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Message
par saturne » 23 avr. 2015, 01:48
Elle est très bien cette file.
Avant, une question: Il y a un coin où l'on ait débattu de l'hypothèse d'une "dévaluation interne" ?
(le fil en signature de Pangloss ? --- je suis pas sûr).
L'argument qui pose : dévaluation => retour taux de change => sortir de l'UE
semble bien séduisant, mais les détracteurs remarquent que c'est une "illusion monétaire".
Mais pourquoi disent-ils que c'est un illusion?
-1- Parce que quand l'euro s'est installé, il s'est fait sur un tx de change qui correspondait a la valeur réelle des économies qui se trouvaient dérrières, à ce moment là ;
-2- Parce que la divergence des économies (l'"inflation occulte" dont parle Sapir) s'est produite APRES l'introduction de l'euro, et donc, ça pose un problème de logique: où l'on confond la conséquence avec la cause ;
et donc:
-3- Parce que même si on rétablit le taux de change (1), si cela ne permet pas de rectifier les causes qui provoquent la divergence des économies (2), on ne sera pas plus avancés après le retour à une devise nationale, qu'on ne l'a été pendant qu'on laissait filer l'"inflation occulte" dans l'euro.
Alors, peut-être que la monnaie unique n'est pas si décisive que ça, qu'elle n'est pas une cause, mais qu'elle est révélatrice d'autres problème, des véritables causes de nos divergences, et donc, on peut ajouter : le retour du taux de change est une illusion monétaire :
-4- Parce que le cadre de l'euro offre un cadre, une sorte d'ordo-monétarisme (qui n'a aucune raison d'être ordo-libéral, ni libéral tout court, encore un autre amalgame). Cet ordo-monétarisme justement permet de d'identifier, de "voir apparaître", et même de mesurer les causes réelles qui font diverger les économies. L'ordo-monétarisme de l'euro est une antidote aux illusions monétaires.
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Essentiellement, je crois pour ma part que Sapir fait fausse route.
Plus je vous lis, et plus que je suis persuadé que la voie c'est la dévaluation interne.
Imaginons qu'on commence à tout dévaluer, mais à la fois, mais en essayant de conserver les proportions : baisses des salaires, des charges sociales, des prix à la consommation, des impôts, des retraites, des honoraires, de tout.
Evidemment, ce n'est pas facile. Car les prix s'ajustent à des vitesses différentes, etc. Donc, le fait d'avoir un État Social fort, ce n'est pas plus mal pour limer les difficultés qui vont apparaître. La France a déjà un sacré atout, et avec la démographie aussi, atouts que n'ont pas les Allemands, d'ailleurs.
Mais la vraie question où je veux en venir, ce n'est pas la difficulté de faire une dévaluation interne. Elle n'est d'ailleurs pas plus difficile qu'une dévaluation par le taux de change, du moment qu'on veut s'attaquer aux causes de la divergence économique. On sait y faire, et maintenant on a la technologie pour faire (un ordinateur, c'est une calculatrice, ça permet de compter, et aujourd'hui, c'est bien différent des années 90 de gérer les comptes de la nation)
La question intéressante, c'est celle-ci:
-- Quels seraient les coûts les plus difficiles à faire baisser en même temps que les autres, c'est à dire, quels sont les coûts qui se révélèraient les plus coriaces, les plus déstabilisateurs, les plus injustes en définitive, dans le cadre d'une dévaluation ordonnée ?
Réponse:
-- je crois que ce sont les prix de l'immobilier.
Maintenant, si vous êtes d'accord avec moi pour dire que les prix immobilier sont le principal facteur de résistance à une dévaluation interne, alors je crois que vous devrez conclure avec moi que la thèse de Sapir et Cie qui demandent à rétablir le taux de change ressemble à s'y méprendre à celle des gens qui se sont endettés jusqu'au cou et qui, anticipant la dévaluation à venir, s'accrochent comme des désespérés à l'espoir d'un retour au taux de change, d'un retour à l'inflation qui leur permette de réduire leur endettement... (et après eux, le déluge)
EN un mot, conscients de la nécessaire dévaluation, les gens comme Sapir essaient désespérement de faire en sorte que la dévaluation se fasse par le taux de change (dévaluation externe) pour ne pas subir une dévalutation interne qui signifie, faute de pouvoir faire tourner la planche à billet en francs, qu'ils vont se retrouver en negative equity avec leurs hymphestissements immobiliers.
C'est quand même étonnant que Sapir s'accroche comme un désespéré au tx de change, comme un naufragé à sa bouée de sauvetage, mais je ne vois nulle part qu'il s'attache à comprendre pourquoi, après 2001, les États membres ont divergé autant. Pourquoi ils coulent. Sapir il est sur le Titanic, il refuse de considérer l'iceberg immobilier, et du moment qu'il peut assurer son cannot -- son hymphestissement immo -- le reste des passagers et l'équipage peut toujours se noyer, l'inflation, il s'en fout: du moment que son canot reste à flot, au dessus de l'inflation, il croit se sauver. Et c'est pour cela qu'il a l'air convaincant : il convainct tous ceux qui sont comme lui, et ils sont nombreux !
Pourtant, l'iceberg, la cause réelle, on la voit maintenant à la lieue. Elle se voit par ex. dans les différences entre modèles sociaux : d'un côté, les réformes de l'économie allemande depuis en 2000 ont été associées à des mécanismes de contrôle de l'immobilier (entre autres). Inversement, la disponibilité de crédit en euro à faible intérêt à alimenté les bulles immobilières des PIIGS, ET AUSSI en France.
Du coup, le peu de gain en productivité qu'on aurait dû avoir dans le reste de l'Europe s'est retrouvé plombé par la hausse de l'immobilier, dont les coûts se sont retrouvés embarqués dans les coûts des entreprises, dans leurs locaux, dans les salaires (différence Paris/Province), mais aussi dans les retraites, dans les prestations assistantielles, donc dans les charges, taxes, impôts. Les prix immo ont poussé à la hausse un cycle de réalimentation des coûts qui est plus rapide que la hausse de productivité réelle.
Or si l'on se dit, comme je le crois, que les prix immo sont le principal facteur à la hausse, on ne voit pas la raison pour ne pas dire que les prix immo pourraient être aussi le principal facteur à la baisse des coûts. C'est à dire de retour à une situation d'équilibre permettant de libérer la productivité de nos economies, et de jouer sur la dévaluation des coûts du travail et des charges l'État Social, pour que la France ou les PIIGS puissent compenser des modèles économiques de es pays comme l'Allemagne. Ensuite, chaque pays ajusterait l'État social selon sa culture, sa tradition, mais toujours dans une économie s'appuyant sur des fondamentaux réels.
Sans besoin de sortir de l'euro. Surtout si on prétend en sortir pour ne PAS s'attaquer à la raison qui nous aura poussé à quitter l'euro.
Voilà, c'était ma réflexion, et la lecture de ce fil a fait plus que me confirmer dans mon idée.
Salut!