ET46 a écrit :franckyfranck a écrit :
il y a toujours un truc qu'on oublie: la misère dans les campagnes.
Bien supérieure à celle des zones HLM ( qui signifie Habitat à Loyer Modéré, on y est logé pour pas cher, pas que l'on vit entouré de cassos )
La dessus, effectivement il y a tant de gens qui vont à la cambrousse pour ne pas "être au millieu des wesh" et qui se retrouvent au millieux des pire "cassos".
Lisez Eddy Bellegeule : Malheureusement c'est un peu / beaucoup comme cela.
Je suggère, pour contrebalancer un petit peu ce jugement, la lecture de ce (long, 30 pages) article, il en vaut le coup, c'est réellement passionnant:
Quel éléphant irréfutable dans le magasin de porcelaine ? (Sur la gauche sociétale-libérale)
Par "Pièces et Main d'Oeuvre"
http://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip ... rticle=491
L'épitaphe de l'article parle de ce roman (fiction ou témoignage????), en citant une critique parue dans Libération
« Pour en finir vraiment avec Eddy Bellegueule.
Quasi unanime, la critique de En finir avec Eddy Bellegueule l’est. C’est vrai que ce livre donne bien à
voir la pauvreté crasseuse, homophobe et raciste, ce père scotché à la téloche et ces collégiens violents et
bêtes jusqu’à l’absurde, avec un souci des détails qui, souvent, donnent froid dans le dos. J’ai lu ce texte
d’une traite, et j’y ai entraperçu des bribes de ma vie d’homo et de fils de prolo. (…) Pourtant, malgré - ou
à cause - de cette proximité, En finir avec Eddy Bellegueule et la critique dithyrambique qui en est faite me
dérangent. (…) En décrivant un monde de bouseux incultes et violents, Edouard Louis dessine en creux
celui d’un univers bourgeois moderne et apaisé. Au sous-monde obscur de la plèbe répond dans cette
histoire le monde lumineux des dominants, urbains et éduqués, qui, entre autres choses, éditent les livres et
en écrivent les critiques. (…) Or, loin d’être subversif, le récit de cette success story réassure la domination
des codes et des symboles bourgeois, en nous (re)disant qu’ils sont ce vers quoi il faut tendre "pour s’en
sortir", et en (re)donnant l’illusion qu’ils sont accessibles à tous. (…) Il n’existe pas d’un côté les
banlieusards ou les ruraux pauvres forcément racistes et, l’autre, les urbains, bourgeois forcément
tolérants. Trop souvent, je constate le mépris pour le reste du monde de ceux qui disposent et qui savent.
(…) Le nombre d’enfants de chômeurs et d’ouvriers dans les grandes écoles et universités est indigent.
Parce que ceux qui ont le pouvoir n’ont aucune intention de le partager, ni d’en voir leurs valeurs
discutées par l’arrivée d’étrangers à leur caste. La "paix sociale" repose sur l’acceptation silencieuse
d’inégalités persistantes et croissantes. Loin de bousculer l’ordre établi, ce grand récit d’un parcours sans
faute, brillant, exceptionnel, participe à déculpabiliser les héritiers de ce système. En finir avec Eddy
Bellegueule est leur bonne conscience du moment. » (David Belliard, Libération, 2 mars 2014)
J'aime beaucoup les critiques de Libé.
à les lire, on en vient presque à souhaiter pour nos enfants habiter dans des coins où la population n'est pas formée, ou l'illetrisme est présent, et où la misère culturelle cotoie la misère sociale.
comme ça, ça nous évite de culpabiliser au cas où nos enfants feraient un cursus scolaire acceptable.
M. David Belliard, si prompt à donner des leçons, n'enseignerait il pas à l'institut catholique de Paris, où la domination des codes et des symboles bourgeois est omniprésent ?
Ce qui m'exaspère avec ces critiques acerbes, c'est qu'ils font un symbole d'un livre, non pas conçu à l'origine comme un best seller, mais comme un témoignage cathartique de l'auteur, qui en a bavé durant sa jeunesse, n'ayant pas eu la chance d'évoluer dans un milieu culturel favorisé.
Après, que le livre soit dégusté avec gourmandise par des lecteurs confortés dans leurs clichés sur les campagnes de la moitié Nord de la France (j'étais à 10 km d'Hallencourt, lieu où se situe le récit pas plus tard qu'hier), ça n'est pas la faute de l'auteur.
La défense des alcooliques analphabètes, incultes, racistes, victimes de l'oppression sociale, c'est beau sur du papier journal.
Mais les personnes écrivant cet article sont les derniers à côtoyer ces populations ( attachantes par certains côtés, désolantes parfois ).
C'était mon coup de gueule contre les bien pensants, critiques littéraires (plus sociales que littéraires d'ailleurs), des salons parisiens, qui ne connaissent les pauvres que par le biais des films de Ken Loach (comme l'a si finement dit Ave).