Les taux négatifs !

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Qqun_de_Passage
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Re: Les taux négatifs !

#601 Message par Qqun_de_Passage » 09 juil. 2021, 15:50

ProfGrincheux a écrit :
09 juil. 2021, 07:24
Le risque est la prolifération d’une couche de déclassés semi-instruits se lançant avec efficacité dans l’agitation politique (exemple idéal-typique: Lénine).
Tout à fait, j’ajouterais même :

1) qu’on ne rend service à personne en massifiant les études supérieures. Et même on acccroit les inégalités des chances, car une fois que tout le monde a un bac+5, qu’est-qui fait qu’on accède à un poste ou carrière de pouvoir ou bien payée ? Les relations.
Au moins, quand les diplômes étaient bien stratifiés, le fils d’agriculteur qui a fait l’X ou HEC passait avant le fils de médecin ou d’inspecteur des finances ayant un simple BTS. Tandis qu’aujourd’hui tout le monde (en tout cas bcp trop par rapport aux besoins) a un bac +5, y compris par boîte à fric, avec un contenu très proche du diplôme HEC, et paraît donc légitime à être cadre.

2) qu’on fait proliférer une classe de « singes savants », qui s’imaginent avoir fait des études de ministres parce qu’ils ont obtenu une master ou même une thèse (généralement dans des sciences molles ou de la gestion), alors qu’en fait ils n’ont même pas des bases solides en culture classique, en raisonnement, en logique. Un des symptômes évidents, c’est l’émergence de la culture woke / cancel culture, pleine de contradictions et de neologismes gloubi-glouba, et à vrai dire sans queue ni tête.
Cela rejoint votre passage que je cite il me semble. Ils ne risquent tout de meme de pas de passer léniniste, leurs parents sont plutôt classes moyennes professions intermédiaires, pas ouvriers 😉.

3) un autre symptôme ahurissant de l’époque : de plus en plus de métiers artisanaux (restauration, pâtisserie, commerces de bouche) sont désormais trustés par des diplômés solides genre HEC-banques d’affaire (big Fernand, Big mama, boutiques de torréfaction de cafe, pâtisseries).
Et là je me dis que la boucle est bouclée : tellement ces métiers, pourtant utiles, avec une demande solvable et bien payés pour peu qu’on fasse bien le boulot, ont été méprisés par les singes savants, que les meilleurs jeunes de la génération (a la fois en études et aussi en background socio-culturel, les deux allant de plus en plus de pair) vont désormais s’y investir flairant le filon.

Je digresse mais en fait à peine…. Car tout ceci montre qu’on peut mettre des milliards dans l‘instruction, pour qu’ils se révèlent en fin de compte parfaitement improductifs voire contre-productifs.

Pour faire une analogie avec le capital matériel, on peut investir dans de belles infrastructures et construire de belles machines, mais si elles ont inadaptées aux besoins (autoroutes en menant nulle part, machines obsolètes), ce n’est que gaspillage…
Modifié en dernier par Qqun_de_Passage le 09 juil. 2021, 16:15, modifié 1 fois.

Qqun_de_Passage
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Re: Les taux négatifs !

#602 Message par Qqun_de_Passage » 09 juil. 2021, 16:09

@neron

Je me permets d’émettre des réserves quant à votre critique des normes comptables et l’idée selon laquelle elles permettraient de comptabiliser de l’immatériel un peu comme on veut.
Si la compta permet effectivement de comptabiliser de l’immatériel, elle exige de continuellement vérifier que cette valorisation est justifiée (le coût de production n’étant pas en soi une justification). Par exemple un fond de commerce peut être valorisé des milliards mais
1) c’est une valorisation doit être justifiée par un sur profit (ROI) qu’on espère obtenir sur X années. Si on l’a payé deux fois plus cher que ce que donne ce calcul, on doit enregistrer immédiatement une perte.
2) Chaque année il faut vérifier que ce sur-profit est bien au rendez-vous sinon la dévalorisation de l'actif est obligatoire via rectification du calcul.

Prenons à titre d’exemple les entreprises bien connues Uber, Deliveroo et Tesla : leurs bilans sont catastrophiques et elles accumulent les pertes comptables en parallèle de besoins de trésorerie insatiables. Si des investisseurs y croient et les financent c’est leur affaire et ce sont leurs calculs et espérances mais ce ne sont certainement pas les bilans comptables qui leur permettent de le faire.

Tout ça pour dire que l’analyse comptable n’a rien de rédhibitoire… pour ma part c’est un référentiel que je comprend et apprécie bcp, certainement’ par familiarité subjective.

Le vrai enjeu, c’est de bien compter, et surtout de tout compter (notamment, lorsqu’on raisonne à l’échelle de l’état ou d’une société, de prendre en compte toutes les externalités, positives ou négatives, qui finissent par se répercuter)

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Re: Les taux négatifs !

#603 Message par pangloss » 09 juil. 2021, 22:16

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Vers la conclusion...
...Il n'est pas difficile, dès lors, de prévoir le genre d'impasse civilisationnelle dans laquelle tout programme de modernisation intégrale de la vie projette nécessairement l'humanité à venir. En généralisant à la totalité des conduites humaines la logique donnant-donnant (celle qui pour éviter le pire doit toujours choisir le moindre mal), ce programme ne peut, en effet, qu'inviter au démontage méthodique de toutes les conditions anthropologiques qui, dans certaines limites très précises, auraient pu permettre aux mécanismes du Marché et du Droit moderne de fonctionner (au moins partiellement) selon les attentes de la théorie libérale. C'est, du reste, ce fait qui permet d'expliquer que le système capitaliste ait pu fonctionner, jusqu'à une époque relativement récente, avec une certaine efficacité, en se montrant encore capable, par exemple, de produire des marchandises de qualité et même, parfois, réellement utiles au genre humain. Cela tient simplement, comme l'écrivait Castoriadis, au fait "qu'il avait hérité d'une série de types anthropologiques qu'il n'avait pas créés et n'aurait pas pu créer lui-même: des juges incorruptibles, des fonctionnaires intègres et weberiens, des éducateurs qui se consacrent à leur vocation, des ouvriers qui ont un minimum de conscience professionnelle, etc. Ces types ne surgissent pas et ne peuvent pas surgir d'eux-mêmes, ils ont été créés dans des périodes historiques antérieures, par référence à des valeurs alors consacrées et incontestables: l'honnêteté, le service de l'Etat, la transmission du savoir, la belle ouvrage, etc. Or, nous vivons dans des sociétés où ces valeurs sont, de notoriété publique, devenues dérisoires, où seuls comptent la quantité d'argent que vous avez empochée, peu importe comment, ou le nombre de fois où vous êtes apparu à la télévision. Le seul type anthropologique créé par le capitalisme, et qui lui était indispensable au départ pour s'instaurer, était l'entrepreneur schumpétérien, personne passionnée par la créaton de cette nouvelle institution historique, l'entreprise, et par son élargissement constant moyennant l'introduction de nouveaux complexes techniqueset de nouvelle méthodes de pénétration du marché. Or même ce type est détruit par l'évolution actuelle; pour ce qui est de la production, l'entrepreneur est remplacé par une bureaucratie managériale; pour ce qui est de faire de l'argent, les spéculations à la Bourse, les OPA, les intermédiations financières rapportent beaucoup plus que les activités "entrepreneuriales". En même temps donc qu'on assiste, moyennant la privatisation, au délabrement croissant de l'espace public, on constate la destruction des types anthropologiques qui ont conditionné l'existence même du système." En exhortant continuellement les hommes à devenir des "acteurs rationnels", dont tous les choix existentiels devraient trouver leur modèle dans l'axiomatique de l'intérêt et le calcul stratégique (puisque telle est bien, en fin de compte, la signification ultime de tous ces appels incessants à la "nécessaire adaptation des mentalités aux évolutions du monde moderne"), la logique libérale ne finit donc pas seulement par détruire graduellement les conditions de toute civilité et de toute décence commune. Elle conduit paradoxalement à mettre en péril le fonctionnement efficace de ses propres montages fondateurs, au rique de réintroduire à tous les niveaux de l'existence sociale cette guerre de tous contre tous (sous la double forme, pour commencer, de la guerre économique et la guerre juridique) dont le dépassement définitif était théoriquement, sa raison d'être initiale.
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Re: Les taux négatifs !

#604 Message par neron » 09 juil. 2021, 22:23

HS ----->
Qqun_de_Passage a écrit :
09 juil. 2021, 16:09
@neron, je me permets d’émettre des réserves quant à votre critique des normes comptables et l’idée selon laquelle elles permettraient de comptabiliser de l’immatériel un peu comme on veut.
Vous pouvez mais je maintien que la compta. est une norme. Ce sont les règles comptables. Rajout: ça donne un référentiel. Je ne crache pas dessus bien qu'elle soit faite déjà pour les comptables mais comme toute règle (tout mur, toute loi fait de mot) on peut la pervertir

Ceux dedans, 24 h / 24 et payé pour cela croyent en cette grille de lecture de l'activité économique de l'entreprise mais c'est des gens qui les connaissent bien (j'aurais pu été expert en m'inscrivant) qui la dirigent. Le comptable, lui fait les totaux. Sortie de leur chiffres, que savent-ils de la valeur réel d'un stock, d'un produit, de R&D, d'un brevet, d'une marque, d'une filiale int., d'un achat, d'un investissement ? Des on-dits. Vs parlez de ROI (lol, c'est bien le truc facile à pervertir). Pour le fun, j'étais ds un.groupe d'intégration d'une trentaine de HP chez Airbus et pour s'amuser ont étaient payé mais nul part dans leur compta. Faut dire que les allemands maîtrisent très peu les coûts. C'est une jungle et amah c'est fait pour

Oui on ne peut pas faire n'importe quoi. Il faut le faire dans ces règles de l'art. Enron, & co voir avant le Crédit Lyonnais aux 10000 experts en compta. et 109 commissaire aux comptes, avait bien réussi. Mon prof de compta. à juste titre, nous disait qu'on pouvait faire ce qu'on veut sur 3 ans après on est rattrapé et je ne peux vous dévoiler comment ça se passe à un niveau. Quand aux pertes, ca peut être une très bonne gestion des majoritaires. Après un DAF en sait un peu plus mais pas tout surtout ce qui est extérieur.

-----. Fin HS
.
Modifié en dernier par neron le 09 juil. 2021, 23:02, modifié 13 fois.
La carte n'est pas le territoire - Le monde du Ā (1945) 1er axiome de sémantique générale.

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Re: Les taux négatifs !

#605 Message par pangloss » 09 juil. 2021, 22:28

Emmanuel Todd
Les luttes des classes en France au XXIe siècle
Chapitre 2 (extrait, pages 61 à 75)

Le déplacement social de l'intelligence


Après la strate consciente, celle de l'économie, plongeons un peu plus profond dans l'analyse de la structure sociale, dans ce que j'appelle la couche subconsciente , qui correspond à l'éducation.
Pourquoi l'éducation est-elle de l'ordre du subconscient ? Parce que chacun sait qu'elle joue un rõle crucial. qu'après les études vient le métier et que ce métier est très largement déterminé par le type d'études que l'on a fait. Il n'est que de songer aux parents qui vivent désormais dans l'angoisse que leurs enfants échouent dans cette étape décisive de leur existence. Même l'OCDE a fini par admettre l'importance de l'éducation, classant systématiquement les nations par niveau éducatif moyen, en parallèle avec le PIB par tête.

Pour autant, je parle d'une strate "subconsciente", parce que l'éducation est aujourd'hui mal située dans les modèles qui s'efforcent de saisir les motivations de l'histoire humaine : on refuse de voir, en général, qu'il s'agit d'une variable autonome, qu'elle se développe - où ne développe pas- en elle-même, indépendamment (pour
une large part) de l'économie. Ainsi, l'OCDE s imagine encore que l'élément moteur pour l'essor de l'éducation, c'est l'investissement financier, ce qui n'est pas le cas : dans la séquence causale du progrès humain, le développement éducatif précède le développement économique et non l'inverse. Des interactions sont tout à fait envisageables. Comme nous allons le voir, une crise économique peut favoriser une régression éducative. Mais, dans l'ensemble, il faut bien comprendre que le développement de l'éducation constitue l'axe central de l'histoire. Il faut certes un investissement minimal pour éduquer, en argent ou en temps d'activité enseignante, mais on constate empiriquement que les sociétés qui réussissent le mieux sur le plan éducatif - actuellement les sociétés du nord de l'Europe, le Japon ou la Corée du Sud - ne sont pas celles qui y consacrent la proportion la plus grande de leur PIB. Nous pouvons trouver des causes non économiques à ces différences d'efficacité : des restes d'intériorité protestante ou de discipline familiale - mais nous atteignons ici les couches inconscientes de la vie sociale. Oublions un instant ces différences et la compétition entre nations : partout sur la planète, cn a voulu apprendre à lire et écrire, puis développer une éducation secondaire et supérieure, avec des succès divers, mais toujours en vertu d'une tendance humaine à "avancer" qui n'est pas déterminée, fondamentalement par l'économie. Cette tendance, on va le voir, n'est pas toujours victorieuse.

Nous vivons, avec la domination idéologique des économistes ou des gens qui croient en la primauté de l'économie - mettons, de Jean-Claude Trichet à Paul Krugman-, le triomphe d'une sorte de marxisme vulgaire, celui qui était censé avoir, avec Marx, remis Hegel sur ses pieds, remplacé l'idéalisme historique par le matérialisme historique. Je me contente ici de revenir à la conception qui dominait, bien avant Hegel, chez tous les penseurs du XVIIIe siècle, mieux, chez tous les gens raisonnables qui, à l'instar de Condorcet dans son Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain, estimaient que l'apprentissage de la lecture et de l'écriture constituait le fondement de la marche en avant de l'humanité. Dans le chapitre précédent, nous avons vu que la phase 1992-2018 peut être décrite comme un moment décisif de régression économique. Ce n'est pas une immense surprise puisque nous avons eu droit pendant cette période à deux récessions avec hausse du taux de chômage à plus de 10 %. l'une provoquée par la politique de la monnaie unique elle-même, l'autre par la politique de la monnaie unique se greffant sur la Grande Récession mondiale de 2007-2008. Comme l'éducation évolue de façon largement autonome, il n'existe pas de raison a priori pour qu'à cette régression économique vienne s'ajouter une régression éducative. La preuve en est que la crise des années 1930 n'avait rien provoqué de tel, ni aux Etats-Unis ni en Europe.
Pourtant, se concentrer sur la variable de l'éducation dans la période 1992-2018 revient à déterrer une mine. Pour la raison simple qu'on constate une crise éducative qui, à bien des égards, est beaucoup plus préoccupante encore que le naufrage économique du pays.


L'extension problématique du supérieur


Commençons par les enseignements secondaire et supérieur. Le développement de l'éducation secondaire s'amorce après la Seconde Guerre mondiale. Les événements de Mai 68 accélèrent le processus et de 1968 à 1995. l'éducation secondaire connaît une expansion formidable, qu'on peut mesurer par la proportion d'individus qui, dans une cohorte donnée (autrement dit, pour faire simple, une génération) obtiennent le baccalauréat général. Entre 1968 et 1995, on passe de 19.6 % d'une cohorte qui obtient le baccalauréat général à 37,2 %, soit presque un doublement. Ensuite, se produit une crise décisive qui est mesurable à partir de 1995 en France, mais avait eu son équivalent dès 1965 outre-Atlantique, parce que l'Europe continentale a grosso modo une génération, voire plus de retard sur les États-Unis: en France, la proportion d'individus qui obtient le baccalauréat général chute de 37,2 à 31,6 % entre 1995 et 2004.
Il ne faut pas exclure complètement la conjoncture et l'économie comme facteurs explicatifs de cette baisse : elle a lieu dans le contexte de contraction des dépenses liée à la première des deux récessions économiques que j'évoquais plus haut entièrement imputable à Maastricht. L'austérité budgétaire ahurissante imposée à tous pour respecter les critères d'entrée dans l'euro n'a pas épargné le système éducatif. Rappelons-nous l'ambiance de l'époque : une véritable crise, incluant les grandes grèves de l'automne 1995, une dissolution du Parlement menant à l'autodissolution tragicomique du pouvoir présidentiel de Chirac. Cette atmosphère dépressive a pu contribuer à la chute stupéfiante, en un peu moins d'une décennie, de 37.2 % d'une génération à obtenir le bac général à 31.6%. Toutefois, le taux de chômage n'est resté supérieur à 10 % que de 1993 à 1999. Or la baisse éducative s'étend, elle, de 1995 a 2004. Si, conjoncturellement, elle a pu être en partie déclenchée par le contexte économique-monétaire, sa prolongation et la trajectoire nouvelle qui se dessine par la suite invitent à chercher des causes plus profondes.
On observe, dans un troisième temps, une reprise apparente : entre 2004 et 2018, la proportion des individus qui, dans une cohorte d'âge, obtiennent le baccalauréat général remonte de 31.6 2 42,1 %. Mais avons-nous toujours affaire au même bac ? Je pense que la rupture de 1995 est une vraie rupture. La réalité des progrès antérieurs à cette date n'est pas
Kidiscutable : jusqu'à 1995, le bac général restait le bac. Il n'était pas dévalué par rapport à celui qu'avaient pu passer les générations antérieures. La hausse postérieure à 2004 évoque autre chose. Cette remontée de la proportion d'une génération obtenant le bac correspond en effet, entre 1995 et 2018, à un taux de réussite des candidats au bac général qui est passé de 72 % à 88 %. Donc, non, nous n'avons plus affaire au même bac : il est plus facile à obtenir.

(Tableau 2.1. Le pourcentage de bacheliers par cohorte)

La chute de l'addition à trous, et du reste

Une étude récente de la Direction de l'évaluation, de la prospective performance (DEPP, rattaché à l'Éducation nationale), à la fois solide et simple dans sa convention, permet de mesurer de façon tangible cette baisse de niveau et de la saisir à la source, au sortir du primaire. Elle nous donne pour les élèves de CM2 en 1987, 1999, 2007 et 2017 un état de l'évolution des scores en calcul. Evaluer la façon dont des enfants de dix ans environ sont capables de faire à la main des additions à trous, des soustractions à trous, des multiplications et ce qui reste le plus difficile pour nous tous, des divisions, présente un avantage : les résultats sont facilement comparables d'un enfant et d'une année à l'autre. Or qu'observe-t-on entre 1987 et 2017 ? Le score moyen passe de 250 points en 1987 à 210 en 1999, 202 en 2007, 176 en 2017. Une véritable chute donc.

Ces scores en calcul sont fortement corrélés aux performances en lecture et en orthographe. Une étude un peu antérieure de la DEPP nous apprend ainsi que les compétences orthographiques mesurées dans le cadre d'une dictée diminuent globalement : en 2015. les
élèves font en moyenne 17.8 erreurs contre 14.3 en 2007 et 10,6 en 1987. Point significatif : c'est l'orthographe grammaticale (règles d'accord entre le sujet et le verbe, accords dans le groupe nominal, accords du participe passé) qui demeure la source principale de difficultés pour les écoliers français Or on sait que les accords de la langue française sont très proches du calcul en termes de gymnastique mentale.

Ces chiffres qui évaluent le niveau scolaire d'élèves de CM2 sont précieux : ceux de la première étude (sur le calcul) concernent des générations qui ont passé le bac respectivement en 1994, 2006 et 2014, ainsi que celle qui le passera en 2024. des générations qui ont donc
fait leurs études supérieures entre 1994 et 1999, entre 2006 et 2011, entre 2014 et 2019, ou qui les feront entre 2024 et 2029. Ils per de se projeter dans l'avenir et de se faire une idée de l'état intellectuel des générations futures. Cet avenir, on le devine, risque de ne pas être radieux.

Les résultats des études de la DEPP confirment l'hypothèse selon laquelle nous n'avons plus affaire au même bac et que l'augmentation du nombre de bacheliers après 2004 n'est pas dans la continuité des tendances de l'après-guerre et de l'après-1968. Sinon, comment expliquer que de plus en plus d'enfants obtiennent le bac au sein de générations qui savent de moins en moins bien écrire et compter ?

(1. Note d'information n 28, novembre 2016, - Les performances en orthographe des élèves la fin de l'école primaire (1987-2007-2015) )

Ces chiffres laissent supposer que le niveau de l'enseignement supérieur a dû, lui aussi, baisser pendant notre période : car l'augmentation de la proportion de personnes qui obtiennent le bac, observée à partir de 2005, a bien sûr été suivie d'une augmentation de la proportion d'une génération qui fait des études supérieures.

Les sources Eurostat nous disent qu'en France la part d'une cohorte qui fait des études supérieures d'un type ou d'un autre c'est
bac + 2 minimum) est passée de 27.4 % en l'an 2000 à 43,6% en 2016. Il suffit de réfléchir deux minutes pour se rendre compte que quelque chose cloche : une société ne peut pas faire un bond éducatif de cette ampleur en seulement seize ans. Le développement de l'éducation obéit à des rythmes plus lents. Le niveau des études supérieures non plus ne peut donc pas être resté le même.

J'admets ces déclins par devoir de chercheur et avec tristesse. Toute ma vie, j'ai resisté aux théories "déclinistes". Je ne suis, comme Alain Finkielkraut, pessimiste de tempérament et social-dépressif d'idéologie. Je suis un optimiste, sensible aux progrès de l'humanité : l'un de mes premiers livres s'intitulait L'Enfance du monde et j'y analysais en détail l'alphabétisation universelle de la planète. Cet acquis n'est pas perdu car j'insiste là-dessus, le récent déclin educatif n'empêche pas les enfants d'apprendre à lire, écrire et compter. Simplement, ils le font un peu moins bien qu'auparavant, plus lentement avec moins d'aisance. Enregistrer ces résultats en baisse représente pour moi une application du principe d'empirisme, qui a guidé toute ma vie de chercheur.

L'année ou le niveau baissera pour la société
dans son ensemble : une évaluation difficile


De cette évolution des cohortes les plus récentes, on pourrait tenté de déduire que le niveau éducatif global de la société baisse. Ce n'est pas le cas. Du moins, pas encore.

Le niveau éducatif d'une société est constitué des niveaux éducatifs de toutes ses tranches d'âge. Or le niveau éducatif des anciennes générations est encore extrêmement bas et leur disparition fait mécaniquement monter le niveau global. Les deux tableaux qui suivent (non représentés ici, Source INSEE) font apparaître la rareté des études supérieures au-dessus 65 ans et la fréquence plutôt élevée des difficultés d'écriture et de calcul au-dessus de 50 ans, ce qui semble contredire ce qui vient d'être dit de la chute récente.


Un article très intéressant de 2016 sur les difficultés d'écriture et de calcul selon l'âge dans la population active ( jusqu'à 65 ans donc) constate que ces difficultés sont maximales dans la population active entre 60 et 65 ans. Pour autant, comme le notent les deux auteurs, Fabrice Murat et Thierry Rocher, ces chiffres doivent être interprétés avec précaution parce qu'au-delà d'un certain âge on mesure une baisse des compétences en écriture et en calcul due au vieillissement. Ce mélange d'effets de cohorte et de cycle de vie rend l'évaluation
plus complexe qu'elle n'y paraît.

Énumérons les évolutions que nous devons combiner pour suivre le niveau éducatif global.
Du côté positif :

- La disparition des cohortes âgées ayant fait peu d'études secondaires et supérieures et dont les compétences en calcul et en orthographe étaient faibles

- l'élévation réelle du niveau des cohortes jusqu'à la génération qui a eu son baccalauréat en 1995, et dont les études supérieures peuvent être considérées comme de niveau stable.

Du côté négatif :

- les problèmes cognitifs des actifs pour toutes les cohortes à partir de 50 ans environ, sachant que la proportion d'actifs de cet âge augmente par suite du vieillissement général de la population;

- la chute du niveau en calcul et orthographe des générations les plus jeunes. qi, lorsque celle-ci avancent en âge, conduit à une baisse de niveau du baccalauréat puis de l'enseignement supérieur.

J'ai, malgré ces difficultés, essayé de trouver une façon raisonnable de situer dans le temps un point de basculement : le moment où l'arrivée à l'âge adulte des jeunes générations plus faibles en calcul pèvsera plus lourd dans les équilibres économiques et sociaux que la sortie des générations anciennes peu formées, un moment où la population française dans son ensemble passera d'un niveau éducatif ascensionnel à un mouvement descendant. J'ai choisi la date où les jeunes de niveau plus faible, mesuré par l'étude de la DEPP atteindront l'âge médian actuel de 40 ans, considérant qu'à ce moment-là l'effet d'amélioration lié à la sortie des générations anciennes ne jouera plus vraiment. On peut ainsi faire une estimation de l'année où commencera la chute du niveau éducatif global de la société française.

Je suis parfaitement conscient de la multiplicité des décisions arbitraires qui interviennent dans un tel choix. Dans le contexte d'incertitude qui pèse désormais sur les niveaux du primaire, du baccalauréat et des études supérieures, toute évaluation qui prétendrait être une certitude prêterait à rire. Reste que nous ne pouvons prétendre parler de l'avenir sans une telle tentative d'évaluation.

La date d'arrivée à l'âge de 40 ans des premières générations pour lesquelles la DEPP mesure une chute de niveau est 2030. Nous allons devoir imaginer une compétence globale qui baisse dans le contexte d'un système économique technologiquement plus sophistiqué que jamais, plus robotisé notamment. Mais le monde qui vient est-il si incohérent, au fond ? Des individus qui lisent moins facilement auront-ils besoin de ncette compétence pour parler à des machines ?

Nous cherchons à comprendre l'inertie politique de la période 1992-2019 et notre évaluation nous indique qu'elles ne furent pas, pour la population française dans son ensemble, une phase de déclin. Les groupes d'âge actifs étaient en progression cognitive. S'il y a bdans l'évolution de l'éducation, bien des raisons de nous inquiéter pour l'avenir, nous n'y trouvons pas une explication des renonciations du passé proche. C'est même à l'apogée du niveau éducatif atteint par la France que l'euro a cessé d'être mis en question.

Une chute démocratique

L'étude de la DEPP comporte une bonne nouvelle dans la mauvaise nouvelle : le niveau baisse, mais cette baisse touche les enfants de toutes les catégories sociales et ne fait guère d'entorse au principe démocratique. De 1987 à 2017, les scores des enfants des cadres et des professions intellectuelles supérieures tombent de 278 à 206, ceux des professions intermédiaires de 263 à 188, ceux des ouvriers de 238 à 166. La chute n'est pas exactement proportionnelle puisqu'elle s'aggrave quand même un peu lorsqu'on descend l'échelle sociale : 26% chez les cadres, 28% chez les intermédiaires, 30 % chez les ouvriers. Mais nous sommes toujours dans le modèle d'une France où la croissance des inégalités entre CSP n'est pas le problème central.

Cette chute générale suggère que les causes sont elles aussi, générales. La première qui vient à l'esprit aurait quelque chose à voir avec les techniques d'apprentissage si les enfants savent moins bien compter, ce serait par exemple, parce qu'à l'âge de la calculette, on leur fait faire moins de calcul mental. Ce n'est pas impossible. Nous pourrions d'ailleurs compléter cette interprétation par une remarque optimiste soulignant la nouvelle virtuosité des enfants sur leurs écrans et téléphones portables. Certes, ils comptent moins bien, mais ils savent faire tellement d'autres choses ! Je pense qu'en réalité l'école n'est pas la seule ni même la principale responsable du déclin des facultés intellectuelles élementaires. L'apprentissage de la lecture, et celui du calcul, si fortement liés, doivent autant sinon davantage à l'entourage familial et social qu'à l'institution scolaire. Il intervient durant une phase cruciale du développement d'un individu et modifie son cerveau en profondeur. La lecture complexifie la vie intérieure et transforme la personnalité de l'enfant qui la pratique de façon intensive, elle change son rapport au monde. Or cet apprentissage a été perturbé dès l'arrivée de la télévision bien avant celle des tablettes et écrans de notre monde actuel.

C'est évident dans le cas des États-Unis, où la baisse des scores aux tests de raisonnement SAT se manifeste dès les années 1960-1970 et peut être directement corrélée à l'impact massif et précoce de la télévision : les jeunes Américains se sont mis à lire moins, ce qui a
nui au formatage positif des cerveaux. Le développement de l'univers avant tout visuel d'Internet (les vidéos et séries télé en ligne) n'a évidemment pas arrangé les choses : toutes les sociétés du monde doivent désormais affronter un reflux massif de l'écrit comme instrument de loisirs pour les enfants en cours de formation cérébrale.

Il ne s'agit pas de dire que la vidéo est nuisible en soi. Les vidéos comme les séries télé peuvent être très instructives et posséder une valeur artistique supérieure à celle de beaucoup de romans. Mais elles ne formatent pas le cerveau de la même manière. A un certain âge
(en gros à partir du moment où l'on sait lire, vers six ans, jusqu'à la puberté), lire un mauvais roman fait plus de bien au cerveau que regarder un chef-d'oeuvre du cinéma. Ce constat a quelque chose de paradoxal : il est insensé qu'une percée technologique nous menace d'un effondrement intellectuel, et difficile d'admettre que l'un des grands facteurs du développement intellectuel de l'espèce humaine a peut-être été l'effroyable ennui de ces après-midi de vacances où, pour s'occuper, les enfants lisaient.

Notons que la baisse du niveau intellectuel s'observe dans l'ensemble du monde développé. Comme l'a montré James R. Flynn, le quotient intellectuel (QI) a pendant longtemps augmenté dans les pays occidentaux (formidable désaveu de toutes les théories de la dégénérescence génétique qui déduisaient du fait que les pauvres faisaient plus d'enfants celui que le niveau intellectuel allait baisser). Ce Flynn effect, ou hausse généralisée du QI, qui a touché aussi les pays en voie de développement, a cependant, dans la phase la plus récente, cédé la place à un reverse Flynn effect. On peut observer un début de baisse du QI, d'autant plus significatif que la plupart des tests et mesures ont été effectués pour des échantillons représentatifs dans des pays protestants (Norvège. Danemark. Grande-Bretagne, Pays-Bas, Finlande,Estonie). Or le monde protestant, c'était le monde de la lecture (et pas seulement de la Bible).

Pour les générations parmi lesquelles les études de la DEPP ont déjà révélé une détérioration du niveau en calcul, corrélée aux capacités de lecture et d'écriture ainsi qu'à un problème d'agilité intellectuelle en général, la messe est dite. La lecture intensive structure
le cerveau à une certaine époque de la vie. Ses bienfaits ne sont pas récupérables par la suite lorsque celui-ci devient moins plastique (c'est pourquoi l'alphabétisation des adultes est si difficile). Il faut accepter le fait que ces générations liront un peu plus lentement, calculerons un peu moins bien et, comme nous allons le voir plus loin, feront beaucoup d'études. Pour les générations ultérieures, en revanche, rien n'est a priori perdu et une mise sous contrôle des écrans pourrait iinfirmer les projections pessimistes des paragraphes qui précèdent.

On pourrait imaginer que les parents parviennent - non sans mal à protéger leurs enfants des tentations de la télévision et d'Internet pendant la phase de leur développement où il est important qu'ils lisent beaucoup. Mais soyons clairs : il s'agirait d'une révolution aussi importante que la diffusion du puritanisme entre le XVIIe et le XIX siècle, l'interdit visuel n'étant pas plus facile à mettre en place qu'un interdit sexuel. Mais qui sait : dans la phase la plus récente, la lutte contre le tabagisme ou celle pour la ceinture de sécurité ont dans l'ensemble plutôt réussi.


La stratification educative

Au-delà de la question de savoir si le développement de l'éducation supérieure signifie une hausse du niveau éducatif réel des cohortes - ce qui était vrai mais ne l'est probablement plus depuis l'arrivée à l'université des générations qui ont eu vingt ans en l'an 2007 -, il n'est pas sûr que son essor soit un pur bienfait pour l'humanité.

L'éducation supérieure conduit aussi à une crise de la démocratie. Elle introduit dans la société une division nouvelle : la stratification éducative. Celle-ci va avoir des conséquences idéologiques non négligeables : elle favorise le développement d'un subconscient inégalitaire qui explique l'acceptation de plus en plus grande, à partir du milieu des années 1960 aux États-Unis et des années 1990 en France, de politiques économiques inégalitaires ou aux conséquences inégalitaires (le libre-échange et l'euro en ce qui nous concerne).

La hausse du taux d'alphabétisation puis l'atteinte de l'alphabétisation universelle, du XVIIe au XXe siècle, avaient scandé la progression irrésistible de l'idéal démocratique. Les populations se rendaient compte que ce qui était réservé aux prêtres et aux commerçants au
Moyen ge se diffusait à des masses de plus en plus grandes bientôt le dernier des ouvriers agricoles serait capable de lire et d'écrire. La société pouvait bien rester fondamentalement inégalitaire sur le plan économique (qu'on songe à la France de la fin du XIXe siècle), dans la mesure où les individus étaient de plus en plus égaux en termes de compétences intellectuelles et éducatives, un subconscient democratique irriguait progressivement le corps social.

Dans ce monde démocratique ancien, les personnes ayant fait des études supérieures étaient très peu nombreuses, quelques pourcents, et, si elles voulaient exister socialement, il fallait qu'elles parlent aux
autres. Les éduqués supérieurs (je désigne ainsi des personnes qui, avant la mise en place de l'université moderne, ne pouvaient pas, bien entendu, avoir fait des études supérieures à proprement parler, mais qui avaient eu des précepteurs), ces éduqués supérieurs, donc,
s'ils étaient producteurs de culture, devaient s'adresser aux alphabetisés ordinaires, dans leurs romans, leurs pamphlets, leurs chansons.

Or la montée en puissance de l'éducation supérieure a produit surtout à partir du moment où elle s'est bloquée, où l'on a pressenti que, contrairement à l'alphabétisation, elle ne serait pas universelle, l'émergence d'un sentiment inégalitaire d'un type nouveau. Le problème n'est pas simplement que ceux qui sont en haut se voient au dessus des autres et sous prétexte qu'ils ont eu une éducation supérieure, se pensent vraiment supérieurs. Le problème est aussi qu'ils peuvent se permettre de vivre entre eux : 31 % de diplômés du supérieur, cela
représente presque un tiers de la société. Ces personnes peuvent écrire des livres qui ne s'adressent qu'à d'autres éduqués supérieurs. La stratification éducative favorise une vision de l'art élitiste et narcissique. Elle explique qu'on soit passé de Balzac, Zola, Hugo à Catherine Millet, Philippe Besson, Christine Angot. Et elle permet de comprendre une bonne partie de la production cinématographique française de ces dernières décennies, qui n'a plus aucun rapport avec la société en général et se satisfait de ne plus être que le reflet des préoccupations professionnelles et sentimentales des classes dites moyennes supérieures. La Grande Illusion et La Grande Vadrouille mettaient en scène des rapports de classes. Alceste à bicyclette ou Le code a changé, non. Le sommet du décrochage culturel me semble atteint par certaines séries policières de la télévision dans lesquelles des officiers de police tout à fait ordinaires membres en réalité, on l'a vu, des professions intermédiaires) se pavanent, hors service, dans des appartements ou maisons sublimes avec, si possible, vue sur la mer.

Cet réalisme social se produit sur fond d'émergence d'une population dont un tiers a fait des études supérieures contrairement aux deux autres tiers.

Si l'on considère l'ensemble de la population de plus de 25 ans, nous sommes passés de 18 % de personnes ayant reçu une éducation supérieure en 1999, au moment de l'entrée dans l'euro, à 31.4 % en 2018. La masse des éduqués supérieurs a presque doublé. Si l'hypothèse d'un subconscient inégalitaire résultant de la diffusion des études supérieures est correcte, on doit admettre que la masse des sentiments antidémocratiques a énormément augmenté en France depuis Maastricht.

Sur qui ce nouveau subconscient inégalitaire pèse-t-il le plus ? Pas sur les vieux. En 2015-2016, 85% des 65 ans et plus n'avaient pas fait d'études supérieures, ils n'étaient que 6% à avoir atteint bac + 2 et 9% un diplôme du supérieur au-delà de bac + 2.
Selon mes critères, les vieux restent peu fragmentés et donc depositaires de la vieille conscience égalitaire et démocratique. A l'inverse, la génération la plus fragmentée est celle des 25-34 ans qui, à 53 %, n'a pas fait d'études supérieures, mais dont 14% ont atteint bac + 2 et 33 % obtenu un diplôme du supérieur plein et entier. Le groupe socio-démographique porteur du subconscient social inégalitaire le plus fort est donc celui des jeunes de 25-34 ans, diplômés du supérieur à 47 %. On notera que c'est dans ce groupe d'âge qu'on voit apparaître le nouveau retard des hommes sur les femmes, puisque les individus de sexe masculin n'y sont diplômés du supérieur qu'à 44% et les femmes à 51 %. Au terme de l'analyse, nous devons constater que la catégorie qui porte aujourd'hui le plus pleinement le clivage inégalitaire est majoritairement jeune et féminine.
LES LUTTES DE CLASSES EN FRANCE AU XXIe SIECLE, Emmanuel Todd, page 76 et suivantes

L'illusion educative

La proportion de la population qui fait des études supérieures augmente, le niveau de ces études supérieures baisse. Ces deux éléments
contradictoires méritent une analyse plus fine, dont le but ultime sera de saisir leurs implications proches ou lointaines pour l'équilibre et la stabilité de notre société.
En quoi consistent exactement ces études supérieures ? A quoi servent-elles vraiment s'il ne s'agit plus de développer son esprit ou d'acquérir des compétences ?
Il faut le dire franchement : certains diplómes ne valent plus grand-chose. Une telle affirmation évoqura immédiatement dans l'esprit du lecteur des licences de psycho ou de lettres qui ne servent à rien. En réalité, ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Le problème est beaucoup plus large. Un article du site Slate nous apprend que actuellement, en France, 80 % de l'accroissement du nombre de diplômés du supérieur provient du secteur privé avec, en pointe, les écoles de commerce, les écoles paramédicales ou d'ingénieurs. Les étudiants sont certes sélectionnés, mais il faut bien l'admettre, quand même, désormais certains diplômes s'achètent
Si l'on peut acheter son diplôme, à quoi servent concrètement, les études supérieures ? Dans un livre corrosif, le libertarien Bryan Caplan a soutenu la thèse qu'elles ne servaient pas - ou plus - à acquérir des compétences intellectuelles. Leur vocation est surtout de classer les étudiants. Le diplôme est devenu un élément de stratification sociale en lui-même, il procure des avantages tangibles sur le marché du travail. Autrefois, on faisait des études supérieures certes peut-être pour gagner mieux sa vie, mais aussi et surtout parce que l'on poursuivait un idéal d'émancipation intellectuelle, par désir d'apprendre. On fait
désormais des études pour survivre économiquement les diplomés du supérieur gagnent en moyenne 73% de plus que ceux qui
sont pas allés au-delà du secondaire. Cet avantage était de 50% á la fin des années 1970, note Caplan à propos de la situation aux
États-Unis. Et en France ? Le diplôme permet avant tout d'échapper au chômage. Les chiffres sont évocateurs : le taux de chômage des
sans diplômes de niveau certificat d'études primaires ou brevet s'élève à 17 % celui des simples titulaires du bac, d'un CAP ou d'un
BEP a 10%. celui des bacs + 2 ou plus à 5.2 %. Des écarts considérables, donc, de l'ordre du simple au triple.
Les formations supérieures ne stratifient pas simplement, elles sont aussi terriblement stratifiées en interne : la mentalité inégalitaire va se loger dans le moindre détail. Cette obsession de la petite différence qui est devenue l'une des grandes caractéristiques de la mentalité française, se manifeste, dans le domaine de l'éducation supérieure par la hiérarchie qui existe non seulement entre les universités et les grandes écoles, mais entre les grandes écoles elles-mêmes : Polytechnique et les Écoles normales supérieures seront ainsi plus prestigieuses que Sciences Po et HEC, l'7Ecole normale supérieure de la rue d'Ulm que ses équivalentes de Lyon ou Saclay. Et on peut affiner encore : au sein même de l'Ecole normale supérieure de la rue Ulm, on oppose les élèves entrés sur concours (les « normaliens à proprement parler) et les élèves simplement diplômés de l'Ecole normale, sélectionnés sur dossier.

Cette obsession de la distinction conduit les générations nouvelles à trainer dans le supérieur jusqu'à un âge avancé pour empiler les diplômes. Qu'on songe à ces normaliens ou polytechniciens qui enchaînent avec HEC, Sciences Po ou l'ENA (et parfois les trois à la suite). Une telle prolongation des études permet peut-être de sélectionner les plus endurants, mais, parce qu'elle supprime la réflexion personnelle durant trop d'années décisives, elle ne peut qu'aboutir à une baisse de l'intelligence créative, l'intelligence réelle. Tout comme nous estimons que le recul de la lecture entre 6 et 10 ans fait chuter le niveau intellectuel, nous devons postuler que des études supérieures trop longues entre 18 et 25 ans entament les facultés cognitives plus que la vidéo, nous ne devons accuser les études en elles-mêmes en imaginant simplement que trop forme un étudiant se retrouve formaté. C'est bien pire : il faut du temps libre pour apprendre à penser et des études trop longues rythmées par le long chemin de croix des examens et concours, empêchent sans doute le développement de l'intelligence. Tout comme l'ennui forçait les enfants à la lecture le désordre de la vie estudiantine traditionnelle contribuait à l'épanouissement intellectuel de nos élites. Le temps de cet épanouissement a été supprimé. Accumulations de vidéos (entre 6 et 10 ans) et de concours (entre 18 e 25) convergent pour créer en France un problème majeur de déficience cognitive.

La prime au conformisme

Comment réussit-on des études supérieures aujourd'hui ? Et grâce à quelles aptitudes ?
Après avoir utilisé le calcul comme indicateur central du niveau des élèves de CM2, il serait malvenu de prétendre, par exemple, que les mathématiques les plus élevées ne valent rien et que ceux qui réussissent les concours de Normale sup (en sciences), de Polytechnique, de l'Ecole des mines ou de Centrale, n'ont pas un bon niveau. Incontestablement le système de concours des grandes écoles scientifiques reste l'une des forces de la France, l'un des éléments de stabilité de son système social et intellectuel.
Quand on en arrive à l'ENA, mieux, au classement de sortie de l'ENA, il est clair, en revanche, que l'intelligence pure n'est plus le critère premier. Je peux me tromper ici, mais il me semble que le critère fondamental pour finir dans la botte de l'ENA, c'est-à-dire pour devenir inspecteur des Finances, auditeur à la Cour des comptes ou au Conseil d'Etat, c'est le conformisme.
Résumons-nous. Le diplôme vaut quelque chose même quand il ne vaut rien. Même dépourvu de contenu intellectuel, il est un titre donnant accès, dans un monde désormais stratifié et économiquement bloqué, à des emplois, des fonctions, des privilèges. Le diplôme est devenu, dans une société où la mobilité sociale a dramatiquement chuté, un titre de noblesse. Il y avait la "noblesse d'État" de Bourdieu, la grande, avec l'ENA en son coeur. L'expansion du nombre des titres nous oblige à concevoir, de plus, une prolifération nobiliaire, équivalent post industriel d'une inflation de petite noblesse dans une société paysanne stagnante. La lutte pour les titres ne se produit cependant pas dans un vide, elle n'oppose pas des individus sortis de nulle
part. Dans un monde qui étouffe économiquement, nous devons analyser finement les affrontements à l'intérieur des catégories privilégiées.
L'accès à l'éducation supérieure est devenu l'un des enjeux de la lutte des classes, et je ne pense pas ici à une lutte qui opposerait les enfants de cadres supérieurs aux enfants d'ouvriers. De plus en plus, la lutte voit s'affronter deux groupes en particulier : les enfants de riches et les enfants de profs. Chaque fois que l'on élève les droits d'entrée dans un établissement, on favorise les enfants de riches par rapport aux enfants de profs, qui sont par ailleurs avantagés, parce que leurs parents sont constitutifs du système et qu'ils sont particulièrement bien informés des règles du jeu.

La réaccumulation de l'intelligence au bas de la société

Allons jusqu'au bout de notre raisonnement. Si le système éducatif n'assure pas vraiment la sélection des plus intelligents, dans un contexte ou la paralysie économique a bloqué toute mobilité sociale et accentué les inégalités de classes dans l'accès aux études supérieures, nous devons émettre l'hypothèse complémentaire qu'une intelligence réelle, déconnectée de la stratification des diplômes, est en train de s'accumuler dans les strates moyennes et inférieures de la société.
Dans son roman dystopique de 1958, The Rise of the Meritocracy, Michael Young avait prévu que le développement des études supérieures aboutirait à stratifier la société et à y diffuser un sentiment inégalitaire. Selon lui, cette stratification, dérive de l'idéal d'égalité des chances, produirait un monde hiérarchique beaucoup plus implacable que le monde postulé par le marxisme, divisé entre les propriétaires du capital et les autres. Il est, en effet, bien plus difficile de remettre en question des inégalités fondées sur le « mérite », en l'occurrence la réussite scolaire, que sur la richesse ou l'hérédité.
Young avait anticipé que cet idéal méritocratique qui mettait les meilleurs en haut allait produire une société effroyablement stable, où les non sélectionnées, obligées d'accepter leur infériorité, resteraient soumises. Mais que se passe-t-il si la sélection ne repose plus sur le mérite véritable et que le décalage entre diplôme et compétence intellectuelle devient criant ?
Je crois que la société française a été réellement méritocratique entre 1945 et 1995. Pendant cette période, les enfants de bourgeois
de cadres et de professeurs sont toujours restés avantagés, mais l'expansion générale de l'économie et de l'éducation augmentait massivement le nombre de places. Le concept de reproduction sociale n'est pas incompatible avec celui d'ouverture sociale lorsqu'on se trouve dans une phase ascendante. Il me semble d'ailleurs que le succès de la pensée de Bourdieu s'explique fondamentalement par la coexistence, dans la période concernée, d'une France qui se reproduit et d'une France qui monte. Le bourdieusisme fut l'une des idéologies naturelles de la France en ascension, qui ne se lassait jamais de voir denoncés les privilèges auxquels elle aspirait et les désavantages du monde populaire auxquels elle venait d'échapper.
Entre 1945 et 1995, durant un demi-siècle donc, les milieux populaires ont été pompés » de leurs individus scolairement doués, qui ont pu gravir les échelons sociaux. Ce mouvement ascensionnel a contribué à vider la contestation populaire de ses élites intellectuelles naturelles. Pensons à ces ouvriers très qualifiés qui étaient
l'armature du Parti communiste français et de la CGT. Les intellectuels organiques du PCF ou du PSU ont quant à eux été absorbés et dissous, phagocytés, par la masse des éduqués supérieurs, devenue aussi importante que le prolétariat. Mais si, désormais, le diplôme et l'intelligence se séparent, le système social méritocratique s'affaiblit. Et nous devons admettre que nous sommes au début de la phase suivante de l'histoire. Renversons la perspective et cessons de nous lamenter parce que, selon le critère méritocratique, le monde devient plus injuste. Nous devons être capable de concevoir que, si désormais on peut «acheter" un diplôme du supérieur et si le critère de la réussite est, outre l'argent, le conformisme, si des incompétents bénéficient d'un avantage de sélection, symétriquement des compétents intellectuellement s'accumulent dans les couches moyennes et inférieures de la structure socio-économique. Et on peut s'attendre à ce qu'à terme ces derniers forment les cadres d'une future révolte. Mais un doute me vient. N'y sommes-nous pas déjà ? Le mouvement des Gilets jaunes s'est finalement montré fort intelligent face à des adversaires énarques qui m'ont semblé très désemparés.
Je suis conscient d'avoir forcé le trait dans l'analyse qui précéde, sans doute porté par mon admiration pour le dynamisme de Michael Young et mon hostilité instinctive au fixisme de Pierre Bourdieu. Revenant dans la complexité du présent dans une représentation nuancée de la vie sociale, je dois rappeler que les études supérieures sont un bienfait, qu'il faut apprendre avant de créer et que la majorité des diplômés restent des gens intelligents qui méritent leurs titres, même si souvent, ils sont, comme tant d'autres, conformistes. Il s'agissait ici de saisir à la source quelques nouveautés importantes afin d'anticiper des évolutions paradoxales qui devraient mener la France, dans un futur pas si lointain, à tout autre chose que la stabilité et la paix sociale

Plus de diplômés et plus de précarité

Nous aboutissons au tableau d'une société de plus en plus stratifiée par le diplôme (et tendanciellement de moins en moins par l'intelligence créative), diplôme qui offre avant tout des avantages sur le marché du travail. Si nous en restions là, nous pourrions être tentés de définir un modèle de stabilisation de l'inégalité. Il ne convient pas. Ce que montrent les statistiques économiques associées au niveau éducatif, c'est que le diplôme est devenu un instrument défensif et un instrument défensif qui ne suffit plus. Les éduqués supérieurs trouvent plus facilement du travail, on l'a vu plus haut, mais leur taux de chômage plus has ne doit pas masquer le fait que le niveau de revenu des jeunes générations les plus éduquées est en baisse.
Cette baisse est reconnue par l'Insee : « Bien que plus diplômés, les salariés récemment entrés sur le marché du travail sont globalement moins bien rémunérés que leurs aînés. En 2016, les jeunes salariés sortis depuis 1 à 4 ans de formation initiale perçoivent un salaire
net médian mensuel, tous temps de travail confondus, de 1 390 euros contre 1 730 euros pour les salariés qui ont terminé leurs études depuis plus de dix ans". Les jeunes diplômés supérieurs-et se sentant certainement supérieurs - vivent en vérité une spectaculaire dégradation de leur niveau de vie par rapport aux générations antérieures.
Cette dégradation ne touche pas seulement ceux qui obtiennent les diplômes du supérieur les plus médiocres. Elle s'étend à ceux qui sont passés par de très grandes écoles. Et elle ne concerne pas seulement la rémunération du travail, mais sa nature. Prenons les polytechniciens, qui, dans notre système culturel, forment l'archétype le plus neutre de l'excellence à la française et ne font pas l'objet de controverses récurrentes comme les élèves de Sciences Po et de l'ENA. Je suis convaincu que les conditions d'intégration de l'Ecole polytechnique sont restées aussi difficiles qu'autrefois, peut-être même plus dures en raison d'une compétition devenue plus forte. Mais je suis sûr aussi que les vies auxquelles les polytechniciens ont droit quand ils entrent sur le marché du travail aujourd'hui sont trés dégradées qualitativement par rapport à celle de leurs ainés. Ces derniers pouvaient poursuivre des vies intellectuelles enrichissantes tout en étant correctement payés et en ayant les moyens d'élever une famille. Les fondateurs de l'Institut national d'études démographiques (Ined) et de l'excellence démographique françaises, par exemple, étaient polytechniciens. Ils purent faire de la recherche de haut niveau sans cesser d'être des bourgeois. Aujourd'hui, ce n'est plus possible : si un polytechnicien veut gagner correctement sa vie, il va devoir aller boursicoter dans des salles de marché, c'est-à-dire se livrer à une activité intellectuelle très en dessous de sa compétence. Et même s'il gagne des millions, il est devenu un prolétaire de l'esprit.
Nous pouvons donc ajouter la chute du niveau et de la qualité de la vie des jeunes diplômés à la liste des facteurs de déstabilisation de la société française.
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Re: Les taux négatifs !

#606 Message par ProfGrincheux » 09 juil. 2021, 22:41

Qqun_de_Passage a écrit :
09 juil. 2021, 15:50
Cela rejoint votre passage que je cite il me semble. Ils ne risquent tout de meme de pas de passer léniniste, leurs parents sont plutôt classes moyennes professions intermédiaires, pas ouvriers 😉.
Regardez la bio de Lénine et qui étaient ses parents.
Ignorés: Manfred, titano.

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Re: Les taux négatifs !

#607 Message par ProfGrincheux » 09 juil. 2021, 23:50

Quoi qu’il en soit, avec mes hypothèses maladroites et mes perplexités, j’ai relancé le débat.

Cette histoire de capital immatériel me semble vraiment importante, c’est un changement de structure de l’économie et l’idée qu’un changement de structure change profondément le comportement du système y compris de façon contre-intuitive m’est naturelle.

J’ai mis l’accent sur des questions de compta que je connais mal car c’est une représentation de l’activité économique d’une entreprise. Je connais peut être encore plus mal la comptabilité publique, mais c’est une représentation de l’activité économique de l’Etat.

D’une certaine façon, la seule chose dont je suis à peu près sûr est la suivante: il y a deux erreurs fondamentales à ne pas commettre. Une première erreur est de confondre la représentation et la chose représentée, une seconde erreur est de croire que l’activité de l’Etat, des entreprises et des ménages (les trois grandes catégories d’acteurs économiques) se résument à leur activité économique (erreur favorisée par ce que Todd appelle la domination idéologique des économistes).
Ignorés: Manfred, titano.

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Re: Les taux négatifs !

#608 Message par WolfgangK » 10 juil. 2021, 00:03

ProfGrincheux a écrit :
09 juil. 2021, 07:24
Qqun_de_Passage a écrit :
08 juil. 2021, 23:12
Si c’est pour faire de la garderie, y compris pour des jeunes adultes mis sur des voies de garage, c’est moins sûr, et même contre productif (les concernés feraient mieux de vaquer à des occupations plus productives ).
Les conservateurs ont toujours été réticents à la massification de l’enseignement car la production de diplômés est plus facile à mettre en route qu’un développement économique fournissant des débouchés satisfaisants pour ces derniers. Le risque est la prolifération d’une couche de déclassés semi-instruits se lançant avec efficacité dans l’agitation politique (exemple idéal-typique: Lénine).
https://fr.wikipedia.org/wiki/Surproduc ... C3%A9lites
L'islamophobie n'est pas plus du racisme que l'antisionisme n'est de l'antisémitisme.
Que les racistes soient islamophobes n'implique pas que les islamophobes soient racistes.

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Re: Les taux négatifs !

#609 Message par Sifar » 10 juil. 2021, 00:12

ProfGrincheux a écrit :
09 juil. 2021, 22:41

Regardez la bio de Lénine et qui étaient ses parents.
Si cela peut intéresser quelqu'un. En lisant la biographie de Lénine sur Wikipédia en français, j'apprends qu'il a été influencé par un certain Nikolaï Tchernychevski, auteur de
https://fr.wikipedia.org/wiki/Que_faire ... nychevski)

Je trouve fascinant que des événements de portée mondiale, comme l'opération Bagration, la prise du Reichstag, le vol de Gagarine, soient des conséquences d'un opuscule publié un siècle plus tôt par un homme oublié.
Ce que dit Pimono est exact.

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Re: Les taux négatifs !

#610 Message par Qqun_de_Passage » 10 juil. 2021, 20:12

WolfgangK a écrit :
10 juil. 2021, 00:03
ProfGrincheux a écrit :
09 juil. 2021, 07:24
Qqun_de_Passage a écrit :
08 juil. 2021, 23:12
Si c’est pour faire de la garderie, y compris pour des jeunes adultes mis sur des voies de garage, c’est moins sûr, et même contre productif (les concernés feraient mieux de vaquer à des occupations plus productives ).
Les conservateurs ont toujours été réticents à la massification de l’enseignement car la production de diplômés est plus facile à mettre en route qu’un développement économique fournissant des débouchés satisfaisants pour ces derniers. Le risque est la prolifération d’une couche de déclassés semi-instruits se lançant avec efficacité dans l’agitation politique (exemple idéal-typique: Lénine).
https://fr.wikipedia.org/wiki/Surproduc ... C3%A9lites
Merci, fort interessant de voir que des auteurs rejoignent nos pensées :)
Il prédit également que cette situation provoquera des troubles sociaux aux États-Unis au cours des années 2020[4],[5].

La surproduction d'élites a été citée comme la cause première de certaines tensions politiques aux États-Unis, alors que le racisme structurel et d'autres injustices sont invoqués pour expliquer pourquoi tant de Millenniaux bien éduqués sont sous-employés ou n'atteignent pas le statut promis par la méritocratie qu'on leur a vendu
Le sujet est d’autant plus sensible aux USA que les cursus ont coûté et été payés un bras (ou deux) par les intéressés , financés, pour les classes moyennes, par un gros crédit étudiant qu’on se traîne à la patte… il y a donc de quoi avoir les boules au carré !

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Re: Les taux négatifs !

#611 Message par ProfGrincheux » 11 juil. 2021, 09:25

Sifar a écrit :
10 juil. 2021, 00:12
ProfGrincheux a écrit :
09 juil. 2021, 22:41

Regardez la bio de Lénine et qui étaient ses parents.
Si cela peut intéresser quelqu'un. En lisant la biographie de Lénine sur Wikipédia en français, j'apprends qu'il a été influencé par un certain Nikolaï Tchernychevski, auteur de
https://fr.wikipedia.org/wiki/Que_faire ... nychevski)

Je trouve fascinant que des événements de portée mondiale, comme l'opération Bagration, la prise du Reichstag, le vol de Gagarine, soient des conséquences d'un opuscule publié un siècle plus tôt par un homme oublié.

Dire qu'il s'agit de conséquences est faire un usage un peu cavalier de la causalité ou, du moins, de sauter beaucoup d'étapes du raisonnement et de causes indépendantes.

La conséquence semble plutôt être une restructuration des valeurs dans un groupe d'individus qui s'est lancée dans une quête du pouvoir apparemment désespérée mais qui a marché.

Il y a besoin de prendre en comptes d'autres facteurs pour expliquer pourquoi l'entreprise de Lénine a marché, ou même pourquoi la stabilisation du pouvoir bolchevik à entrainé le vol de Gagarine et il m'est très difficile de voir le rapport avec l'incendie du Reichstag.

Je pense que l'entreprise de Lénine n'a marché que parce que le pouvoir en place s'est brusquement effondré. J'ai du mal à imaginer comment ce pouvoir se serait effondré sans la guerre.

La grosse question est si le système économique en Occident est suffisamment stable pour ne pas connaître la liquéfaction qu'ont connu, sur le même territoire et à seulement 70 ans d'intervalle, le pouvoir tsariste et le pouvoir communiste. Marx avait cru établir que non, mais cela n'a pas été réfuté (ce qui a été réfuté est la scientificité du marxisme).

Faisons un raisonnement par analogie. Les instabilités d'un système peuvent le détruire si on ne comprend pas comment il fonctionne. Ce B.A.BA decoule directement de l'étude de
$$ y''+y=\sin(\omega t)
$$
ou, si l'on veut du concret, de la contemplation des derniers instants du Pont de Tacoma.

Or, les phénomènes financiers actuels sont le signe que ce système a changé de mode de fonctionnement entre 2000 et 2020 et qu'il semble devoir changer au moins aussi vite dans les 20 ans qui viennent.

Comme personne ne comprend comment fonctionne le système économique, c'est vraiment difficile de faire des prédictions la-dessus.

Quand je dis que personne ne comprend, Jeffrey pourrait me dire que je prends mon cas pour une généralité, mais je ne le crois pas.

On n'a, selon moi, aucune connaissance de comment s'agregent les comportements microéconomiques. On a seulement des theories heuristiques incomplètes et très loin d'être appuyées par des réalités expérimentales. C'est comme si en physique on avait la mécanique du point et la thermodynamique mais pas la physique statistique et que l'électro-magnetisme restait chose obscure. L'erreur de base chez Marx est qu'il croyait avoir compris comment le système économique capitaliste fonctionnait alors qu'il n'a correctement rendu compte que d'une partie de son fonctionnement dans une époque donnée qui était située dans le passé et le présent.
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Re: Les taux négatifs !

#612 Message par alexlyon » 11 juil. 2021, 09:48

Il faut que ça pourrisse pour que ça refleurisse.
Ce qui ne veut surtout pas dire que quand cela pourrit, cela va automatiquement refleurir.

Il faut aussi un nouvel ordre dominant, de substitution.
Et tant qu'il n'est pas encore formalisé avec conscience de lui même, il ne se passe rien d'autre que du pourrissement, très durable, de l'ordre ancien.

Concrètement, la société japonaise très traditionaliste et immobiliste le démontre.
On peut imaginer 100 ans avec un capitalisme mondial qui prend la voie japonaise (c'est juste plus calmement accepté au Japon conservateur).

Dans un monétarisme dévoyé, les plus-values se substituent aux revenus, et l'important c'est de bien naître (pour bien être).

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Re: Les taux négatifs !

#613 Message par crispus » 11 juil. 2021, 11:10

ProfGrincheux a écrit :
11 juil. 2021, 09:25
Je pense que l'entreprise de Lénine n'a marché que parce que le pouvoir en place s'est brusquement effondré.
Et aussi parce qu'il a été très largement financé, mais ça met à mal la légende de soulèvement "populaire". :lol:

Je tiens ce conseil d'un militaire : :mrgreen:
Le jour où ce sera le chaos et qu'on te remettra un fusil, n'oublie pas de descendre tout d'abord celui qui l'a financé.

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Re: Les taux négatifs !

#614 Message par Qqun_de_Passage » 11 juil. 2021, 16:58

alexlyon a écrit :
11 juil. 2021, 09:48
Il faut que ça pourrisse pour que ça refleurisse.
Ce qui ne veut surtout pas dire que quand cela pourrit, cela va automatiquement refleurir.

Il faut aussi un nouvel ordre dominant, de substitution.
Et tant qu'il n'est pas encore formalisé avec conscience de lui même, il ne se passe rien d'autre que du pourrissement, très durable, de l'ordre ancien.

Concrètement, la société japonaise très traditionaliste et immobiliste le démontre.
On peut imaginer 100 ans avec un capitalisme mondial qui prend la voie japonaise (c'est juste plus calmement accepté au Japon conservateur).

Dans un monétarisme dévoyé, les plus-values se substituent aux revenus, et l'important c'est de bien naître (pour bien être).
+ 1000 pour le scenario plan-plan à la japonaise !
D’autant plus que la jeunesse peut bien faire la gueule, ils sont plus en plus minoritaires (rien à voir avec la situation en mai 68) :

https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381472

Et puis faut voir ce qu’il y a dedans (cf wiki sur la natalité française et son évolution depuis les années 90 - j’en dis pas plus).
En faible nombre et divisée, donc aucun risque de révolte.

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Re: Les taux négatifs !

#615 Message par neron » 11 juil. 2021, 17:48

C'est surprenant, on bouffe comme des porcs et on râle. En effet si le peuple a besoin de pain (le matériel: maison, bouffe, etc. ), il a aussi , comme dit avant, besoin de jeux (de nourriture, d'occupation de l'esprit donc de sens (valeurs partagées pour faire société, de règles du jeux sécurantes, ..).

Le pb. de Marx, c'est qu'il a pensé dans le cadre économique, ( bien matériel, capitalisme, industrie, argent) et a oublié par exemple la psyché de gens et les règles du politique (Amha, sa culture familiale l'a peut instruit sur les contingences du pouvoir souverain, de la violence. de l'irrationalité) De plus le marxisme s'est développé dans un pays difficile (pauvre en potentiel aisé) et de culture arriérée (agricole, servage,.bondieuseries, grands espaces) axée sur l'autorité et la légitimité de sa violence (territoire+climat+histoire --> Jeux des acteurs ---> culture).Les autocrates ont donc réussit à éliminer les démocrates aux supports pas suffisant du faut de résultats pas assez rapide et de la guerre. Quand on y regarde, le capitalisme de 1920, c'est transmute en 2016 en marxiste. Il n'a pas pensé en dehors du cadre de la réalité du moment donc imaginer la société, de consommation, de surconsommation, du loisir, du bidon où tous on a tout sans efforts. L'erreur du communisme est de croire que la culture (le sens partagé d'une société,), peut se décider ex-nihilo suivant un idéal et être imposé aux individus en niant l'individu comme moteur de la culture. L'homme n'est pas un objet de la société. La société est son objet. L'homme nouveau est un mythe La société nouvelle non. Pas étonnant que la mixité culturelle, la perte des repères géographiques, climatique et historique du à la concentration urbaine post 45 ait engendré une a-culturisation et donc une société nihiliste (en manque de sens) , où les "individus" sont prêt à endosser les idéologies ou religions de passage (comme déjà les ouvriers en 1918, que les immigrés se recentre sur les leurs par défaut) et qu'on assiste à une massification, abetisation, standardisation (pensée unique), de plus bien plus facile à gérer mais qui crée (dans nos cultures) de la frustration, de la colère, et donc de la violence antagoniste au système et qu'il faudra réprimer '

Je ne vais pas refaire mon post sur la psycho-histoire (modèle stochastique, interdependance temporal et causal et ses limites), sur l'analyse systémique (matricielle et causal dixit linéaire), sur les domaines à appréhender et modéliser (fin, psy, socio, eco, legal, pol, com indus, ), sur les challenges et prospectives à imaginer comme ma société neronienne Je vs laisse faire de l'archéologie sur la bulle.

Mais oui alexlyon amah, pour qu'un système (sociétal) change faut qu'il pourrisse de l'intérieur afin de disparaître qcar c'est le jeux des acteurs qu'il faut changer donc la culture (les valeurs) à laquelle les pouvoirs en place et ses clients ne peuvent que s'accrocher. Là aussi je ne vais pas refaire la file sur le changement.

Rien ne vous prouve que Louis XVI ( voir XV) n'a pas été moteur de la révolution inclus sa mort comme tout bon monarque éclairé qui se respecte. C'était le trend imaginable de l'histoire (Zeemour dit le peuple c'est émancipé) mais qu'après ça a divergé plus à cause des anglais que de Robespierre. Côté Russie, Idem, le Tsar était pro-reformes (n'aimait pas-t-il Paris offrant un pont, achetant avant l'heure des tableaux impressionnistes et cubistes, ) pour prendre le train de la révolution industrielle, du transport, de l'éducation et leur modernité, avec une middle classe, des manufactures, un capitalisme (finance) qui se développaient bien aux marches mais politiquement encore trop fragiles pour s'imposer face à une aristocratie, des religieux et une culture de l'autorité et des pouvoirs locaux. On verra si la Chine, en fait sa culture, ses structures arriveront à absorber cette modernité. Je doute car elle est faite par et pour la culture américaine individualiste et liberale bien cette modernité se transforme de plus en plus en un système liberticide, repressif, totalitaire et féodal chez nous. Comme si la modernité du progressisme convergeait chez nous vers un modèle chinois, c'est à dire la destruction de notre plus grande richesse et force: notre culture individualiste et liberale . Mais ça aussi on en a déjà parlé.
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Re: Les taux négatifs !

#616 Message par slash33 » 13 sept. 2021, 07:02

Incursion sur le 0 à nouveau, sans à coup particulier. Nombreuses anticipations que l'OAT repassera définitivement positive prochainement. Affaire à suivre.

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Re: Les taux négatifs !

#617 Message par lecriminel » 13 sept. 2021, 10:19

existe-t-il parmi les théories économiques existantes étudiant un marché libre un chapitre ou une hypothèse de possibilité de taux négatifs ?
Le résultats objectifs chez nous : 90% de la population éligible vaccinée en un an. Si on était resté à la chloroquine on serait tous mort. Mais ca doit être un détail.

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Re: Les taux négatifs !

#618 Message par ProfGrincheux » 13 sept. 2021, 11:17

Je ne suis pas assez savant pour répondre. C’est une question d’économie monétaire, ou financière, me semble-t’il. Je ne vois pas de problème dans la théorie (ce que ça donnerait en pratique est une autre paire de manches!).

Du peu que je connaisse, ça donnerait des trucs bizarres en gestion des entreprises si on utilisait des taux d’actualisation négatifs dans les modèles de calcul de la rentabilité d’un investissement ou dans les modèles les plus simples de valorisation des actifs.
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Re: Les taux négatifs !

#619 Message par slash33 » 13 sept. 2021, 12:24

Bonne question. Je ne pense pas que c'eut existé avant l'apparition du phénomène car amha on ne peut conceptualiser que ce qu'on connaît de son propre environnement.

Par contre, une fois que le concept est devenu réalité, on trouve des écrits assez détaillés sur la théorie comme ici:

Taux d’intérêt négatifs et stagnation séculaire : politique monétaire ou choix sociétal ?
CEPII 02/2016
http://www.cepii.fr/PDF_PUB/panorama/pa2016-01.pdf

ou là:

CAUSES ET CONSÉQUENCES DES TAUX D’INTÉRÊT NÉGATIFS
Revue de l’OFCE, 148 (02/2016)
https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/doc ... 16/es1.pdf

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Re: Les taux négatifs !

#620 Message par neron » 13 sept. 2021, 14:33

slash33 a écrit :
13 sept. 2021, 12:24
Bonne question. Je ne pense pas que c'eut existé avant l'apparition du phénomène
Ce ne sont pas les etudes qui manquent avant 2000, sauf qu'avant l'NIRP était ni une politique monétaire nécessaire (a) ni faisable.(b), ni envisageable (doxia Keynésienne).

Plus grave amha, serait de croire que c'est un phénomène (effet non-volontaire) alors que c'est une politique (cad volontaire) (c)


-----------------
Ainsi amah pour faire court par exemple
(a) Son objet actuel est d'éviter l'inflation importée par le rappatriement des monnaies de réserves dans leur pays d'origine consécutif au plan Marshall suite à la chute des Comintern consistant à produire des billets ( agrégats*2). Ce rappatriement qui induirait une crise comme en 1920 ( une récession mondiale, inflation des actifs, perte de rendement, crise obligataire). Les "tx <0 + planche" évitent l'assèchement en monnaies de ces pays et une crise chez nous
(b) Avant 1960, les politiques monétaires n'etaitent pas aussi efficaces (Peu avait des comptes, les ratio M3 /M0 ou M3/PIB etait faible), et des tw négatif difficile a mettre en place car la plupart des actifs monétaire etait anonyme (échanges in-taxable) et physique (or, monnaie, actions, bons) et non dématérialisée. L'etat avant les NTIC avait bq moins d'emprise sur l'économie et les gens.Il régulait l'économie mais ne la contrôlait totalement comme ds nos pays devenu tota progressistes
c) Dixit les théories monétaire, l'etat est libre de fixer au moins 2 de ces 3 variables tx, agrégat et change
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Re: Les taux négatifs !

#621 Message par lecriminel » 13 sept. 2021, 18:42

slash33 a écrit :
13 sept. 2021, 12:24
Bonne question. Je ne pense pas que c'eut existé avant l'apparition du phénomène car amha on ne peut conceptualiser que ce qu'on connaît de son propre environnement.
j'en conclus que c'est la 1e fois que les taux sont négatifs, ce qui ne me surprend pas, je me demande même si les taux d'emprunt ne sont pas le moteur original de l'inflation.
merci pour tes liens intéressants.
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Re: Les taux négatifs !

#622 Message par wasabi » 13 sept. 2021, 20:42

lecriminel a écrit :
13 sept. 2021, 18:42
slash33 a écrit :
13 sept. 2021, 12:24
Bonne question. Je ne pense pas que c'eut existé avant l'apparition du phénomène car amha on ne peut conceptualiser que ce qu'on connaît de son propre environnement.
j'en conclus que c'est la 1e fois que les taux sont négatifs, ce qui ne me surprend pas, je me demande même si les taux d'emprunt ne sont pas le moteur original de l'inflation.
merci pour tes liens intéressants.
il me semble que dans les années 70 à la suite du choc pétrolier, et de l'afflux de capitaux étrangers qui allaient déstabiliser l'économie locale à cause du taux de change, les taux de la banque centrale suisse étaient devenus négatifs.
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Re: Les taux négatifs !

#623 Message par ProfGrincheux » 13 sept. 2021, 23:06

lecriminel a écrit :
13 sept. 2021, 18:42
slash33 a écrit :
13 sept. 2021, 12:24
Bonne question. Je ne pense pas que c'eut existé avant l'apparition du phénomène car amha on ne peut conceptualiser que ce qu'on connaît de son propre environnement.
j'en conclus que c'est la 1e fois que les taux sont négatifs, ce qui ne me surprend pas, je me demande même si les taux d'emprunt ne sont pas le moteur original de l'inflation.
merci pour tes liens intéressants.
En quelque sorte, il n’y a pas de recul sur l’effet économique de la politique monétaire des taux négatifs.
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Re: Les taux négatifs !

#624 Message par neron » 14 sept. 2021, 00:13

Merci ,oui la Suisse avait connu des taux négatifs.

Là il s'agit de la monnaie de réserve du Monde qu'empilent les chinois en refusant de monter le Yuan.
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Re: Les taux négatifs !

#625 Message par ProfGrincheux » 14 sept. 2021, 06:40

Le taux négatif à la Suisse ressemble à un impôt sur les entrées de capitaux. C’est pas tout à fait ce qu’on connaît aujourd’hui.
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Re: Les taux négatifs !

#626 Message par slash33 » 11 oct. 2021, 07:52

0.2 touchés à nouveau, en forte hausse ce jour.

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Re: Les taux négatifs !

#627 Message par slash33 » 12 oct. 2021, 18:40

ça monte toujours et pas de pull back en vue. A voir si on va dépasser les 0.26 de mai et redescendre ou si cette fois-ci on dit adieu aux taux négatifs: 0,241.

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Re: Les taux négatifs !

#628 Message par slash33 » 15 oct. 2021, 11:22

Finalement en fort retrait mais toujours dans le positif.

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Re: Les taux négatifs !

#629 Message par Korn » 15 oct. 2021, 12:46

Il faut pas regarder jour par jour. Il suffit de se placer sur le graphique 3 mois ou 6 mois pour observer qu'on est sur tendance haussière

https://fr.investing.com/rates-bonds/fr ... bond-yield

Je pense qu'il faudrait retourner en-dessous de 0 pour invalider cette tendance.

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Re: Les taux négatifs !

#630 Message par neron » 15 oct. 2021, 13:44

Un peu HS mais la Chine est sur le 1 an à 3,85 % et le 5 ans à 4,65 % pour une parité yuan/euro presque stable. Soit un doublement de vos fonds (et de la dette) en 12 / 15 ans.

ImageJ'ai pas le temps de comparer les hausses de masse monétaire Us / Eu / Chine mais la leur est plus naturelle (tx. de croissance), la notre plus exogène (parité, pseudo relance QE, à croissance en volume de pib nul)
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Re: Les taux négatifs !

#631 Message par Korn » 19 oct. 2021, 15:19

0.24 en ce moment même.

Toujours haussier :arrow:
Adios les taux négatifs?

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Re: Les taux négatifs !

#632 Message par Korn » 29 oct. 2021, 14:48

0.30 touchés +50%

Les taux remontent bel et bien.

https://fr.investing.com/rates-bonds/fr ... bond-yield

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Re: Les taux négatifs !

#633 Message par slash33 » 30 oct. 2021, 00:33

Oui et non. Il y a une résistance vers 0.3 et ça rebondit systématiquement à la baisse, comme ici encore.

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Re: Les taux négatifs !

#634 Message par pangloss » 30 oct. 2021, 04:26

Comme si on pouvait penser encore qu'il s'agit d'une variable autonome !... :lol: :mrgreen:
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Re: Les taux négatifs !

#635 Message par optimus maximus » 30 oct. 2021, 09:43

Avec 2,5% à 3% d'inflation, vous pensez vraiment que les taux vont rester bloqués à zéro longtemps ? Et est-ce que ça serait souhaitable ?

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Re: Les taux négatifs !

#636 Message par Pi-r2 » 30 oct. 2021, 10:34

Comme je le dis dans la file inflation, le 2.6% d'octobre d'IPC en France contient 1.5% d'énergie. Donc on est à 1.1% d'IPC hors énergie.
Et l'énergie n'a fait que revenir à son niveau d'avant crise, en gros. Certes très brutalement, mais sans trop dépasser jusque là.
Les bonnes idées triomphent toujours. D'ailleurs c'est à cela qu'on reconnait qu'elles étaient bonnes.
mon statut de modérateur ne m'interdit pas de participer aux discussions. Je ne modère pas les discussions auxquelles je participe.

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Re: Les taux négatifs !

#637 Message par slash33 » 01 nov. 2021, 10:13

Retour arrière sur la journée du 29/10. Pic atteint à 0.305 puis pull back dans la foulée. On est revenu sur un niveau à 0.26 pour l'instant. La pression à la hausse reste forte. On a globalement gagné et conservé 0.3 depuis le plus bas.

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Re: Les taux négatifs !

#638 Message par slash33 » 02 nov. 2021, 19:34

Hop retour forcé à la cave: 0,18.

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Re: Les taux négatifs !

#639 Message par slash33 » 05 nov. 2021, 19:38

L'effondrement est impressionnant. On a presque retrouvé le 0. 0,055 actuellement.

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Re: Les taux négatifs !

#640 Message par slash33 » 19 nov. 2021, 13:57

ça y est l'OAT 10 vient de rejoindre le 0 encore une fois. Ce fut quelque peu rapide. L'OAT est tellement vendue que son appréciation sur plusieurs indicateurs, dont le RSI, est passée à survendu.

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Re: Les taux négatifs !

#641 Message par slash33 » 09 janv. 2022, 10:08

On est reparti pour tester les 0.3 sur l'OAT 10 ans. Si ça passe au delà ce sera le signal que ça va monter plus haut dorénavant.

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Re: Les taux négatifs !

#642 Message par slash33 » 17 janv. 2022, 18:51

Les deux derniers pays à bénéficier d'un taux à 10 ans (très faiblement négatif) sont sur le point de voir cette exception finir dans le sillage des autres pays. Peut-être un jour à marquer d'une pierre blanche, vas savoir. 8)

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Re: Les taux négatifs !

#643 Message par pangloss » 17 janv. 2022, 22:19

La question (la seule) est : une remontée des taux est-elle tenable pour les grands pays endettés ?
Si elle ne l'est pas et donc risque de faire s'effondrer la montagne de promesses sur laquelle nous sommes tous assis, la banque centrale reprendra ses rachats jusqu'à ce qu'ils redescendent.
TINA... :mrgreen:
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Re: Les taux négatifs !

#644 Message par Ben92 » 17 janv. 2022, 23:42

pangloss a écrit :
17 janv. 2022, 22:19
La question (la seule) est : une remontée des taux est-elle tenable pour les grands pays endettés ?
Si elle ne l'est pas et donc risque de faire s'effondrer la montagne de promesses sur laquelle nous sommes tous assis, la banque centrale reprendra ses rachats jusqu'à ce qu'ils redescendent.
TINA... :mrgreen:
Non elle ne l'est pas, et surtout pas pour la Farnce. Pas besoin d'être grand clerc pour le comprendre.
Pendant au moins deux ans (difficile de prédire au-delà) on aura des taux d'emprunt d'état à 10 ans à ~ 0% et en même temps une inflation à 3-5%. C'est aberrant, Olaf va râler, mais c'est comme ça.

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Re: Les taux négatifs !

#645 Message par slash33 » 17 janv. 2022, 23:51

Aucune chance. L'essentiel des autres économies, dont l'Italie pour la plus proche de nous, est revenu sur un trend de bonds à 10 ans autour de 2%. Par contre, les taux à court terme sont encore incroyablement avantageux (-0.6 sur la dernière adjudication à 3, 6 et 12 mois)

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Re: Les taux négatifs !

#646 Message par Ben92 » 17 janv. 2022, 23:56

slash33 a écrit :
17 janv. 2022, 23:51
Aucune chance. L'essentiel des autres économies, dont l'Italie pour la plus proche de nous, est revenu sur un trend de bonds à 10 ans autour de 2%. Par contre, les taux à court terme sont encore incroyablement avantageux (-0.6 sur la dernière adjudication à 3, 6 et 12 mois)
Oui, et même -0.3 sur 5 ans. Sur 10 ans, on est à 0.3. L'Italie a toujours eu des taux des bien dégueu par rapport à la France et je vois pas pourquoi ça changerait.

jobserve75
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Re: Les taux négatifs !

#647 Message par jobserve75 » 18 janv. 2022, 00:01

Le taux de l’OAT doit surtout être apprécié par rapport à l’inflation.
Le contexte monétaire montre que partout en Europe et surtout aux Etats-Unis, les taux d’intérêt réels (déduction faite de l’inflation) sont bien ancré en territoire négatif.
A part une ou deux années dans les années 70, cela ne s’était jamais produit.
Aux USA, le taux réel est de -5,5%
En Allemagne, le taux réel est de -4%
En France, il est de -2,5%
En Italie, il est de -1%

La hiérarchie reste respectée et surtout, les taux réels n’ont jamais été aussi bas alimentant encore plus le contexte de bulle.

Il suffit de voir certains ici sur ce forum souhaitant emprunter pour investir dans des SCPI par exemple.

Après, c’est peut-être un peu facile de ma part de dire cela maintenant mais ce scénario était cousu de fils blancs.
Seule une inflation élevée combinée à des taux maîtrisés permettront d’éponger les énormes dettes publiques accumulées.
Cela génèrera plus d’inégalités mais politiquement, c’est la seule solution tenable.

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Re: Les taux négatifs !

#648 Message par Korn » 18 janv. 2022, 10:58

pangloss a écrit :
17 janv. 2022, 22:19
La question (la seule) est : une remontée des taux est-elle tenable pour les grands pays endettés ?
C'est quoi une remontée des taux? OAT à 0,5%, 1%, 2%, 3, 4%? Sur quel timing?

Graphiquement, sur long terme, le trend est très clair. Lente Remontée des taux enclenchée.

https://fr.investing.com/rates-bonds/fr ... bond-yield
Modifié en dernier par Korn le 18 janv. 2022, 11:11, modifié 1 fois.

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Re: Les taux négatifs !

#649 Message par Korn » 18 janv. 2022, 10:59

Ben92 a écrit :
17 janv. 2022, 23:42
Non elle ne l'est pas, et surtout pas pour la Farnce. Pas besoin d'être grand clerc pour le comprendre.
Pendant au moins deux ans (difficile de prédire au-delà) on aura des taux d'emprunt d'état à 10 ans à ~ 0% et en même temps une inflation à 3-5%. C'est aberrant, Olaf va râler, mais c'est comme ça.
En attendant, le support à 0.30% est en train de voler.
Le prix du pétrole augmente encore et ce ne sont pas tes chèques à 100€ qui vont calmer la moitié des français. Sans compter que cette inflation (trop rapide) explose également à la gueule des entreprises (l'autre moitié des français?).
Je pense que tu peux enterrer tes taux négatifs et tes chèques à 100€.

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Re: Les taux négatifs !

#650 Message par Ben92 » 18 janv. 2022, 11:18

Korn a écrit :
18 janv. 2022, 10:58
C'est quoi une remontée des taux? OAT à 0,5%, 1%, 2%, 3, 4%? Sur quel timing?
Graphiquement, sur long terme, le trend est très clair. Lente Remontée des taux enclenchée.
Comme le dit jobserve75, c'et le taux réel qui est important : corrigé de l'inflation.
Et sur les taux réel le trend est aussi très clair : ça baisse.

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