Depuis le 12 février dernier, les fonds H2O subissent le très violent mouvement d'aversion au risque provoqué par la propagation du coronavirus hors des frontières chinoises.
En effet, la progression de l'épidémie en Corée, puis en Europe, enfin aux USA, et les paralysies dans les mouvements de marchandises et de personnes qu'elle entraine, contraint les investisseurs à réévaluer fortement à la baisse les perspectives de croissance mondiale et à fuir les marchés d'actions, de crédit et de devises risquées, pour se précipiter dans quelques valeurs-refuge, peu nombreuses et excessivement chères. En outre, au cours du weekend dernier, en réaction au refus de la Russie d'emboiter le pas à l'OPEC et d'entériner des baisses de production de pétrole pour soutenir les cours face à une demande atone, l'Arabie Saoudite s'embarque dans une guerre des prix avec Moscou et provoque l'effondrement de 20% du prix du baril ce lundi 9 mars.
Or, nos portefeuilles étaient vendeurs de ces valeurs-refuge, à l'instar des obligations du Trésor américaines qui bondissent de plus de 6% dans la foulée de l'effondrement des taux longs américains à des niveaux-record depuis plusieurs décennies et qui entérinent de la sorte une récession outre-Atlantique.
Il en va de même des devises de protection comme le yen japonais et le franc suisse, déjà chères avant la crise mais que cette dernière a renvoyé près de leur plus haut historique. Le fait est que ces devises, du fait de leur rémunération négative, étaient auparavant très largement vendues par le marché pour financer l'achat de devises plus risquées et à rémunération positive, comme nombre de devises matières premières ou émergentes. La crise et les pertes qu'elle entraine obligent ainsi les investisseurs à déboucler ces arbitrages et à racheter ces devises-refuge qu'ils propulsent ainsi vers des sommets. Le même phénomène s'est rapidement enclenché avec l'euro qui bondit contre le billet vert même si rien ne le justifie fondamentalement. C'est dans ce contexte que notre stratégie acheteuse de dollar US n'a pu pleinement assurer son rôle protecteur, ses gains contre devises risquées (dollar australien, won coréen, roupie indienne etc.) étant largement absorbés par ses pertes contre devises-refuge.
Au delà des obligations gouvernementales US et du billet vert, une autre source de sous-performance émane des obligations souveraines italiennes qui auraient certes dû naturellement tirer parti de la vague d'aversion au risque mais qui ont été agressivement vendues par le marché alors que l'Italie devenait l'épicentre de l'épidémie en Europe.
Toujours parmi les stratégies de diversification, côté marchés des changes, les anticipations récessionnistes aux Etats-Unis et la baisse des cours du pétrole entraine la devise mexicaine (dont nous sommes acheteurs) à la baisse contre le dollar US. Il en est logiquement de même de la couronne norvégienne.
Enfin, sur le front des actions, et pour les mêmes raisons que sur celui des taux et des devises, nos stratégies sous-performent. Non seulement les actions européennes accusent plus fortement le coup que leurs homologues américaines, mais aussi les valeurs cycliques (les banques européennes tout particulièrement) chutent plus fortement que les valeurs défensives. Parmi les rares gains, citons la surperformance relative des « blue chips » contre les petites et moyennes capitalisations US.
En résumé, et en l'espace de trois semaines, ce qui était cher est devenu hors de prix, et ce qui était abordable est devenu très bon marché. Dans ce contexte, nos positions « value » accusent logiquement et fortement le coup, presque sans exception. Et le dollar n'y peut pas grand-chose. D'où des performances négatives dont l'ampleur exceptionnelle peut surprendre, mais qui ne correspondent pas à notre lecture de la réalité macroéconomique du monde d'aujourd'hui.
Ce choc de valorisation est en fait le produit de l'hyper-mécanisation des opérateurs de marchés qui se couvrent au moindre accident et à n'importe quel prix face à la brusque augmentation de la volatilité de leurs portefeuilles et à la baisse des actifs. Est-ce une raison pour faire comme eux ?
Nous avons connu de telles crises dans le passé.
Nous savons que ce qui est important, ce n'est pas de regretter de s'y être fait prendre (quasiment impossible dans le cas du covid-19), mais de bien en gérer la sortie.
Quels sont les actes de gestion envisagés et que faire dans cet environnement ?
L'hystérie de ces derniers jours sur les marchés ne reflète plus l'urgence sanitaire liée au virus. D'ailleurs, celle-ci s'atténue très fortement en Chine et en Corée. A défaut, l'actualité financière de ce lundi 9 mars s'est reportée sur le décrochage des cours du pétrole ! Demain, il s'agira assurément d'autre chose. Il faut donc extraire le marché de cette spirale anxiogène qui peut, quant à elle, provoquer une récession, du moins technique.
Seule une intervention rapide et concertée des gouvernements (par le biais de mesures fiscales) et des banques centrales peut le calmer. Certes, hormis la Fed, la BCE et la BoJ ont une capacité très limitée de baisse des taux. En revanche, elles peuvent aisément se substituer au marché pour absorber les ventes d'actifs risqués. C'est ainsi que la hausse récente des spreads de la dette italienne et du crédit européen va se heurter rapidement à l'intervention de la BCE. Quant à la Fed, le reflux des pressions inflationnistes lié à la baisse des prix de l'or noir lui donne tout le loisir d'utiliser le pourcent qui lui reste au niveau de ses taux directeurs, tout en continuant son programme d'achat d'actifs.
L'envolée des risques sur des niveaux dorénavant difficilement soutenables illustre le décalage flagrant entre la panique des marchés et l'environnement macroéconomique. Elle justifie la vente de volatilité à court terme (ce que nous faisons sur certaines devises comme la NOK, la SEK et le ZAR) ainsi que l'augmentation de l'exposition à certaines devises matières premières (AUD & NZD) via des options et ce, pour profiter de la résorption de l'épidémie et de la reprise graduelle de l'activité économique en Asie.
Selon nous, le décalage considérable entre, d'une part, l'affolement des marchés, d'autre part, la nature transitoire de l'épidémie virale et des perspectives de croissance renforcées par le contre-choc pétrolier, militent pour rester bien investi dans nos fonds.
La clef est et sera toujours pour tout investisseur le respect de son horizon de placement.