supercastor a écrit :
Ceci-dit rien ne nous dit que nous n'avons pas les moyens de mobiliser d'autres ressources : le pétrole n'était qu'une curiosité géologique avant de devenir le coeur de notre économie.
On fête cette année le 40ème anniversaire du premier choc pétrolier. Que peut-on en tirer? Je parle pour la France, ailleurs je ne connais pas assez.
Le scénario à la Mad Max ne s'est pas réalisé.
Les premières reglementations visant à réduire la consommation énergétique sont arrivées en 1973/74, à chaud donc, mais avant, c'était le néant. Tiens, un petit extrait de la loi du 29 octobre 1974 relative aux économies d'énergie pour se mettre dans le bain de l'époque :
En vue de remédier à la pénurie énergétique y compris localisée ou à une menace sur l'équilibre des échanges extérieurs, le Gouvernement peut, par décret en conseil des ministres, et pour une période déterminée, soumettre à contrôle et répartition, en tout ou en partie, les ressources en énergie et en produits énergétiques de toute nature, ainsi que les produits pétroliers, même à usage non énergétique, et les produits dérivés ou substituables y compris les produits chimiques.
Il peut également, dans les mêmes conditions, interdire toute publicité ou toute campagne d'information commerciale relative à ces produits ou à leurs conditions d'utilisation.
Les clause techniques qui suivent nous paraissent maintenant être du simple bon sens. Ce furent les premières contraintes sur les règles de construction et d'exploitation énergétiques des bâtiments. Il faut entendre par là qu'avant il était possible de faire
n'importe quoi, comme concevoir des bâtiments avec des radiateurs sur les balcons ou chauffage des parkings (ça s'est vu...) sans parler des façades full simple vitrage. C'est dire si l'énergie était abondante, avant. Je n'ai pas connu cette période, mais c'est avec des détails de ce genre que je me rends compte que nous vivons dans
un monde d'après.
Le crise de 73 a en outre impulsé les premières réalisations de centrales d'énergie "alternatives". En France la première génération de centrales géothermiques date des 80's. Puis avec la détente des cours du pétrole (et aussi quelques pépins de mise au point...) la technique est tombée en désuétude dans les 90's pour revenir à la mode dans le courant des 00's. Si on avait un doute quant au fait que les choses n'avancent que sous la pression... D'ailleurs, dans le domaine architectural, la grande mode qu'on pourrait circonscrire des années 80 au début des années 2000 qui consiste à décliner sous toutes les formes possibles les tours en verre (la Défense, la bibliothèque François Mitterrand) n'a été rendue possible que grâce à cette détente des cours amha.
Enfin, depuis 40 ans, et malgré toutes les recherches entreprises, LA source d'énergie qui viendrait remplacer le pétrole se fait toujours attendre. Le nucléaire présente quelques "menus" défauts (risque, déchets, coût du démantelement, pas relancer le débat please), le gaz ferait bien un bon candidat mais il est amené lui aussi à s'épuiser. Il est toujours permis d'espérer cette pierre philosophale de l'énergie de la vie et de l'univers, et il faut même continuer à mener des recherches en ce sens sans quoi les regrets seront amers si d'aventure les scénarios malthusiens se réalisent.
On parle beaucoup d'énergies renouvelables, mais dans les faits, au regard des quantités consommées, elles représentent à ce jour peau de chagrin. A titre d'illustration, la première source renouvelable dans le mix électrique français est l'hydraulique (barrages) qui représente une dizaine de %. Sauf que c'est la plus anciennne technologie de production existante et qu'il y a peu d'augmentation de production à attendre de ce coté là. Les autres ENR&R : 3-4%. Oui, cette production est amenée à augmenter mais c'est leeeeeeeennnnttttt et sans certitude sur la capacité à baculer de façon
significative une partie de la production actuelle sur ces technologies. Un calcul des ordres de grandeurs des principales sources d'ENR disponibles (éolien, solaire, géothermique de mémoire) avait été fait par un chercheur de mon école, montrant que sur le territoire français seul le solaire était disponible en quantités comparables aux besoins totaux. Les
bio agrocarburants? Ah oui, euh...prout. Pardon mais dans le greewashing lobbyiste on a rarement fait pire.
Le gaz conventionnel, les gaz de schistes et autres paliatifs comme le charbon ne servent qu'à acheter du temps. Combien? Une partie de la question est là. Sans modification drastique de nos modes de vie et de société, la prochaine crise majeure, celle qui vous fait craindre une coupure de l'alimentation comme en 73 ne devrait arriver que dans mettons...allez soyons optimistes, plusieurs décénnies. C'est beaucoup et peu à la fois. Beaucoup pour nous laisser le temps de nous adapter, peu au regard des conséquences potentielles d'une pénurie sur une société mal préparée.
Alors sachant que les découvertes et avancées technologiques majeures tombent souvent là où on ne les attend pas, je suis d'avis de réduire progressivement nos consommations en attendant cette source intarrissable, et je rejoins par là la maxime de l'énergie la moins chère est celle qui n'est pas consommée. Mais on a du temps. Mais il faut anticiper. Vous voyez, on peut prôner la modération énergétique sans être catastrophiste.
On verra.