Total serre les boulons pour s’adapter à la chute du baril
12 fev 2015 LesEchos
Le groupe pétrolier voit son bénéfice net baisser de 10 % en 2014. En 2015, il va réduire de plus de 10% ses investissements et de 30 % son budget d’exploration. Le gel des recrutement se traduuira par une baisse des effectifs de 2.000 personnes, et un « plan d’adaptation » du raffinage en France sera annoncé au printemps.
Pour ses premiers résultats annuels, Patrick Pouyanné , le nouveau directeur général de Total, a tenu ce matin un discours de rigueur. Touché de plein fouet par la chute des prix du pétrole, qui a perdu 60 % en six mois, le groupe pétrolier s’est engagé dans un vaste plan d’économies passant par des baisses d’investissement, des réductions de coûts, et une accélération des cessions. « Dans notre industrie, la volatilité est plus coutumière que la stabilité », a-t-il commenté. « Notre réponse industrielle, c’est de dépenser moins, afin que le groupe soit durablement rentable quelque soit le cours du pétrole. Nous devons réagir, sans sur-réagir ».
L’impact de la chute du baril est resté limité sur 2014. Le bénéfice net ajusté (hors effet de stocks et éléments exceptionnels) a baissé de 10 %, à 12,8 milliards de dollars. Patrick Pouyanné s’est notamment félicité des bons résultats de la branche raffinage-chimie qui, grâce aux plans de synergie et de réduction des coûts engagés depuis 2011, a atteint son objectif de rentabilité avec un an d’avance. « Le résultat opérationnel net ajusté du secteur a augmenté de 34 % alors que la marge de raffinage n’a progressé que de 4 % », indique le communiqué publié ce matin .
De lourdes dépréciations d’actifs.
La chute du brut n’en a pas moins contraint Total à enregistrer de lourdes dépréciations d’actifs, de 7,1 milliards de dollars sur l’année, sur le schiste aux Etats-Unis (gisement d’Utica), les schistes bitumineux canadiens (Fort Hills et Joslyn), le raffinage européen, et les canalisations du champ de Kashagan, au Kazakhstan. Au final, ces dépréciations ont plombé son résultat net, tombé à 4,2 milliards de dollars (-62 %). Elles ont aussi contribué à réduire les fonds propres, creusant mécaniquement le taux d’endettement, de 28 % à 31,3 %. « Mais les cessions en cours, de Bostik et Totalgaz notamment, amélioreront à nouveau ce ratio de 4 points », a précisé le directeur financier, Patrick de la Chevardière.
La production d’hydrocarbures de Total a baissé l’an dernier de 7 %, à 2,15 millions de barils équivalent pétrole par jour. Un recul essentiellement lié à l’expiration d’une licence importante à Abu Dhabi, que le groupe vient toutefois de renouveler pour une durée de 40 ans (« Les Echos » du 30 janvier). Pour 2015, le groupe prévoit une hausse de 8 %, grâce à ce renouvellement et au démarrage de 8 projets majeurs, en Russie, en mer du Nord ou en Argentine.
Accélération des mesures d’économies
Cette année sera aussi marqué par la mise en œuvre du plan d’économies, dont les grandes lignes étaient déjà connues. Les investissements seront réduits de 10 %, de 26,4 milliards de dollars en 2014, à 23/24 milliards cette année, « ce qui reste élevé malgré tout », a souligné le directeur général. Des projets seront suspendus, sur des champs matures en mer du Nord ou en Afrique de l’Ouest, ainsi que dans les gaz de schiste aux Etats-Unis (Utica), de même que des projets au Nigéria (Bonga Sud-Ouest), en Angola (Zinia), ou dans les schistes bitumineux du Canada (Joslyn).
Au sein des investissements, le budget dédié à l’exploration sera, lui, réduit de 30 %, à 1,9 milliard. Le groupe avait déjà décidé de revoir sa stratégie dans ce domaine, et avait pour cela embauché un nouveau directeur, Kevin McLachlan, qui détaillera ses projets en septembre. « L’idée est d’obliger les équipes à faire des choix », a indiqué Patrick Pouyanné.
Enfin, les coûts d’exploitation seront réduits : engagées dès septembre, les mesures d’économies sont accélérées, avec un objectif pour 2015 porté de 800 millions à 1,2 milliards de dollars. Toutes les branches sont concernées, de l’amont, au raffinage-chimie (lire ci-dessous), au marketing-services dans les zones matures, c’est à dire en Europe. La holding sera également mise à contribution. Ce plan passera par un gel des embauches. « Cela ne veut pas dire zéro, mais cela signifie une division par cinq ou six de nos recrutements », a expliqué Patrick Pouyanné. Au total, 2.000 postes seront ainsi supprimés sur un total de 100.000, grâce aux départs naturels.