Editeur : LEAP
Date : 15 octobre 2013
« Construire un monde désaméricanisé » : il y a quelques années, l’affirmation aurait prêté à sourire. Tout au plus eût-elle passé pour une provocation d’Hugo Chavez. Mais quand on assiste en direct à la faillite des États-Unis et que c’est une agence de presse chinoise officielle qui le dit, l’impact n’est pas le même. En réalité elle décrit tout haut un processus déjà largement entamé : simplement, il est maintenant toléré d’en parler publiquement.
En effet, si le monde entier retient son souffle devant le jeu pathétique des élites US, ce n’est pas par compassion, c’est pour éviter d’être emporté dans la chute de la première puissance mondiale.
Cette perspective et la verbalisation de ce non-dit libèrent enfin tout un ensemble de solutions qui étaient jusque-là à l’état de prémices, voire encore refoulées par certains. Ces solutions accélèrent la construction du monde-d’après et ouvrent sur un monde multipolaire organisé autour des grands blocs régionaux.
En un mois et demi, d’abord un camouflet sur le dossier Syrien par la Russie elle-même. Puis une banque centrale qui avoue l’impossibilité de diminuer le quantitative easing. L’incapacité de voter un budget, ce qui implique la fermeture de l’État fédéral. Un shutdown qui se prolonge bien au-delà du raisonnable. Une négociation sur le plafond de la dette dans l’impasse à deux jours de la date limite. Les États-Unis sommés par le G20 de ratifier la réforme du FMI qu’ils bloquent depuis trois ans, et par la banque mondiale et le FMI de mettre de l’ordre dans leurs finances. Et maintenant le coup de semonce chinois.
De nombreux américains voient la réalité en face : leur pays est en faillite. Dès lors, vaut-il mieux retarder la confrontation à la réalité, quitte à amplifier les problèmes, ou vaut-il mieux les résoudre maintenant ? Une large partie de la population ne voit pas d’un mauvais œil un défaut de paiement. Quelle autre solution, d’ailleurs, à terme ? N’y a-t-il donc pas la volonté chez les républicains de précipiter la crise ?
Le LEAP a l'air de se réjouir de la déroute des USA. Mais en réalité, le grand krach dévastateur qu'ils annoncent depuis 2008 n'arrive toujours pas. Sont ils pertinents ?une récupération stratégique a certainement eu lieu lorsque la Fed a fait machine arrière sur la réduction de son assouplissement quantitatif. Pourquoi a-t-elle laissé entendre jusqu’au bout qu’elle diminuerait QE3, sans le faire au final ? C’est la première fois qu’elle prend par surprise les investisseurs tous 100% convaincus du tapering, elle qui avait fait de la forward guidance un principe bien établi. N’y a-t-il aucun lien avec les grossiers délits d’initiés avérés au moment de l’annonce de la Fed, qui ont dû rapporter des milliards de dollars à leurs auteurs ?