe à 70% (objectif officiel de la politique de France de propriétaires ) de même l’Angleterre retombe à 70%. L’Irlande se distingue aussi par une baisse sensible. La France reste dans le peloton de queue mais son taux absolu continue de monter.
Pour illustrer les commentaires regardons la dynamique de ces changements (la dérivée) en regardant la progression depuis 2007 (base 100 pour tous les pays cette année là) sur cette courte période :
La France Championne d’Europe de la progression du taux de propriétaires ! (ligne rouge)
Certes la France part « de loin » mais son évolution est à contre courant de la tendance générale.
A noter que 3 Champions 2007 des propriétaires : le Luxembourg, le Royaume Uni et l’Irlande sont devenus les champions de la baisse du taux de propriétaires, ils partaient de très haut mais la correction est bien amorcée.
Sur cette même période de crise financière, les prix immobiliers en Europe ont amorcé une décrue, cette décrue a été spectaculaire en Irlande mais là bas la hausse avait été encore plus « irrationellement exubérante », voir le graphe ci-dessous de l’European Mortgage Foundation.
Source Hypostat rapport EMF 2009 http://www.hypo.org/Content/Default.asp?PageID=524
Revenons à notre France championne de la progression du taux de propriétaires de 2007 à 2009. Eurostat fournit le détail de ce taux avec les sous catégories : locataires du marché libre, locataires « aidés », propriétaires mais avec un emprunt à rembourser (=locataires d’une banque), propriétaires sans emprunt (le « vrai » propriétaire). La progression du taux de propriétaires en France est quasi essentiellement due à la progression des « vrais » propriétaires, le taux de propriétaires avec emprunt est resté très stable sur la période.
source eurostat, série ilc_lvho02
On peut se réjouir que plus de français aient fini de rembourser leur emprunt immobilier, voilà une frange de la population maintenant désendettée et qui peut investir ou consommer plus intelligemment. La progression du taux de « vrais » propriétaires est plutôt saine.
Les ménages français se désendetteraient-ils ?
Et bien NON ! Les autres propriétaires (prêt relais et surtout les primos) se sont eux tellement endettés pour des prix bullesques qu’ils arrivent à faire progresser l’endettement moyen des ménages en France . Regardez la variation de l’endettement brut des ménages sur la même période 2007 – 2009 (base 100 en 2007)
Source Eurostat, série tec00104
http://epp.eurostat.ec.europa.eu/tgm/ta ... e=tec00104
Comme souligné plus haut l’état français s’est lui-même endetté pour inciter fiscalement les candidats à souscrire un emprunt immobilier.
Cette politique du logement n’est en fait qu’une politique de l’endettement.
Les chiffres 2010 pour la France ne sont pas encore publiés mais compte tenu du rebond des volumes & des prix immobiliers et des sommets atteints par les incitations fiscales, l’année 2010 sera certainement encore plus mauvaise pour la France : progression de l’endettement public, progression de l’endettement des ménages. La fuite en avant.
PIGS ou PIGSU ?
Le cas anglais (UK) est troublant car il suit la même trajectoire que l’Irlande. Si l’attention est concentrée sur les PIGS, des nations ayant un taux record de propriétaires, je ne comprends pas vraiment pourquoi UK est exclue de cette liste des pays fragiles et sur-endettés.
L’Angleterre est une « nation de propriétaires » (à plus de 70%) et l’endettement brut des ménages anglais par rapport à leur revenus est très élevé, comparable aux PIGS, cf données Eurostat de 2009
Source Eurostat, série [tec00104] - Taux d'endettement brut des ménages, 28/02/2011 http://epp.eurostat.ec.europa.eu/tgm/ta ... e=tec00104
Si on regarde l’endettement hypothécaire par rapport au PIB, le Royaume Uni a aussi un taux très élevé
Source EMF, rapport 2009
Beaucoup de pays nordiques sont également très endettés mais le pacte social est radicalement différent et le surendettement mieux maîtrisé semble-t-il. L’Angleterre (UK) est la championne d’Europe des ménages « sous l’eau » ayant des remboursements supérieurs à leurs revenus. Ces ménages sont directement menacés de pauvreté comme le montre l’étude Eurostat sur le sur-endettement en Europe en 2008 :
Source Eurostat, KS-SF-10-061-EN, sur-endettement en Europe, rapport 2010, http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ ... 061-EN.PDF
De ce point de vue l’Angleterre a une situation sociale/bancaire au moins aussi explosive que la Grèce.
L’endettement en Angleterre concerne l’immobilier mais aussi les autres biens de consommation. Ce sont les champions d’Europe des dettes de cartes de crédit devant…la Grèce et l’Irlande ! Avec le plus fort taux de personnes « sous l’eau ».
Source Eurostat, rapport KS-SF-10-061-EN, surendettement en Europe, rapport 2010
Cet endettement massif est privé mais, en cas de crise grave de la dette privée, c’est l’état qui fini par assumer les pertes du système financier. Si on ajoute l’exposition des banques anglaises à la crise irlandaise il y a de quoi s’inquiéter…Overall, the percentage of people in households who owed more on their credit/store card(s) than they earned in a month (monthly household disposable income) was 1.4 % at EU-27 level, with larger percentage in three countries: the United Kingdom (8.6 %), Greece (2.5 %) and Ireland (2.1 %). This corresponds to the upper part of the bars in Figure 3 above.
Pourquoi la solvabilité de l’Angleterre n’est-elle pas mise en cause ?
L’Angleterre a choisi en 2010 la rigueur extrême pour se désendetter et ses efforts sont appréciés par la communauté financière, voilà l’argument le plus fréquent. Mais la néo-rigueur (déflation des revenus mais garantie intégrale des dettes par l’état) a été appliquée en vain en Irlande depuis 2007, et en 2009 on disait même que contrairement au laxisme grec, portugais ou espagnol l’Irlande faisait « exactement ce qu’il faut pour s’en sortir ». En 2010 la réalité s’est imposée avec le naufrage de l’Anglo Irish bank qui a entraîné celui de l’état. Avec la remontée actuelle de l’inflation en Angleterre le taux de défaut des ménages anglais risque de remonter fortement, les banques anglaises risquent de refaire parler d’elles.
A suivre….