Le défaut de paiement
George Bernard Shaw a écrit :Une banque vous prête un parapluie quand il fait beau et vous le reprend quand il pleut.
c'est une option que l'on a vraiment pas envie d'envisager lorsqu'on se prépare à emprunter pour de longues années, et pourtant... Qui peut se croire à l'abri ?
il faut dissocier cessation et défaut de paiement : dans un cas l'emprunteur ne peut plus rembourser du tout (surendettement), dans l'autre il peut encore... mais devra le faire dans la douleur.
L'assurance décès-invalidité... et ses limites
L'assurance imposée par la banque ne couvre généralement que le Décès et l'Invalidité (ADI), et encore ce ne peut être que partiel (ex: 50% du CRD), par exemple en cas de co-emprunteurs le survivant continuera à payer sa part en étant exempté de payer celle du défunt. Par contre il aura à faire face à des frais supplémentaires (ex: temps partiel pour s'occuper seul des enfants...);
L'ADI peut invoquer une exclusion (ex: suicide) ou encore un mensonge ou une omission de la part du souscripteur (ex: fumeur non-déclaré) pour refuser de payer. Rappelons que l'assurance perte de revenus optionnelle quant à elle, ne couvre qu'un nombre restreint de mensualités.
Si un décès est facile à constater - et encore, si le corps n'est pas retrouvé l'avis de décès peut demander 20 ans ! - l'invalidité ne s'apprécie pas de la même façon pour l'assurance maladie et l'assureur du prêt. Ainsi la CPAM peut vous déclarer invalide à 100% mais l'assureur ne vous accorder que 20%. Dans ce cas il refusera de payer vos traites, au motif que le taux d'invalidité est inférieur au seuil fixé dans les conditions générales !
Les conséquences d'un impayé
Lorsque l'emprunteur n'est pas en mesure de payer sa mensualité, on pourrait penser que ce n'est pas si grave : si l'emprunteur est de bonne foi, pourquoi la banque n'attend-elle pas un peu qu'il "revienne à meilleure fortune" en suspendant le déroulement du crédit ?
La banque ne l'entend pas de cette oreille, car elle doit pendant ce temps rembourser rubis sur l'ongle son propre emprunt, émis auprès de la banque centrale pour fournir le capital initial à l'emprunteur. Et doit pour cela puiser dans ses fonds propres (ex : les dépôts de ses clients).
Le capital qui aurait du être remboursé reste bien sûr dû, mais plus gênant,
la totalité de la mensualité non-versée s'ajoute au Capital Restant Dû.
On dt que la mensualité (principal + intérêt) est
capitalisée.
Chaque mensualité non-payée a donc pour conséquence de faire gonfler CRD, et par voie de conséquence (cf. le tableau d'amortissement), la part des intérêts dans les futures mensualités.
Nous avons vu qu'à mensualité égale,
la durée de remboursement augmente exponentiellement avec le capital emprunté.
Pour un emprunt souscrit à un taux élevé ou sur une longue durée - on a vu que cela revient au même pour les intérêts -
il faudra à l'emprunteur verser plusieurs mensualités supplémentaires pour "rattraper" une seule mensualité manquante !
A chaque échéance impayée, le banquier va donc établir un nouvel échéancier, plus long, et où le nouveau CRD se trouve plus élevé que le mois précédent. 
Il n'est pas impossible qu'au bout de seulement quelques impayés, la banque n'oblige l'emprunteur en difficulté à vendre, tant qu'il n'est pas en
negative equity (i.e. tant que la vente de son bien couvre encore le CRD). Si le client s'obstine à conserver son bien, ou pire ne trouve pas d'acheteur, la faillite personnelle n'est pas loin !
Exemple :
J'ai connu en 1995 un fonctionnaire "dépouillé" de sa maison malgré un apport initial conséquent
La "recette" : une longue maladie indemnisée à seulement 50%, suivie d'un reclassement plus loin, pour raison de santé, à un salaire inférieur. Il ne pouvait plus financer ses mensualités. Ses 10 ans de remboursements l'ont finalement été "à fonds perdus", car la vente en urgence du bien n'a couvert ses dettes que de justesse. Ce qui s'appelle jeter son argent par ses fenêtres.
Quelques prêts particuliers
Certains prêts "exotiques" évoquent comme un doux parfum de Cayenne

la Porsche du même nom pour le prêteur... et le célèbre bagne pour l'emprunteur
Le prêt in fine
Son nom latin rime avec
infini 
car c'est un prêt dont le capital restant du est constant tout au long du crédit.
L'emprunteur reçoit un capital et verse chaque mois une somme fixe correspondant aux intérêts mensuels de ce capital. A l'issue du prêt, il rembourse en une fois l'intégralité de ce capital.
Ce montage suppose que l'emprunteur dispose déjà de ce capital à l'origine, sous forme d'avoirs monétaires ou physiques : épargne bancaire ou boursière, métaux précieux, bien immobilier...
Le risque pour la banque étant quasi-nul, et le profit maximum (intérêts constants et non dégressifs) elle peut proposer en retour un taux plus faible. En retour l'emprunteur peut dans certains cas déduire les intérêts de ses revenus - une niche fiscale de plus. :
L'emprunteur est censé retirer de ce capital emprunté un rendement supérieur au taux auquel il a emprunté sous forme de plus-value boursière, immobilière... Au final cet emprunt lui permet de doubler son capital avec un taux d'effort très faible.
Sauf si... son « capital » ne s'est pas valorisé suffisamment pour compenser les intérêts versés à la banque (moins-value). Par exemple en cas de retournement du marché immobilier, boursier...
Pour plus de détails, voir
par exemple ici.
Le crédit-relais
C'est une forme de crédit
in fine où l'emprunteur se voit prêter une somme qui lui sert d'apport pour l'achat d'un nouveau bien immobilier, alors qu' il n'a pas encore vendu l'ancien.
Par sécurité la banque demande à un agent immobilier d'estimer le bien en gage, et prête une fraction de ce montant, par exemple 80% de l'estimation.
L'emprunteur dispose alors d'un délai pour vendre ce bien (souvent de 1 à 2 ans), qui lui permettra ensuite de solder le crédit relais. En attendant il paie uniquement les intérêts sur cette somme, sans amortir de capital. La banque ayant le bien à vendre comme garantie, propose en principe un taux bas pour ce genre d'opération, vu que le risque pour elle est quasi-nul.
En période haussière, cette technique est doublement gagnante.
Exemple : admettons que l'immobilier se valorise en moyenne de 1% par mois.
En janvier, le vendeur signe avec un acheteur un compromis de vente de son appartement pour un prix de 100 k€, avec l'intention d'acheter une maison affichée à 200 k€. Il faut attendre 3 mois pour signer l'acte définitif. En avril, lorsque le notaire lui remet son chèque de 100 k€, le bien convoité est à présent proposé à ~3% de plus, soit... 206 k€. De plus, il n'a plus de logement et doit donc trouver une location pour les 3 prochains mois, ne pouvant entrer dans la prochaine maison avant la signature définitive... Soit deux déménagements coup sur coup.
S'il opte pour le prêt relais, le vendeur peut signer dès janvier pour 200 k€, et a les clés de sa nouvelle maison dès avril, sans passer par la case location et en déménageant à son rythme, puisqu'il possède les 2 logements à la fois.
Et comme c'est un malin, il ne met pas son bien en vente à 100 k€ mais à 120 k€. Avec la hausse des prix, cette somme sera au bout d'un an ou deux rattrapée par le « prix du marché » et la vente lui apportera plus que ne coûtent les intérêts du prêt-relais à 3,5%
Mais si le marché se retourne, et que l'emprunteur ne trouve pas d'acheteur pour son premier bien avant l'échéance,l'effet de levier se transforme en effet massue : en effet la banque proposera au client de convertir son prêt relais en prêt classique, avec une mensualité bien supérieure destinée à rembourser du capital et non-plus seulement les intérêts. Mensualité qui s'ajoute à celle déjà versée pour le crédit complémentaire destiné à l'achat du 2ème bien !
Bien souvent l'emprunteur ne peut payer de telles sommes, qui peuvent représenter la totalité, voire plus, de ses revenus mensuels ! Au bout de quelques impayés (voir plus haut le
défaut de payement), la banque peut forcer ce propriétaire à vendre à prix cassé ses deux biens (seule façon de vendre très vite), pour effacer sa dette et retourner vivre en location... avec une épargne ramenée à zéro. Ou comment perdre sa maison en voulant en changer...
Vers 2007-2008, époque où les transactions transactions commençaient à se raréfier, nombreux sur ce forum pensaient que ces prêts-relais non-remboursés seraient bientôt le détonateur d'un krach immobilier : de nombreuses ventes contraintes par les banques auraient forcément fini par tirer les "prix du marché" par le bas.
Mais force est de constater que ces emprunteurs ont été particulièrement choyés par la justice, qui a obligé les banques à leur accorder un délai de paiement supplémentaire d'un an ou plus... souvent assorti d'un gel des intérêts, pour éviter que le CRD n'augmente chaque mois et rendre le remboursement problématique.
Une embellie en 2009-2010 a permis à une partie d'entre eux de vendre et de pouvoir rembourser la banque. Il est fort probable que d''autres n'aient pas eu cette chance, mais curieusement leur mésaventure est passée sous silence et je les imagine mal venant s'en vanter dans les journaux.
Vae victis !
Un conseiller bancaire en patrimoine m'a toutefois confié en off que plusieurs de ses clients avaient perdu de grosses sommes en 2007-2008 à cause de l'immobilier
Si la plupart des notaires interrogés ces dernières années conseillaient volontiers le recours au crédit-relais à leurs clients, ils sont aujourd'hui une minorité : signe que ces professionnels ne croient plus à la poursuite de la hausse, mais craignent au contraire un retournement du marché.
Le crédit renouvelable
Pour rester dans le discours « vert »

le crédit « renouvelable » pourrait aussi s'appeler crédit « durable », vu qu'il garantit à l'emprunteur de verser durablement des mensualités.
Appelé encore crédit
revolving, c'est une formule de crédit à la consommation, souvent proposée par des établissements partenaires d'une société de crédit (ex : grande surface).
On entend parfois parler de personnes surendettées, devant 20.000 € à tel organisme de crédit... Tout ça à cause d'un emprunt
revolverrevolving souscrit 5 ans plus tôt pour acheter un
home cinema ! Comment est-ce possible ?
Ils n'ont en fait jamais emprunté une telle somme, mais les "impayés" à taux usuraire (spécialité des organismes de crédit "facile" ) ont rapidement démultiplié le CRD, qui chaque mois grossit telle une boule de neige.
Le revolving constitue une véritable arnaque légale, qui relève de la petite délinquance bancaire et touche essentiellement les plus faibles revenus.
Tout commence le jour où un gentil vendeur vous propose
de se faire une commission facilede mettre votre disposition une "réserve d'argent", puis de vous prélever chaque mois une petite somme convenue, jusqu'à la reconstitution de cette "réserve" magique.
En fait la "réserve" se révèle rapidement un trou sans fond(s), par le biais de l'
amortissement négatif.
Compte des mille et un ennuis :
Soit une "réserve" de 5.000 €, "reconstituée" à raison de 30 € par mois, avec un taux mensuel particulièrement attractif de 1,5%. Des broutilles, quoi
Si vous utilisez en totalité cette "réserve" pour payer vos vacances, pour ces 5.000 € empruntés les intérêts le mois suivant s'élèvent à : 5.000 x 1,5% = 75 €.
La société prélève les 30 €, et ajoute les 45 € manquants au capital restant dû: le CRD passe à 5045 €.
...et c'est ainsi qu'au bout de 4 ans de remboursement fidèle des échéances, (soit 4 ans x 12 mois x 30 € = 1440 € versés), le CRD est devenu... 8 715,36

L'emprunteur pendant ce temps, dort sur ses deux oreilles puisqu'il a toujours payé, et s'il prend la peine de faire le calcul il pensera avoir remboursé environ 1/3 de la somme due (1440/5000), enfin à 1,5% près.
Mais voilà qu'un un jour, l'organisme de crédit envoie une lettre recommandée de "relance", où elle exige du client le remboursement immédiat de sa dette, y ajoutant une indemnité substantielle (ex: 30%

) pour "non-respect du contrat", qui fixe (en petites lettres grisées au verso

) un CRD maximum que le client s'est engagé à ne pas dépasser.
Le client se voit contraint de souscrire aussitôt un nouvel emprunt, avec de beaucoup plus fortes mensualités, destinées à rembourser effectivement l'argent.
Mais comme généralement les emprunteurs ont choisi cette formule pour cause de "petits" revenus, aucun banquier ne voudra leur prêter pour une telle somme.

Chaque mois qui suit, le CRD augmente à nouveau de 1,5% car la société ne prélève plus les 30 € habituels mais attend son capital bien mérité. Et ainsi de suite... Les appels de la société de recouvrement (filiale de la première) se font de plus en plus fréquents, insistants, voire carrément injurieux.
Pris à la gorge, la tentation est alors grande pour l'emprunteur de puiser dans une nouvelle "réserve" providentielle, mise à disposition par une société concurrente... ce qui lui vaudra de passer un beau jour au 20 h de TF1 dans la catégorie "drames de la vie ordinaire"

tandis que la société en cause se voit récompensée par la presse éco en raison de sa fulgurante expansion. Parallèlement cette société vampire multipliera les opérations de communication en faveur d'un monde plus "solidaire", plus "responsable", plus "vert", toussa... histoire de retrouver du sang neuf.
Par chance pour les emprunteurs, les taux directeurs n'ont cessé de baisser depuis 10 ans, baissant d'autant le taux usuraire au delà duquel la société est passible de poursuites. Ce qui a pour conséquence de donner une chance aux emprunteurs de véritablement "reconstituer leur réserve" (mensualité supérieure aux intérêts)
Le crédit à taux variable
Votre budget ne vous permet pas d'acheter le T2 de vos rêves au 12è sans ascenceur ? Pas de panique, le courtier vous a trouvé une formule alléchante : le taux variable ou
révisable.
Le prêteur vous propose un taux initial inférieur au taux fixe, mais ce taux sera actualisé à intervalles réguliers en fonction d'un indice fixé à l'avance : par exemple l'
euribor (taux « interbancaire »), le taux de change avec une monnaie autre que l'€uro (
cf. Dexia et le Franc suisse), le cours de
l'aluminium...
Cette formule peut se révéler intéressante lorsque les taux baissent. Certains souscripteurs peuvent se féliciter de l'avoir choisie au cours des années 2000, époque où la BCE n'a cessé de baisser son taux directeur. A présent que le taux est déjà historiquement faible, ce choix est très discutable puisque les perspectives de baisse sont au plus bas...
En règle générale, si le taux augmente, la mensualité en fait autant pour assurer le remboursement au terme prévu. Dans le cas d'un ménage déjà endetté à 33% cela peut signifier que la mensualité passe à 40, 50, 60% du revenu
initial ! C'est supportable uniquement si le salaire est actualisé en fonction de l'inflation. Les banques proposaient volontiers du taux variable dans les années 1970.
En principe les prêts proposés en France sont encadrés ou
capés : par exemple le taux ne peut ne peut varier de +/-1%. Le banquier donne alors au candidat un exemples d'échéancier dans chaque cas favorable et défavorable.
A noter que si le courtier insiste pour vous fourguerconseiller du taux variable ce peut être parce qu'il parie sur une prochaine hausse des taux. Dans le cas contraire il ne va pas se bousculer pour faire perdre de l'argent à sa boîte.
Exemple :
Un organisme de prêt pourtant réputé pour son sérieux, a eu l'idée géniale de proposer à ses clients un crédit-capé-pas-capé : la mensualité était plafonnée, mais pas le taux.
Une forte remontée des taux vers 2009 a transformé cette opération en crédit à amortissement négatif, le CRD augmentant chaque mois !
Certains emprunteurs ont porté plainte pour tromperie, et la justice leur a donné raison, imposant aux prêteurs de transformer ces prêts en crédit à taux fixe ! Le hic est qu'elle l'a fait en période de taux élevés, bien plus qu'à la date de souscription initiale. Au final ces emprunteurs auraient mieux fait de choisir un taux fixe dès le départ...
Le prêt à mensualités progressives
On l'a vu, les banques ayant prêté à taux fixe durant les 30 glorieuses ont parfois "perdu de l'argent", l'inflation étant supérieure au taux d'emprunt. Elles ont donc riposté en développant une offre de prêt à mi-chemin entre taux fixe et variable : la mensualité augmente au fil de temps, mais de façon planifiée, selon un échéancier fixé au départ. Une formule qui se rapproche d'un prêt un taux fixe et permet d'acheter avec de faibles revenus, en anticipant une substantielle augmentation à venir...
Elle ciblait principalement les jeunes ménages en début de carrière, pouvant tabler sur une promotion rapide :auparavant cette clientèle était exclue du marché et contrainte de se constituer patiemment un apport avant de pouvoir acheter un logement.
Cette formule, qui permettait de diminuer le montant des mensualités par rapport à un capital comparable emprunté à taux fixe, était jugée peu risquée car les perspectives de carrière étaient bonnes durant cette période. Mais après 1973 la donne a changé, et une partie des emprunteurs ont du tirer la langue pour payer les dernières mensualités, surtout arrivés dans les années 1980 !
Inutile d'ajouter qu'il est très hasardeux, en période de faible inflation et de chômage de masse, de se risquer dans un tel montage.
Quelles leçons en retirer ?
Emprunter c'est parier sur l'avenir, en particulier l'évolution de l'inflation et des taux d'intérêt bancaires A moins de disposer au départ d'un sérieux patrimoine et d'être prêt à encaisser des pertes, le plus raisonnable – surtout en période économiquement instable - reste d'emprunter à taux fixe, seul moyen de connaître dès le départ le montant des mensualités, le coût final du crédit, et le capital restant dû à la banque en cas de revente anticipée - voulue ou... contrainte !
