Date : 07/01/2014
Auteur : Franck Niedercorn
Editeur : Les Echos
La promesse d'une énergie propre et abondante ne s'est pas encore concrétisée. Mais l'automobile commence à y croire, et l'hydrogène serait très pertinent pour le stockage.
C'était l'un des matchs du dernier Salon automobile de Tokyo : la voiture électrique contre celle à hydrogène. Toyota, pionnier des véhicules verts avec sa Prius, présentait son prototype à hydrogène, FCV, qu'il estime pouvoir lancer d'ici à deux ans. La plupart des autres grands constructeurs, à l'exception de Renault et de PSA, sont dans les starting-blocks. Certains sont même déjà partis, comme Honda, avec la FCX Clarity, ou Huyndai.
Dans ce face-à-face, la voiture à hydrogène a de sérieux atouts : une autonomie d'au moins 600 kilomètres et un passage à la pompe aussi rapide qu'avec une auto à essence. Encore faut-il, justement, accéder à une station fournissant de l'hydrogène.
Est-ce l'avènement de l'économie de l'hydrogène, annoncée par l'économiste américain Jeremy Rifkin en 2002 ? « Les briques technologiques sont désormais disponibles », affirme François Le Naour, responsable du département biomasse énergie au Liten, un laboratoire du CEA.
Un autre phénomène joue pourtant en faveur de l'hydrogène : le déploiement massif des énergies renouvelables. En effet, l'éolien et le solaire photovoltaïque fournissent une énergie certes propre, mais décentralisée, intermittente et imprévisible. « Dès que la part des énergies renouvelables dépasse un certain seuil (par exemple 20 %), qui dépend du mix énergétique et notamment de sa flexibilité, la situation devient critique du fait des périodes de surproduction qui se multiplient et s'allongent », estime Marc Florette, directeur recherche et innovation de GDF Suez. C'est là qu'intervient l'hydrogène, en raison de sa forte densité énergétique (lire ci-contre). Plutôt que d'arrêter les éoliennes ou « de revendre cette électricité à perte », explique Thierry Alleau, président d'honneur de l'Association française pour l'hydrogène et les piles à combustible (Afhypac), cette énergie serait consacrée à produire de l'hydrogène par électrolyse.
Le principe est déjà testé en Corse depuis début 2012, avec le démonstrateur Myrte, qui associe Helion (groupe Areva), le CEA et l'université de Corse. Le courant d'une centrale solaire de 500 kW est transformé en hydrogène par un électrolyseur, puis stocké. L'énergie est ensuite restituée via une pile à combustible pendant les heures de forte consommation.
Il reste pourtant à accomplir de gros progrès techniques. D'abord sur les électrolyseurs, qui permettent de fabriquer l'hydrogène avec l'électricité. La technologie alcaline, la plus connue et bien maîtrisée, « apporte trop peu de souplesse pour être compatible avec les énergies renouvelables », estime Vincent Artero, qui dirige un groupe du laboratoire de chimie et biologie des métaux dans une unité mixte CEA-CNRS-université de Grenoble. Plus performant, l'électrolyseur à membrane est, lui, handicapé par le coût du platine indispensable à sa fabrication.
A plus long terme, la recherche réserve encore sans doute des surprises, par exemple avec la photosynthèse artificielle.