zaz.1 a écrit :clarine a écrit :
Finalement, c'est quoi qui te scandalise dans l'histoire : qu'elles se prostituent parce qu'elles ont faim ? Où le prix dérisoire du service ?
A priori, c'est le fait qu'elle se prostitue pour si peu.
C'est justement là où je voulais en venir, à travers ma question : le fait que, pour certains (mais pas Pi-r2 qui dit "les 2"), ce soit plus le prix qui les
que le fait de se prostituer... Or que ce soit pour 2 euros, 50 euros ou 2000 bahts thaïlandais (soit à peu près les 50€ en question), la prostitution est scandaleuse en elle-même lorsqu'elle est "subie". En cela, je suis tout à fait d'accord avec toi, Pi-r2 quand tu dis :
Pi-r2 a écrit :Je suis pour autoriser la prostitution "libre et consentie", c'est à dire si elle est faite par choix de la personne et pas pour une obligation quelconque (et je mets dans obligation la quantité d'argent nécessaire à une vie "décente"). Une nana qui veut se payer des sacs hermès ou des fringues hors de prix et qui trouve fun de faire la prostituée de luxe, ça ne me dérange pas.
Maintenant, hors ces cas particuliers et sans doute assez marginaux (en nombre) dans le monde de la prostitution, je pense que cette activité est pour la plupart du temps une activité contrainte. Un prix "élevé" ne rend pas plus noble l'exploitation de la femme par la prostitution... Alors oui, je ne peux pas m'empêcher de réagir que d'aucuns jouent les effarouchés quand ça "coûte" 2 euros, là où à 50 balles, ça ne leur en touche même pas une (l'autre est encore plus certaine de ne pas moufter
).
zaz.1 a écrit :clarine a écrit :
Est-ce pire que les enfants qui s'échinent à longueur de journée dans les usines du tiers-monde pour quelques roupies de sansonnet ?
Oui c'est pire. La prostitution laisse des traces, plus profondes (si j'ose dire) que l'exploitation dans les usines.
Pi-r2 a écrit :Comme dit plus haut, il y a une échelle dans l'horreur. Oui, c'est un peu pire. Mais je souhaiterais aussi que les gosses n'aient pas à bosser.
Bah, en même temps, le coût du travail d'un enfant est largement moindre que 2€ la 1/2h, par exemple en Thaïlande. Donc, la rémunération de la jeune femme (fille) grecque qui se prostitue, c'est finalement mieux payé. Donc l'échelle est sauve
.
Un petit calcul pour ceux que ça intéresse : salaire mensuel moyen en T. = 5590 Bahts, soit 142 €. Vous noterez que je prends le salaire moyen : nous pouvons légitimement supposer que celui des enfants est largement inférieur. Mais soit. Cela fait la fabuleuse somme de 7€/jour, sur la base de 20 jours travaillés parce que, soyons fous et imaginons qu'ils ne bossent pas le WE et les jours fériés
, tiens, si ça se trouve, ils ont même des congés -pas payés, fô pas pousser non plus
! En admettant toujours une simple journée de 8h de travail -je n'ai quand même pas osé les mettre aux 35h hebdo
-, cela porte leur "salaire" à 44 centimes d'euros la 1/2 h. La passe grecque est donc royalement payée 4.5 fois plus cher... Je pense en réalité "plus", vu les marges que j'ai prises en faisant le calcul. Est-ce à dire que cela n'est pas suffisant à couvrir le préjudice moral de la prostituée grecque ? Du moins, par rapport au préjudice moral subi par le 9 ans thaïlandais ? Et depuis quand le coût de la passe est-il censé couvrir ce préjudice moral
? Sans parler du préjudice physique (et encore moins des mauvais traitements de tous ordres éventuellement subis par le gamin).
Bref, tout ça pour souligner que les arguments visant à établir une échelle de valeur numéraire (ou d'horreur) dans le préjudice qu'est l'exploitation des uns par les autres, c'est un peu (beaucoup) du coupage de cheveux en 4, surtout quand le coût du service n'est certainement pas calculé sur cette base (à cette aune-là, tant le gosse thaïlandais que le jeune Grecque, devrait être mieux payé qu'un col blanc lambda de leur pays, si vous voyez ce que je veux dire).
zaz.1 a écrit :clarine a écrit :
Après avoir crié au scandale sur cette file, combien vont fermer leur AV ou stopper leur day trading ? Oui, c'est bien ce que je pensais.
Je suis pas sur que Pi-r2 fasse du day trading, ou que d'une manière générale ceux qui en font viennent s'indigner ici....
Pi-r2 a écrit :Il se trouve que comme j'ai assez pour mon plan, j'ai tout "sécurisé" , mais d'une ça n'a rien à voir et de deux je crains que ça n'ait aucun effet.
C'est comme me dire de bien voter. Je n'ai qu'une voix, je ne pèse rien. En revanche il est sur que je ne vais pas exploiter cette misère, au moins directement. Mais visiblement en ce qui concerne la Grèce, les décideurs ont décidé sans me demander mon avis.
J'ai la faiblesse de croire, dans ma grande naïveté, que tout est interdépendant. Que la richesse des uns (indécente pour certains et de plus en plus quand on voit les écarts qui se creusent) n'est possible que parce que d'autres sont exploités. De fil en aiguille, le péquin qui place son argent sur un fond quelconque d'une banque qui "investit" en pétrole, minerai, palmeraie, immobilier, ancienne ou nouvelle technologie -qui a besoin de matière première pour être fabriquée, n'est-ce pas-, etc. finit par avoir sa part de responsabilité en bout de chaine sur le paysan exploité, dont la famille est obligée de rejoindre le bidonville de la ville voisine et la fille de se prostituer et le fils de se vendre (sa force de travail ou autre chose, à sa guise
) à bas coût pour survivre. Parce qu'à chaque maillon de la chaine, les intermédiaires veulent faire leur petit ou gros profit, parce que pour que ça soit rentable pour les uns, ça ne le sera pas pour les autres, avec les conséquences que cela entraine.
Du moins, tant que nos sociétés ne sont pas assez évoluées pour accepter un partage de la richesse qui permette à chacun de vivre dans la dignité.
Refuser de voir cela, c'est de l'hypocrisie.
Comme tu estimes ne pas exploiter cette misère directement, tu t'en laves donc les mains. Et surtout cela te conforte dans le "surtout, ne rien changer à ma façon de faire -mes placements, mon train de vie, mon confort personnel, mon million à 50 ans, mes envies de voyage - tiens pourquoi pas en Grèce, il paraît que là-bas, le coût de certains services est fabuleusement bon marché
" puisque, à toi tout seul, tu ne pèses rien et que ton action ne servira à rien. Je dis tu, puisque c'est toi qui parles, mais je pense que cela nous concerne tous (oui moi aussi).
Ben, que dire ? Qu'avec la somme de nos égoïsmes individuels, nous ne sommes pas sortis de l'auberge ? Et que ce n'est pas demain la veille que ça changera (par quel miracle l'homme parviendrait-il à dépasser son égoïsme ?) ? Faut-il s'en remettre à la destinée ? Au bon gros astéroïde (bien, là, je suis sûre que nous n'aurons plus à nous poser ces questions
!) ?
Tu auras compris que pour moi, se défausser au nom du "je suis seul donc ça ne sert à rien que je me les bouge", ça n'est pas satisfaisant.
Par ailleurs, se défausser en disant "les décideurs ont décidé sans me demander mon avis" ne me convient pas non plus car j'assume avoir accepté le contrat social que je "paye" en vivant dans la société dans laquelle je vis : à savoir que "les décideurs" (pour lesquels j'ai ou non voté) ne me demandent pas mon avis. D'ailleurs, j'ai résolu ce problème -partiellement hélas puisque de toute manière le pouvoir s'exerce largement en dehors du politique- en n'allant plus voter et j'assume, là encore, ce choix : en vivant dans une société (où les décideurs qui décident ne le font certainement pas avec mon blanc seing) dont j'accepte les règles et les respecte même si je ne suis pas d'accord.
Après, c'est une question de vivre en cohérence avec soi-même (ou du moins d'essayer). Et si bien sûr, je ne peux pas grand chose dans les grands équilibres macro-économiques (là où est le pouvoir ?), je peux encore faire correspondre pour moi-même (ou du moins essayer) mes actes et mes pensées. Pas ceux des autres, non. Les miens.
C'est bien pour ça que je m'abstiens de jouer les
face à certaines réalités. Parce que je sais que je ne fais RIEN pour l'empêcher. Je ne vais pas, en plus, avoir le culot de me donner bonne conscience en exprimant mon indignation ici ou là. Mais oui, je le fais à partir du moment où j'agis. Là, bien sûr, je ne me priverai pas
.