Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#101 Message par topido » 11 oct. 2022, 14:00

Manfred a écrit :
11 oct. 2022, 13:54
Marrant, quand ils refusent de vendre les livres des "fachos" (la définition est assez large), les libraires ne sont pas harcelés et menacés.
Je ne sais pas: est-ce qu'ils affichent sur la vitrine "On ne vend pas de livres de fachos comme [...] ici"?
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#102 Message par topido » 11 oct. 2022, 14:01

Et les poncifs Anti-Israel = Antisémite... bref. :roll:
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#103 Message par ProfGrincheux » 11 oct. 2022, 16:24

Les deux articles de blog littéraire sont à mourir de rire. Merci, pangloss et Digou, de les avoir cités.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#104 Message par pangloss » 11 oct. 2022, 19:04

ProfGrincheux a écrit :
11 oct. 2022, 16:24
Les deux articles de blog littéraire sont à mourir de rire. Merci, pangloss et Digou, de les avoir cités.
J'adhère tout-à-fait à l'article que j'ai cité et j'y ai retrouvé dézinguée certaine critique stylistique d'El Moderator pour lequel la littérature doit peser sa masse de cacahouètes, comme on dirait que Pavarotti/Ecco dépasse la Callas (surtout sur la fin)... :lol:

Johan Faerber 10 octobre 2022 Annie Ernaux, Livres, Tribunes
Tribune : Heureusement, Annie Ernaux n’est pas un « Grand écrivain »
une analyse fouillée et pertinente de la "réception" de ce prix Nobel.
Extrait :
Alors si Annie Ernaux se dresse comme l’antithèse du « Grand écrivain » et incidemment, à chaque instant, de Houellebecq, il faudra pour ses vaillants détracteurs déconsidérer l’autrice en deux temps pour en faire un épouvantail médiatique aux allures de contre-Houellebecq. Si bien que, depuis jeudi midi, les attaques contre Annie Ernaux s’organisent en deux groupes conjoints d’opposition assignant Annie Ernaux tantôt à un contresens littéraire, tantôt à un contresens politique.

Un Nobel comme contresens littéraire tout d’abord. Sans surprise, ce premier groupe d’oppositions à Ernaux s’affirme comme exclusivement intra-littéraire : il concerne ce qu’on pourrait nommer les amateurs de littérature restreinte mais qui seraient plutôt ce qu’on pourrait désigner de manière éminemment négative, les puristes – ce qui ne peut manquer de faire sourire quand on prétend par ailleurs défendre Houellebecq. Pour ces hommes, très rarement des femmes, l’œuvre d’Annie Ernaux est une non-œuvre. Elle n’écrirait pas. La fameuse « écriture plate » dont l’autrice se réclame notamment depuis La Place ne figure rien d’autre dans la bouche de ces détracteurs qu’une platitude éhontée, un long défilé de banalités sur une vie quotidienne d’une femme de la classe moyenne – ou pire, l’œuvre d’un Bourdieu en jupons donc toujours de la non-littérature. L’écrivain du moi et de l’intime manquerait à chaque mot et à chaque phrase la dimension universelle que doit s’assigner la littérature même.

Dans ce type discours usé qu’on entend depuis bientôt 40 ans à son propos, Annie Ernaux irait même jusqu’à incarner l’antithèse de toute littérature : sa négation affirmée. La preuve, elle serait lisible voire trop lisible. Comme si seule l’illisibilité, c’est-à-dire un critère formaliste daté qui n’a plus cours depuis la fin des années 1970 en France, avait encore une quelconque actualité pour rendre compte du contemporain.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#105 Message par ProfGrincheux » 11 oct. 2022, 19:57

L’article de Digou est une éviscération d’Annie Ernaux. Il m’a plu autant que celui que tu as cité.

Le déploiement de toute cette mauvaise foi pour défendre des opinions esthétiques me réjouit. Si nous le faisons encore, peut-être tout espoir n’est il pas perdu?
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#106 Message par Jeffrey » 11 oct. 2022, 20:45

pangloss a écrit :
11 oct. 2022, 19:04
ProfGrincheux a écrit :
11 oct. 2022, 16:24
Les deux articles de blog littéraire sont à mourir de rire. Merci, pangloss et Digou, de les avoir cités.
J'adhère tout-à-fait à l'article que j'ai cité et j'y ai retrouvé dézinguée certaine critique stylistique d'El Moderator pour lequel la littérature doit peser sa masse de cacahouètes, comme on dirait que Pavarotti/Ecco dépasse la Callas (surtout sur la fin)... :lol:
D’abord, comme tu m’appelles El Moderator, et que c’est une insulte sous ton clavier, je ne vais pas laisser passer, et tu écopes d’un ban. Je n’ai quant à moi insulté personne même si j’ai marqué mon profond désaccord avec certains ici.
Ensuite, il ne faut pas avoir beaucoup d’envergure intellectuelle pour se réclamer adhérer parfaitement à une critique extérieure dont au moins un forumer réputé d’esprit vif vient d’exprimer tout ce que la qualité de la critique lui inspirait comme réaction.
De plus, au cas où ce ne serait pas clair pour tout le monde, on peut toujours comparer Pavaroti et La Callas, c’est une question de goût, et le goût, tout le monde peut prétendre en avoir un raffiné. Il n’en reste pas moins que Umberto Ecco n’est pas un interprète de quoi que ce soit, vu que c’est un auteur. C’est pas pareil…
Si la distinction t’échappe, je vais faire une fois de plus dans la métaphore. C’est un peu comme une comparaison entre Johnny et Jean-Jacques Goldman…
Johan Faerber 10 octobre 2022 Annie Ernaux, Livres, Tribunes
Tribune : Heureusement, Annie Ernaux n’est pas un « Grand écrivain »
une analyse fouillée et pertinente de la "réception" de ce prix Nobel.
Extrait :
Alors si Annie Ernaux se dresse comme l’antithèse du « Grand écrivain » et incidemment, à chaque instant, de Houellebecq, il faudra pour ses vaillants détracteurs déconsidérer l’autrice en deux temps pour en faire un épouvantail médiatique aux allures de contre-Houellebecq. Si bien que, depuis jeudi midi, les attaques contre Annie Ernaux s’organisent en deux groupes conjoints d’opposition assignant Annie Ernaux tantôt à un contresens littéraire, tantôt à un contresens politique.

Un Nobel comme contresens littéraire tout d’abord. Sans surprise, ce premier groupe d’oppositions à Ernaux s’affirme comme exclusivement intra-littéraire : il concerne ce qu’on pourrait nommer les amateurs de littérature restreinte mais qui seraient plutôt ce qu’on pourrait désigner de manière éminemment négative, les puristes – ce qui ne peut manquer de faire sourire quand on prétend par ailleurs défendre Houellebecq. Pour ces hommes, très rarement des femmes, l’œuvre d’Annie Ernaux est une non-œuvre. Elle n’écrirait pas. La fameuse « écriture plate » dont l’autrice se réclame notamment depuis La Place ne figure rien d’autre dans la bouche de ces détracteurs qu’une platitude éhontée, un long défilé de banalités sur une vie quotidienne d’une femme de la classe moyenne – ou pire, l’œuvre d’un Bourdieu en jupons donc toujours de la non-littérature. L’écrivain du moi et de l’intime manquerait à chaque mot et à chaque phrase la dimension universelle que doit s’assigner la littérature même.

Dans ce type discours usé qu’on entend depuis bientôt 40 ans à son propos, Annie Ernaux irait même jusqu’à incarner l’antithèse de toute littérature : sa négation affirmée. La preuve, elle serait lisible voire trop lisible. Comme si seule l’illisibilité, c’est-à-dire un critère formaliste daté qui n’a plus cours depuis la fin des années 1970 en France, avait encore une quelconque actualité pour rendre compte du contemporain.
Je suis d’accord avec pg, c’est grotesque, donc soit de mauvaise foi, soit parfaitement inepte. Donc c’est risible.
Au passage, je confirme, je suis très rarement une femme.
Sinon, je trouve juste que la lire est parfaitement chiant, ce qui n’a strictement aucun rapport avec une attente littéraire qui serait datée d’au moins 40 ans.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#107 Message par wasabi » 11 oct. 2022, 21:04

topido a écrit :
11 oct. 2022, 14:00
Manfred a écrit :
11 oct. 2022, 13:54
Marrant, quand ils refusent de vendre les livres des "fachos" (la définition est assez large), les libraires ne sont pas harcelés et menacés.
Je ne sais pas: est-ce qu'ils affichent sur la vitrine "On ne vend pas de livres de fachos comme [...] ici"?
ont ils l'obligation légale de tout vendre en tant que libraire ? Comme les "presse" ou les "pharmaciens" qui sont obligés de mettre tout ce qu'on leur fournit ?
Après tout ces trois professions ont ceci de particulier que leur stock est payé par leurs fournisseurs et qu'ils ne payent les choses vendues qu'après avoir encaissé, même les hypermarchés n'ont pas réussi à avoir ce privilège (hors rayons presse et librairie évidemment)
"Le marché peut rester irrationnel plus longtemps que vous ne pouvez rester solvable" - J.M. Keynes, 1936

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#108 Message par topido » 11 oct. 2022, 21:06

wasabi a écrit :
11 oct. 2022, 21:04
topido a écrit :
11 oct. 2022, 14:00
Manfred a écrit :
11 oct. 2022, 13:54
Marrant, quand ils refusent de vendre les livres des "fachos" (la définition est assez large), les libraires ne sont pas harcelés et menacés.
Je ne sais pas: est-ce qu'ils affichent sur la vitrine "On ne vend pas de livres de fachos comme [...] ici"?
ont ils l'obligation légale de tout vendre en tant que libraire ? Comme les "presse" ou les "pharmaciens" qui sont obligés de mettre tout ce qu'on leur fournit ?
Je ne pense pas... par contre vu le personnage, son but c'était plus d'envoyer un message aux passants qu'autre chose.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#109 Message par ProfGrincheux » 12 oct. 2022, 05:38

Ah, là, là, tu t’énerves bien pour des peccadilles. Pangloss a effectivement voulu se moquer de toi. Bah, tu peux t’en fiche comme de ta première martingale.

La critique de Faerber est ridicule car elle cherche à discréditer une esthétique littéraire sous le prétexte que c’est une esthétique de droite et qu’elle n’est pas à la mode. Ça n’a aucun sens.

C’est comme critiquer l’esthétique littéraire qu’a choisie Ernaux parce que c’est une femme de gauche. Elle a envie d’écrire ainsi parce que ses textes lui paraissent meilleurs. Certains lecteurs adhérent, suffisamment pour qu’elle ait des fans jusque chez les vieux croûtons de l’Académie de Suède. Certains n’y adhérent pas.

L’Académie de Suède fait souvent des choix étranges. Le premier prix Nobel, en 1901, est Sully Prudhomme, un poète bien oublié. Les poètes dont l’œuvre a survécu mourraient jeunes à l’époque….. Quant aux romanciers. Émile Zola était encore vivant en 1901. Ainsi que Léon Tolstoï.
Sully Prudhomme a écrit : Le Vase brisé

À Albert Decrais.


Le vase où meurt cette verveine
D’un coup d’éventail fut fêlé ;
Le coup dut effleurer à peine :
Aucun bruit ne l’a révélé.

Mais la légère meurtrissure,
Mordant le cristal chaque jour,
D’une marche invisible et sûre
En a fait lentement le tour.

Son eau fraîche a fui goutte à goutte,
Le suc des fleurs s’est épuisé ;
Personne encore ne s’en doute ;
N’y touchez pas, il est brisé.

Souvent aussi la main qu’on aime,
Effleurant le coeur, le meurtrit ;
Puis le coeur se fend de lui-même,
La fleur de son amour périt ;

Toujours intact aux yeux du monde,
Il sent croître et pleurer tout bas
Sa blessure fine et profonde ;
Il est brisé, n’y touchez pas.

Est-ce si mauvais? La dernière strophe est de trop. Voire l’avant dernière. Le non-explication de la métaphore aurait sans doute été plus forte que son explicitation.

Sinon voici le site fort sympathique où j’ai trouvé ce poème https://www.eternels-eclairs.fr/poesie.php.

Le poète a toujours raison. Même quand il a tort. C’est sa principale ressemblance avec le chef.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#110 Message par Jeffrey » 12 oct. 2022, 07:08

Je suis calme et serein. Il ne faut pas confondre fermeté et énervement.
Je connais Sully Prudhomme et ce magnifique poème. Il rappelle celui du dormeur du val.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#111 Message par ProfGrincheux » 12 oct. 2022, 14:22

Les trois premières strophes sont en effet bien belles et l'idée finale aussi.

Je trouve toutefois que les deux dernières strophes ne claquent pas comme, justement, un coup de fusil.

Que ce soit un coup d'éventail qui fèle le vase suffirait il a ce que le lecteur, le récitant ou l'auditeur du récitant saisissent le sens du poème?
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#112 Message par Jeffrey » 20 oct. 2022, 17:29

il semblerait que ça n'aille pas beaucoup mieux chez nos voisins :
https://www.swissinfo.ch/fre/kim-de-l-h ... e/47986054
C'est l'équivalent du Goncourt chez eux.

Kim de l'Horizon, née en Suisse, reçoit le Prix allemand du livre
Image
(Keystone-ATS)

Kim de l'Horizon est la lauréate du Prix allemand du livre 2022. Lors de la remise du prix lundi soir à Francfort, l'autrice née en Suisse s'est rasée la tête pour exprimer sa solidarité avec les femmes en Iran.

"Ce prix n'est pas seulement moi", a déclaré l'écrivain après l'annonce du résultat. Kim de l'Horizon, qui ne se considère clairement ni comme un homme ni comme une femme, ni comme les cdeux à la fois s'est d'abord précipitée dans le public pour serrer dans ses bras des compagnes de route.

En pleurs, elle a ensuite remercié sa mère, entonnant spontanément et a capella une chanson. Le prix est aussi "un signe contre la haine, pour l'amour, pour la lutte de tous les êtres humains qui sont opprimés à cause de leur corps".

Kim de l'Horizon est récompensée du prix pour le meilleur roman de langue allemande de l'année, dotée de 25'000 euros, pour son titre "Blutbuch", édité chez DuMont. Elle y évoque justement le thème du genre.

"Née en 2666"

"Avec une énorme énergie créative, le narrateur non binaire du roman "Livre de sang" cherche son propre langage", déclare le jury, qui s'est senti "provoqué mais enthousiaste". "Quelles sont les formes narratives possibles pour un corps qui échappe aux représentations traditionnelles du genre?" La forme romanesque est en perpétuel mouvement: "Chaque tentative de langage, de la scène plastique au mémoire sous forme d'essai, déploie une urgence et une force d'innovation littéraire qui ont provoqué et enthousiasmé le jury", ajoute ce dernier.

Kim de l'Horizon elle-même laisse délibérément sa biographie dans le vague: le texte de la couverture indique: "né en 2666". Selon la Börsenverein, Kim de l'Horizon est née en 1992 près de Berne; elle a étudié la langue allemande et les sciences du cinéma et du théâtre à Zurich ainsi que la littérature à Bienne. "Blutbuch", un premier roman, avait déjà été récompensé auparavant par le prix littéraire de la fondation Jürgen Ponto.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#113 Message par pimono » 20 oct. 2022, 18:36

Jeffrey a écrit :
20 oct. 2022, 17:29
il semblerait que ça n'aille pas beaucoup mieux chez nos voisins :
https://www.swissinfo.ch/fre/kim-de-l-h ... e/47986054
C'est l'équivalent du Goncourt chez eux.
)
C'est un message pour le monde entier !

"Je pense que le jury a choisi ce texte aussi pour envoyer un signal contre la haine, pour l'amour et pour le combat de tous ces gens qui sont réprimés à cause de leur corps."

https://www.bfmtv.com/culture/kim-de-l- ... 80280.html
"Ils feront le travail pour nous et nous prospérerons grâce à leurs dettes et leur dur labeur, ...nous continuerons à les faire vivre dans la peur et la colère par l’image et le son."

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#114 Message par henda » 20 oct. 2022, 19:21

Je me demande bien qui va recevoir ce message.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#115 Message par DIGOU » 20 oct. 2022, 21:44

Avec la pomme d'Adam bien en évidence, signe de testostérone.
Pas de doute, c'est bien une femme.
Qui ne se revendique ni homme ni femme.
Mais pourquoi le texte dit: elle?

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#116 Message par Ardoise » 20 oct. 2022, 21:56

ignatius a écrit :
06 oct. 2022, 19:27
Ce sera ma seule et dernière intervention.

A 19 ans, avec 15 francs en poche, j étais allé chez le libraire, Mollat, à Bordeaux.
Je cherchais un livre de poche pour occuper ma soirée.
Je suis tombé sur un livre, prix Renaudot en 1984, la place, d'une auteure que je ne connaissais pas.

Annie Ernaux.

A l'époque, je vivais en cité U, je découvrais les études et le milieu et les codes bourgeois, en provenance de mon lycée de ZEP.

Ce livre a été une claque monumentale.
Des mots étaient enfin mis sur ce que je ressentais, sans pouvoir le définir précisément.
J'ai lu ce livre plus d'une dizaine de fois.
Je l'ai relu le jour de la mort de mon père, et le soir après son enterrement. J'ai pleuré de rage à chaque page ce soir là.

Au lieu de véhiculer des a priori, ou de répéter ce qu'ont pu dire quelques commentateurs, lisez cette œuvre.

La place, incontournable
Les armoires vides
La femme gelée
La honte
Les années

Et tant d'autres encore...

J'étais sur la route quand j'ai entendu la nouvelle.
J'ai été obligé de m'arrêter tellement j'ai été submergé par l'émotion.

Cette œuvre, c'est ce qui m'a fait me sentir autorisé à occuper "la place" que j'occupe actuellement.
Cette œuvre c'est ce qui m'a fait me sentir en paix avec mon milieu d'origine.
Cette œuvre c'est ce qui m'a fait aimer jeune adulte mon père pour ce qu'il était, le meilleur des pères, et non pour ce que je voulais qu'il soit.

Merci madame pour cette œuvre.

Je tire ainsi ma révérence.
Tu n'es plus là dommage.

Je ne la lirai pas, elle est fade, sa vie, son œuvre, à 82 ans être près de Mélanchon dans une manif, y'a rien qui choque ?
J'ai un certain âge, et je ne suis toujours pas à ma place, parce que je ne suis rien.
La classe sociale n'est pas une affaire, il ya des personnes qui sont heureuses et d'autres non, quelque soit sa classe dite "sociale". Moi je n'ai honte de rien, normale je ne suis rien, mais je fais attention,sans le vouloir aux gens.
J'ai une chance extraordinaire, je suis passée par toutes les classes sociales, sans le vouloir non plus, je n'ai pas lu Bourdieu.

J'ai simplement regardé,et chacune des personnes que j'ai rencontrée m'a apporté une chose ou une autre, une compréhension des humains. Je juge rarement les gens, je parle à tout le monde quelque soit son rang "social".

Y'a des horreurs partout, partout, c'est cela que je retiens.
Ardoise s'efface.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#117 Message par guyomette » 24 oct. 2022, 02:24

Jeffrey a écrit :
07 oct. 2022, 18:11

Ma haine et mon mépris à moi, c'est pour cette forme d'admiration et soumission à une société qui se considère comme hiérarchisée.
Mon intérêt (à moi) et le vrai sujet de cette file (pour moi) c'est cette phrase. Avec ou sans Ignat, je crois le sujet intéressant, car ta phrase est curieusement construite, il est du moins probable que je la comprenne pas bien.
1La société se considère-t-elle comme hiérarchisée ? Soit dans le regard global qu'elle porte sur elle-même, et conséquemment dans les discours qu'elle produit -autrefois on appelait ça l'idéologie dominante mais ça parlait du social, en termes clairs de la lutte des classes.
2 Ou l'est-elle réellement ?
Tu conviendras que, selon que tu penches pour le 1 ou le 2 l'articulation avec l'admiration/soumission est totalement différente.
Je crois quant à moi la société très hiérarchisée en termes sociaux, je pense que la lutte des classes existe et que pour paraphraser Warren Buffet c'est l'upper et surtout l'upper upper class qui l'a gagnée.
Et, ceci expliquant cela, que ladite société fait au contraire tout pour masquer ces inégalités aussi réelles, qu'injustifiées.
Tout au contraire, le discours qu'elle produit vise à masquer la vraie hiérarchie à travers un bavardage écervelé, perpétuel, abrutissant dont les contradictions révèlent le factice et prétendant à la fois :
- célébrer toutes les 2 phrases notre formidable liberté (le prix du gaz = prix de la liberté, à ce que j'ai pigé).
- et soûler la moitié de la France sur la persécution que cette moitié, via sa honteuse vision hiérarchisée (ex un individu portant un service trois pièces n'est pas une femme, ça c'est une honteuse vision hiérarchisée) inflige aux minorités.
Ce soûlage (propagande en bonne et due forme) ça s'appelle le woke.
Woke mot "marrant" car ça vient d'éveillé, notion provenant elle-même du vocabulaire de sectes, et disant le de ce qu'elle cherche à produire.
Car le woke sert à endormir sur la vraie, ou les vraies fractures sociales.

ps : j'ai lu Ernaux, c'est une plutôt bonne psychosociologue. Du point de vue littéraire, je plussoie Alexyion, disons qu'elle a toutefois dépoussiéré le genre, grâce en effet à cette sorte d'écriture plate, le pb c'est qu'au bout d'un moment ça m'aplatit sur mon lit et je dors... :roll: :oops:
« la plupart des gens (...) croient à la pérennité de la mémoire (...) et à la possibilité de réparer (...). La vérité se situe juste à l'opposé : tout sera oublié et rien ne sera réparé.» Kundera, La Plaisanterie.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#118 Message par franckyfranck » 24 oct. 2022, 14:16

Jeffrey a écrit : Ma haine et mon mépris à moi, c'est pour cette forme d'admiration et soumission à une société qui se considère comme hiérarchisée.
Bah justement le livre parle de la difficulté d'être un transfuge de classe et la notion de hiérarchie, tu ne l'as pas forcément avant que cela t'arrive. Ayant fait une école d'ingé, j'ai eu autour de moi des gens concernés. Pas qu'un. Et a peu près autant de manière d'aborder le problème que de personnes. Et les situations ont été variées autant le point de départ que le point d'arrivée.

Mais dans tous les cas, à un moment, le jeune concerné remarque qu'il arrive dans un univers différent de celui qu'il a connu, enfant. Ses nouveaux comarades parlent de choses qu'il ne connait pas encore, font des activités différentes, bref sont différents. Et la je ne mets pas encore de jugement de valeur d'autant que cela peut au départ être interprété négativement genre : "Pourquoi ils discutent de Théatre et de littérature ici ?". "Pourquoi ils payent pour aller voir des expos ou y'a des trucs fumeux ?", "Pourquoi t'as faim en sortant avec le prix que tu as raqué ?". Le choc au début n'est pas toujours vu comme positif. Mais il y a un choc qui est la simple constatation de "ici c'est différent".

Après la dessus j'ai vu des gens qui n'ont pas ou peu changé et d'autres qui ont considérés que c'était leur chance d'avoir accès à cette vie et qu'ils devaient la saisir. Si je prends deux cas extrèmes parmi mes amis, un roule encore à vélo (et en est très heureux) et vit sobrement (idem c'est choisi) et l'autre s'est fait plaisir chez le concessionnaire merco et vit luxueusement (c'est également un choix).

Le millieu d'origine comme le millieu de destination seront également vu très différamment selon les cas. Mais je dirai que dans les cas que j'ai connu ou cela se passait bien, la famille avait plutôt eu tendence à encourager le mouvement et à valoriser la culture qu'elle voyait comme un moyen d'émancipation et d'intégration. Ainsi pour mon pote issu d'une citée, il n'y a pas eu de soucis car ses parents l'ont toujours encouragé à se cultiver et donc il n'y avait pas de dissonannce lorsqu'il rentrait en famille. Un autre pote originaire de la campagne a eu droit à : "D'puis qu't'es à Paris, t'as des intérêts de PD ! T'es pas devenu PD au moins ?" suivi d'une diatribe sur les maraiscages et les phoques. (Tiens la hérarchie est inversée). Forcément l'un est resté très proche de sa famille, l'autre a fuit à l'étranger pour aller mieux (et aussi parce que son fort accent franc-comtois ne le génais plus une fois à l'étranger). Et encore, il était chanceux il n'était pas gay parce que sinon avec la famille ca allait être la cata. La son seul tort avait été de s'intérésser à des choses non valorisées dans son millieu. Sa transitiion a été pour lui un réel traumatisme et il a du mal à mettre les mots dessus 15 ans après. Sans la porte de sortie de l'expatriation je pense qu'il y aurait eu pour lui une fin triste. Fuire à l'étanger l'a sauvé.

De même pour l'intégration avec le millieu d'arrivée cela peut plus ou moins bien se passer… Avec des codes ou des coutumes que le nouvel arrivant peut juger inadaptées / dégradantes / stupides. Ainsi certains ont vécu leur arrivée dans leur nouveau monde comme un enfermement, d'autres comme une libération.

Mais au bout d'un moment on ne peut se voiler la face. La rupture avec l'ancien monde est consommée car ce "commun" qui nous fait tenir comme une famille n'est plus commun. D'ou le fait que ce sujet soit vu comme important. Je remarque que même le passage de classe moyenne à classe supérieure semble avoir laissé des traces chez beaucoup de gens. Et les empéche parfois de réaliser leur plein potentiel.

Bref, le sujet sur les dangers de la mobilité sociale ascendente n'est pas souvent abordé et il est pourtant important.


NB: Je n'ai pas lu Annie Ernaux. J'avais lu Didiier Eribon et cela m'avait un peu gonflé.

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Jeffrey
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#119 Message par Jeffrey » 24 oct. 2022, 16:16

franckyfranck a écrit :
24 oct. 2022, 14:16
Jeffrey a écrit : Ma haine et mon mépris à moi, c'est pour cette forme d'admiration et soumission à une société qui se considère comme hiérarchisée.
Bah justement le livre parle de la difficulté d'être un transfuge de classe et la notion de hiérarchie, tu ne l'as pas forcément avant que cela t'arrive. Ayant fait une école d'ingé, j'ai eu autour de moi des gens concernés. Pas qu'un. Et a peu près autant de manière d'aborder le problème que de personnes. Et les situations ont été variées autant le point de départ que le point d'arrivée.
Je pense que c'était parfaitement clair en lisant les interventions des uns et des autres. Il s'agit de percevoir son appartenance à un groupe social constitué - une classe - , et de se percevoir comme un transfuge de classe. On peut multiplier les exemples de personnes dont les existences les amènent à se retrouver dans des milieux différents, de par leur composition professionnelle, leur culture, leurs habitus. Ce n'est pas là le problème.
(
Mais dans tous les cas, à un moment, le jeune concerné remarque qu'il arrive dans un univers différent de celui qu'il a connu, enfant. Ses nouveaux comarades parlent de choses qu'il ne connait pas encore, font des activités différentes, bref sont différents. Et la je ne mets pas encore de jugement de valeur d'autant que cela peut au départ être interprété négativement genre : "Pourquoi ils discutent de Théatre et de littérature ici ?". "Pourquoi ils payent pour aller voir des expos ou y'a des trucs fumeux ?", "Pourquoi t'as faim en sortant avec le prix que tu as raqué ?". Le choc au début n'est pas toujours vu comme positif. Mais il y a un choc qui est la simple constatation de "ici c'est différent".

Après la dessus j'ai vu des gens qui n'ont pas ou peu changé et d'autres qui ont considérés que c'était leur chance d'avoir accès à cette vie et qu'ils devaient la saisir. Si je prends deux cas extrèmes parmi mes amis, un roule encore à vélo (et en est très heureux) et vit sobrement (idem c'est choisi) et l'autre s'est fait plaisir chez le concessionnaire merco et vit luxueusement (c'est également un choix).
on peut dépasser l'énumération à la Prévert, ou la description des cas de figure, en effet, certains sont sensibles à ces différences, d'autres non, et parmi ceux qui sont sensibles, certains ont du mal à vivre ces différences. Là également, il n'y a rien de nouveau dans ce commentaire.


Le millieu d'origine comme le millieu de destination seront également vu très différamment selon les cas. Mais je dirai que dans les cas que j'ai connu ou cela se passait bien, la famille avait plutôt eu tendence à encourager le mouvement et à valoriser la culture qu'elle voyait comme un moyen d'émancipation et d'intégration. Ainsi pour mon pote issu d'une citée, il n'y a pas eu de soucis car ses parents l'ont toujours encouragé à se cultiver et donc il n'y avait pas de dissonannce lorsqu'il rentrait en famille. Un autre pote originaire de la campagne a eu droit à : "D'puis qu't'es à Paris, t'as des intérêts de PD ! T'es pas devenu PD au moins ?" suivi d'une diatribe sur les maraiscages et les phoques. (Tiens la hérarchie est inversée). Forcément l'un est resté très proche de sa famille, l'autre a fuit à l'étranger pour aller mieux (et aussi parce que son fort accent franc-comtois ne le génais plus une fois à l'étranger). Et encore, il était chanceux il n'était pas gay parce que sinon avec la famille ca allait être la cata. La son seul tort avait été de s'intérésser à des choses non valorisées dans son millieu. Sa transitiion a été pour lui un réel traumatisme et il a du mal à mettre les mots dessus 15 ans après. Sans la porte de sortie de l'expatriation je pense qu'il y aurait eu pour lui une fin triste. Fuire à l'étanger l'a sauvé.

De même pour l'intégration avec le millieu d'arrivée cela peut plus ou moins bien se passer… Avec des codes ou des coutumes que le nouvel arrivant peut juger inadaptées / dégradantes / stupides. Ainsi certains ont vécu leur arrivée dans leur nouveau monde comme un enfermement, d'autres comme une libération.
bon, d'accord, sauf que je ne vois pas d'analyse et de jugement de contenu, je vois une énumération d'expériences vécues, je ne vois pas encore poindre le problème dont on parle.
Mais au bout d'un moment on ne peut se voiler la face. La rupture avec l'ancien monde est consommée car ce "commun" qui nous fait tenir comme une famille n'est plus commun. D'ou le fait que ce sujet soit vu comme important. Je remarque que même le passage de classe moyenne à classe supérieure semble avoir laissé des traces chez beaucoup de gens. Et les empéche parfois de réaliser leur plein potentiel.
voilà, au moment où on est dans le coeur du problème, ton commentaire devient une acceptation implicite de la hiérarchie sociale. C'est là qu'on en était tous. Autrement dit, au moment où tu pourrais commencer à effleurer le fond du sujet, tu glisses comme sur une savonnette qui trainait dans la douche... Qu'il y ait des catégories sociales, point de doute, encore que, comme l'a souligné Wolfgang, le fait de rendre cette lecture prédominante sur toute forme d'analyse est déjà une lecture imposée par une catégorie de penseurs. MAis même à cette précision près, ton problème majeur est de considérer sans même t'en rendre compte le caractère réducteur, émasculateur, atrophiant qui consiste à percevoir ces groupes sociaux comme hiérarchisés, c'est à dire organisés depuis les inférieurs jusqu'aux supérieurs.
ON en était exactement là du point de départ de mon désaccord.
Maintenant, pour ce qui est de la sociologie de groupe, certains auteurs anglais et allemands de la première moitié du 20e siècle on très bien analysé les mécanismes d'auto-consolidation et de stabilité qu'un groupe met en place pour se préserver. Les allemands parlent de gelstalt d'ailleurs. Ces mécanismes sont logiques, je n'écris pas naturels, ils se définissent presque comme un darwinisme des structures résistantes. Quand un groupe social ne met pas en place ces éléments de reconnaissance, identification, subordination à son appartenance, il n'a pas de stabilité sociale possible. Par contre, aucun de ces mécanismes n'a de raison extrinsèque à être perçu comme une hiérarchisation externe. J'entends par là qu'il est logique qu'un ensemble d'individus qui se reconnaissent pour des comportements, des attributs, des règles, considèrent que les protocoles mis en place ou ces règles soient hiérarchiquement supérieurs à ceux d'autres groupes. Mais il n'y a pas de raison pour que ces mécanismes soient perçus comme ayant une hiérarchie comparable inter groupes. C'est le problème de la sociologie comportementale.
J'ai essayé de l'expliquer en substance dans mes posts précédents, pas sûr d'avoir été parfaitement compris.
Bref, le sujet sur les dangers de la mobilité sociale ascendente n'est pas souvent abordé et il est pourtant important.
tout le fil, je dis bien tout le fil, le travail d'Ernaux, la sortie d'ignatius, ma réponse, mes réponses, ne tournent pas autour de la question de la mobilité sociale, ni de l'existence de groupes sociaux, mais du mot "ascendante", que je corrige au passage. Si on ne comprend pas où est la question, il ne peut y avoir que contresens.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#120 Message par War Again » 24 oct. 2022, 16:32

franckyfranck a écrit :
24 oct. 2022, 14:16
Bref, le sujet sur les dangers de la mobilité sociale ascendente n'est pas souvent abordé et il est pourtant important.
Le danger, s'il est avéré, vient selon moi de ce que certains, comme vous, hiérarchisent les classes sociales et souffrent ensuite d'avoir échappé à la leur, abandonnée en bas.
Je suis fils d'ouvrier immigré, et ingénieur. J'appartiens à la classe moyenne après avoir grandi dans la classe ouvrière. J'évolue principalement parmi des français d'ascendance européenne, après avoir grandi principalement parmi des enfants d'immigrés.

Je n'ai ressenti absolument aucun choque au passage. Je n'ai pas le moindre sentiment de trahison à l'égard de ceux qui sont restés dans mon milieu d'origine. Sans doute est-ce lié au fait que je ne me vois pas comme appartenant à une classe supérieure à la leur, seulement à une classe légèrement plus friquée. L'argent ne faisant pas tout, je suis content d'en avoir assez, mais je ne trouve pas que ça me donne une valeur intrinsèque supérieure à ce que j'étais avant.

Je ne nie pas le moins du monde les difficultés que vous évoquez chez certains, mais je pense qu'ils se les créent avec cette vision hiérarchisée des classes sociales.

Jeffrey l'explique très bien, j'ajoute simplement mon modeste témoignage.
Ignorés : personne. Suffit de ne pas lire ceux que l'on juge indignes d'être lus. (sauf PACA, parce que je n'ai pas de soucis avec la contradiction, mais les vieux radoteurs, je ne les tolère que par obligation familiale)

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#121 Message par Jeffrey » 24 oct. 2022, 16:33

guyomette a écrit :
24 oct. 2022, 02:24
Jeffrey a écrit :
07 oct. 2022, 18:11

Ma haine et mon mépris à moi, c'est pour cette forme d'admiration et soumission à une société qui se considère comme hiérarchisée.
Mon intérêt (à moi) et le vrai sujet de cette file (pour moi) c'est cette phrase. Avec ou sans Ignat, je crois le sujet intéressant, car ta phrase est curieusement construite, il est du moins probable que je la comprenne pas bien.
1La société se considère-t-elle comme hiérarchisée ? Soit dans le regard global qu'elle porte sur elle-même, et conséquemment dans les discours qu'elle produit -autrefois on appelait ça l'idéologie dominante mais ça parlait du social, en termes clairs de la lutte des classes.
2 Ou l'est-elle réellement ?
Tu conviendras que, selon que tu penches pour le 1 ou le 2 l'articulation avec l'admiration/soumission est totalement différente.
Je crois quant à moi la société très hiérarchisée en termes sociaux, je pense que la lutte des classes existe et que pour paraphraser Warren Buffet c'est l'upper et surtout l'upper upper class qui l'a gagnée.
il m'est bien plus facile de te répondre après le post de Franky. A ton avis, Franky, il est plutôt tendance 1 ou 2 ?
Lorsqu'un ensemble d'individus estime qu'une conception des choses fait autorité, alors la messe est dite, pour ce que cela a de conséquences dans les comportements des uns et des autres.
Mon propos est bien entendu que la société se considère comme hiérarchisée dès lors qu'une partie de ses penseurs et analystes adoptent ce point de vue. En revanche, tous ceux exclus de cette réflexion sociétale n'ont jamais cette lecture bien entendu. Et il est d'autant plus ennuyeux qu'on leur "offre", je devrais dire "présente", une perspective de mobilité qui s'inscrive dans cette optique. ON peut naturellement généraliser à plein de sujets modernes d'analyse sociétale, comme l'égalité homme-femme, surtout dans le travail, ou les droits respectifs, ou la tolérance des moeurs. De sorte que, justement, le wokisme, les célébrations de liberté au gaz, le genrisme, l'écolomanie rousseauiste,... tout cela ne relève que d'une injonction à lire la société d'une manière et pas d'une autre.
Je suis complètement alarmé justement par cette injonction de lecture, qui transcende d'ailleurs la question de la fracture sociale, mais se traduit par des choix profonds parmi les jeunes qui m'entourent, choix induits par cette lecture de la société, et qu'ils n'arrivent pas à questionner en elle même. Lecture qui les pousse dans une démarche d'étude, de choix de vie, de secteurs de travail, de revendication sociale pseudo appropriée et qui en fera des moutons bien dociles.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#122 Message par guyomette » 24 oct. 2022, 17:03

Deux posts sont passés avant celui-ci, sorry, je raccorderai donc les choses ensuite : merci Franckyfranck, j'ai été personnellement fort intéressée par ton post.
Cette file me semble effectivement intéressante -raison pour laquelle elle est assez houleuse- car elle traite en effet de ce qu'Ernaux a voulu relater : le changement, l'ascension sociale (son pendant la descente n'étant forcément pas très loin).

En effet :
Bref, le sujet sur les dangers de la mobilité sociale ascendante n'est pas souvent abordé et il est pourtant important.
Un sociologue, un des premiers à creuser la question parle assez bien de cette question : Vincent de Gauléjac.
Il a écrit entre autres "La Névrose de classe" et plein d'autres ouvrages comme la "Lutte des places". Bon de quoi alimenter la réflexion. Même si je suis un peu agacée, car je n'y ai pas retrouvé "mon piti cas perso explicité et tout prêt à l'emploi" :lol: :oops: et que bref, il a fallu me fader mon auto-analyse toute seule...
Mon chapitre sur ledit cas perso :
- Arrière-grand père paysan vaguement artisan, famille de Normandie bouseuse à souhait depuis 1612, laisse mon grand-père et ses soeurs enfants dans une misère noire : on mandit (j"avais écrit on "mendit", lapsus géant :lol: on va effet dire bcp de menteries sur l'origine sociale) "chez moi".
- Mon grand-père travaille à 12 ans dans un troquet, sauve ses soeurs de la faim et fait une petite fortune comme limonadier : achat d'une maison de campagne et achète la presque totalité d'un immeuble haussmannien dans l'Est parisien.
- Délaissé, humilié par ledit grand-père (type burné, autoritaire, résistant à tout, des tranchées à la grippe espagnole°, mon père est au contraire un homme psychologiquement fragile, faible, mais colérique, peu intelligent et à tendance alcoolique : non seulement il ne parviendra pas à égaler la réussite de mon grand-père mais en a presque tout perdu. Je pourrais posséder des appartes à Paris, mais papa les a vendus, et en plus aucun de mes deux ascendants ne nous ont permis de savoir gérer un patrimoine, voire même nos sous... Bref, on n'est pas sur bullimmo pour rien...

Tardivement, j'ai compris ce fait social : une ascension sociale, si elle n'est le fait que d'une génération (surtout passant de la misère au statut de rentier bedonnant) et surtout, condition absolue, si elle ne s'accompagne pas d'une ascension éducative, de l'acquisition d'un patrimoine intellectuel, n'est rien.
Elle encombre même, induit en erreur, en faisant croire à une richesse en réalité peu assurée.
Tardivement compris comme l'exemple de Ffranck :
ma transitiion a été pour lui un réel traumatisme et il a du mal à mettre les mots dessus 15 ans après.
Cette trajectoire sociale, car contrairement à Jeffrey je suis certaine d'en avoir une, ma problématique même, ressemble psychosociologiquement à celle que vivent les gagnants du loto m'a dit un universitaire : ces gens peu préparés paument tout assez vite, n'investissent pas dans le savoir, ni rien de valables...
Nulle en "sous", plutôt pauvre, je n'ai pu que m'acharner à accumuler le plus de "savoir penser" possible. Mon fils est bac +5, courant de nos jours, pas mal vu d'où je viens.

Cette file, pour des raisons objectives et subjectives me semble donc passionnante ; Franckyfrank que je remercie derechef a écrit :
Mais dans tous les cas, à un moment, le jeune concerné remarque qu'il arrive dans un univers différent de celui qu'il a connu, enfant. Ses nouveaux camarades parlent de choses qu'il ne connait pas encore, font des activités différentes, bref sont différents.
La comparaison de ma "culture d'origine" et celle que j'ai trouvée chez les ados intellos du lyçée, l'une me disant "je lis S de B". Gné ? Elle voulait dire Simone de Beauvoir... Mon fils et ses potes de fac et leurs baraques de luxe de "Saint-Gèèère..." (-main en Laye. Enormes, les codes, leur acquisition, leur refus, le tri nécessaire, possible ou non, car :
(les "transfuges) ont vécu leur arrivée dans leur nouveau monde comme un enfermement, d'autres comme une libération.
Et des fois ils ont les fesses entre deux chaises...
Mais au bout d'un moment on ne peut se voiler la face. La rupture avec l'ancien monde est consommée car ce "commun" qui nous fait tenir comme une famille n'est plus commun. D'où le fait que ce sujet soit vu comme important. .

Oui, mon déracinement socioculturel fut égal à "solitude", car on ne sent pas pour autant toujours "nidifié" établi, dans le nouveau milieu. On peut même échouer en partie à cause de cela : par ex : et je contre un peu là, Wolfgangk : non, le sentiment de classe, n'est pas toujours du pipo. Je le possède chevillé au corps : ça m'a sans doute empêché de réussir, mais c'est d'un autre côté la source de ce que j'ai de meilleur (penser).
Pour mon fils, c'est plus cool (mais pas non plus serein) :
Mais je dirai que dans les cas que j'ai connus ou cela se passait bien, la famille avait plutôt eu tendance à encourager le mouvement et à valoriser la culture qu'elle voyait comme un moyen d'émancipation et d'intégration.

Je crois lui avoir apporté au moins ça à défaut de fric, et je crois ta remarque absolument juste d'un point de vue général (mais du quantitatif stat seraient les bienvenus sur ce sujet, sauf que difficile à recueillir).

Annie Ernaux, que l'on aime la lire ou non, touche tout cela. Cela ne peut, et ça n'a pas laissé indifférents des gens comme Francky, mais aussi Ardoise, Paca je crois, Ignatius aussi sous une forme curieuse et bien sûr Jeffrey qui avait écrit il y a un moment son histoire : je ne crains pas de lui dire que c'était passionnant. Si ce n'est fait, il devrait la reposter ici.

Racontez si vous le souhaitez ! Ama cette file est la bonne, c'est intéressant, enrichissant, bénéfique et on peut au moins reconnaître à mme Ernaux le mérite de l'avoir suscitée.
edit : bricoles, lisibilité
« la plupart des gens (...) croient à la pérennité de la mémoire (...) et à la possibilité de réparer (...). La vérité se situe juste à l'opposé : tout sera oublié et rien ne sera réparé.» Kundera, La Plaisanterie.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#123 Message par guyomette » 24 oct. 2022, 17:55

War Again a écrit :
24 oct. 2022, 16:32
franckyfranck a écrit :
24 oct. 2022, 14:16
Bref, le sujet sur les dangers de la mobilité sociale ascendente n'est pas souvent abordé et il est pourtant important.
Le danger, s'il est avéré, vient selon moi de ce que certains, comme vous, hiérarchisent les classes sociales et souffrent ensuite d'avoir échappé à la leur, abandonnée en bas.
Je suis fils d'ouvrier immigré, et ingénieur. J'appartiens à la classe moyenne après avoir grandi dans la classe ouvrière. J'évolue principalement parmi des français d'ascendance européenne, après avoir grandi principalement parmi des enfants d'immigrés.

Je n'ai ressenti absolument aucun choc au passage. Je n'ai pas le moindre sentiment de trahison à l'égard de ceux qui sont restés dans mon milieu d'origine. Sans doute est-ce lié au fait que je ne me vois pas comme appartenant à une classe supérieure à la leur, seulement à une classe légèrement plus friquée. L'argent ne faisant pas tout, je suis content d'en avoir assez, mais je ne trouve pas que ça me donne une valeur intrinsèque supérieure à ce que j'étais avant.

Je ne nie pas le moins du monde les difficultés que vous évoquez chez certains, mais je pense qu'ils se les créent avec cette vision hiérarchisée des classes sociales.

Jeffrey l'explique très bien, j'ajoute simplement mon modeste témoignage.
Franckyfranck est sans doute assez intelligent pour défendre son point de vue seul, mais je ne crois pas qu'il dit ce que vous dîtes. Il dit qu'il existe des impacts (ça veut dire ça "danger" ama) à cette ascension, impacts de tous ordres négatifs, positifs, bizarres, inattendus. Ces impacts divers, il a pris soin de les énumérer sans se cantonner au côté négatif.
Je suppose que sa phrase ainsi libellée serait plus juste : il y aurait danger à nier les impacts en tous genres et entre autres "un prix à payer" que peut éventuellement (pas toujours) générer cette ascension. Je l'ai entendue ainsi WarisBack :lol:, donc rien qui devait te choquer ou t'offenser. A Franck de confirmer ma lecture.
Car ta vie, ton ressenti sont tout aussi intéressants que d'autres, ils apportent un éclairage, qui m'intéresse, car le sujet m'intéresse.
En revanche je discute deux assertions :
certains, comme vous, hiérarchisent les classes sociales
:
- soit ça veut dire "les classes n'existent pas" et je ne pige pas cette croyance quand on vient tout juste d'écrire, "je suis du milieu x (plus riche) venant d'un milieu y (plus pauvre)."
- mais j'imagine plutôt que ça veut dire "les gens accordent trop de valeurs à l'existence de ces classes" ou encore "les gens pensent trop que la valeur d'un individu est fonction de sa place sociale" . Or là mon désaccord provient de ceci : p'têt bien mais on ne le fait pas toujours exprès et non, on ne crée pas nécessairement tout seul le problème !
1) il y a bien des cas où "certaines classes" vous rappellent leur p.. de valeur, et donc celle que vous n'auriez pas,(cf "les gens qui ne sont rien" par l'enc notoire...) Si tu ne l'as pas vécu, j'en suis vraiment heureuse, mais tout le monde n'a pas eu cette chance). Et crois-moi parfois, c'est du brutal !
2) jlaramène encore avec l'inconscient : il existe un phénomène "la loyauté inconsciente" à des parents, un milieu d'origine et induisant parfois un hiatus, un malaise avec un "nouveau" milieu.
Entends-moi stp Warhouaback : je ne dis pas que ce malaise existe pour tout le monde, non...
Je te demande juste d'accepter le fait, que d'autres subjectivités existent, et que ce malaise peut handicaper certains et constituer un phénomène suffisamment notable pour qu'il puisse être digne d'études (psychosocio, récits de vie plus ou moins littéraires, nobelisés ou non, osef, me concernant).
Again (peace) : Ce malaise n'est évidemment pas le sort de tous dans une sorte de fatalité/mektoub...
J'ignore si Jeffrey a dit ce que tu dis, je ne le crois pas, mais il me faut du temps pour piger son message.

edit erreurs
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#124 Message par Ardoise » 24 oct. 2022, 18:03

Guyomette pourquoi tu dis que tu n'as pas réussi ?
Modifié en dernier par Ardoise le 24 oct. 2022, 18:08, modifié 1 fois.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#125 Message par guyomette » 24 oct. 2022, 18:06

Selon les critères en vigueur dans la société (POGNON) c'est vrai. Selon d'autres critères c'est pas si mal. Merci de ta question, ton témoignage m'a intéressée aussi j'y reviendrai. :)
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#126 Message par Ardoise » 24 oct. 2022, 18:12

guyomette a écrit :
24 oct. 2022, 18:06
Selon les critères en vigueur dans la société (POGNON) c'est vrai. Selon d'autres critères c'est pas si mal. Merci de ta question, ton témoignage m'a intéressée aussi j'y reviendrai. :)
Sérieusement, je pense qu'Annie a eu une vie bien morne par rapport à la mienne, et pourtant je n'aurai jamais eu le prix Nobel de littérature et je n'irai pas jusqu'à 82 ans.
Le physique fait beaucoup dans un parcours de vie, et là il ni y'a pas de classe sociale.
Ardoise s'efface.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#127 Message par guyomette » 24 oct. 2022, 18:18

Le physique n'a rien à voir avec la classe, tu es sérieuse ?
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#128 Message par Ardoise » 24 oct. 2022, 18:41

guyomette a écrit :
24 oct. 2022, 18:18
Le physique n'a rien à voir avec la classe, tu es sérieuse ?
Et bien si, dans un parcours de vie, c'est énorme .
Ardoise s'efface.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#129 Message par Manfred » 24 oct. 2022, 18:58

Je pense qu'il y a un malentendu.

La classe sociale influe parfois sur le physique. Par exemple, il y a plus d'obésité chez les prolos pour cause de malbouffe. C'est je pense ce qui fait réagir Guyomette.
Les CSP+ auront plus tendance à faire bouger les gamins (sports) et paieront aussi l'orthodontiste qui va bien à l'adolescence, quand le jeune prolo gardera ses dents de traviole.

Là ou ardoise a raison, c'est bien évidemment que les "beaux" (surtout les femmes) sont privilégiés dans leur parcours tant social (les beaux sont convoités par le sexe opposé et sont donc plus souvent invités, leur compagnie est plus recherchée), sentimental (mariage au dessus de sa classe sociale ou même intellectuelle) que professionnel. Il est avéré par exemple que les grands gagnent plus que les petits, c'est également vrai pour les beaux (qui ont en plus accès à plus de professions). Le physique peut donc permettre de changer de classe sociale, car il se monnaye, soit auprès du conjoint socialement d'une classe plus aisée, soit parce qu'il permet d'accéder à des postes plus rémunérateurs.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#130 Message par PACA » 24 oct. 2022, 19:17

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#131 Message par Manfred » 24 oct. 2022, 23:15

La littérature française ne manque pas de Bel-Ami, Eugène de Rastignac ou Lucien de Rubempré. Tous férus d’ascenseur social 8)

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#132 Message par guyomette » 24 oct. 2022, 23:23

Manfred a écrit :
24 oct. 2022, 18:58


Là ou ardoise a raison, c'est bien évidemment que les "beaux" (surtout les femmes) sont privilégiés dans leur parcours tant social (les beaux sont convoités par le sexe opposé et sont donc plus souvent invités, leur compagnie est plus recherchée), sentimental (mariage au-dessus de sa classe sociale ou même intellectuelle) que professionnel. Il est avéré par exemple que les grands gagnent plus que les petits, c'est également vrai pour les beaux (qui ont en plus accès à plus de professions). Le physique peut donc permettre de changer de classe sociale, car il se monnaye, soit auprès du conjoint socialement d'une classe plus aisée, soit parce qu'il permet d'accéder à des postes plus rémunérateurs.
Tout à fait d'accord, c'est aussi ça que je voulais dire (en + des évidences sur les pauvres obèses, mal soignés, etc).
« la plupart des gens (...) croient à la pérennité de la mémoire (...) et à la possibilité de réparer (...). La vérité se situe juste à l'opposé : tout sera oublié et rien ne sera réparé.» Kundera, La Plaisanterie.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#133 Message par WolfgangK » 24 oct. 2022, 23:43

guyomette a écrit :
24 oct. 2022, 17:03
Oui, mon déracinement socioculturel fut égal à "solitude", car on ne sent pas pour autant toujours "nidifié" établi, dans le nouveau milieu. On peut même échouer en partie à cause de cela : par ex : et je contre un peu là, Wolfgangk : non, le sentiment de classe, n'est pas toujours du pipo.
Je ne dit pas que le sentiment social est du pipo, mais qu'il n'a pas de réalité objective. C"est une réalité inter-subjective : une subjectivité suffisamment partagée pour avoir des effets réels sur la vie des gens. Et c'est une aliénation.
Exemples d'effets du sentiment de classe sociale dans ma famille :
- mon père était issu d'une famille de rentiers. Mais mon grand-père ayant remarqué qu'on ne pouvait plus être rentier et maintenir le niveau de vie familial (e.g. appart parisien de plus de 200 m²) en se contentant d'un métier de dilettante (i.e. prof d'Université comme lui-même), il a "obligé" mon père à faire HEC et bosser comme cadre dans un grosse boite, plutôt que de suivre sa vocation de devenir prof. Donc à appétences égales, quelqu'un comme mon père mais issu d'un milieu plus modeste serait devenu prof et aurait eu des revenus plus faibles. C'est un exemple de "reproduction sociale", mais est-ce qu'on peu objectivement dire que mon père a bénéficié de cette reproduction et a été plus heureux que s'il avait pu suivre sa passion ?
- mon frère, issu de ma même famille et avec le même niveau de vie, voulait faire de la philosophie. En bout de course (khâgne à H4), il passe le CAPES et devient prof de philo. À cette occasion, il découvre que la bouffe a un prix et se voit obligé de reposer des trucs dans les rayons du super-marché lorsque le prix est trop élevé pour son budget bouffe. Il ne le supporte pas, sans doute à cause du décalage avec la vie qu'il avait vécu jusque là chez nos parents, et va dans le privé faire des études qualitatives pour des campagnes du pub. Intérêt intellectuel nul, contribution sociale négative, mais il retrouve le niveau de vie auquel il était accoutumé (← jeu de mots). Là encore, quelqu'un avec les mêmes appétences mais issu d'un milieu pauvre serait resté prof de philo et le milieu social d'origine de mon frère a contribué à élever son niveau de vie.

Mais dans les deux cas, ce n'est pas par opportunités supplémentaires, mais parce que "bourgeoisie oblige".
À contrario, ayant pour ma part constaté ces deux échecs dans l'épanouissement, j'ai décidé de faire mieux. Malgré la pression de ma mère, qui trouvait que je manquais "totalement d'ambition" en voulant devenir prof d'université (désolé ProfGrincheux), j'ai toujours eu en tête ce que la classe sociale coûte en frais de représentation. Et je méprise par avance tous ceux qui me jugeraient à l'aune de ma classe sociale, donc je n'ai que faire de leur jugement. Je suis très heureux de savoir faire mes pâtes moi-même avec farine, œufs et eau et comment cuisiner des têtes de poisson (saumon, colin, congre,…) récupérée à 2€ pièce (pour entre 2 et 4 portions) et pour mon apparence, il m'est déjà arrivé qu'une personne dans le métro me prenne en pitié et me donne son sandwich !

La distribution des richesses suit une loi de puissance https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_puissance, donc il est toujours vain de plaquer des classes. On le voit bien avec les slogans : est-ce le problème, c'est les 1% ? les 0.1% ? … ?

Donc pour revenir aux classes sociales, elles ont une réalité inter-subjective, donc on ne peut pas les ignorer complètement puisqu'on vit en société, mais elles n'ont pas de réalité objective, donc on est pas réellement obligé d'en suivre les injonctions.
L'islamophobie n'est pas plus du racisme que l'antisionisme n'est de l'antisémitisme.
Que les racistes soient islamophobes n'implique pas que les islamophobes soient racistes.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#134 Message par guyomette » 24 oct. 2022, 23:45

Manfred a écrit :
24 oct. 2022, 23:15
La littérature française ne manque pas de Bel-Ami, Eugène de Rastignac ou Lucien de Rubempré. Tous férus d’ascenseur social 8)
Roux et Combaluzier ? :oops: :arrow:
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#135 Message par guyomette » 25 oct. 2022, 00:35

WolfgangK a écrit :
24 oct. 2022, 23:43

La distribution des richesses suit une loi de puissance https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_puissance, donc il est toujours vain de plaquer des classes. On le voit bien avec les slogans : est-ce le problème, c'est les 1% ? les 0.1% ? … ?

Donc pour revenir aux classes sociales, elles ont une réalité intersubjective, donc on ne peut pas les ignorer complètement puisqu'on vit en société, mais elles n'ont pas de réalité objective, donc on n'est pas réellement obligé d'en suivre les injonctions.
Vraiment super intéressant ton témoignage. J'ai besoin de temps pour réfléchir à tes conclusions : ceci dit, en première intention, je ferais un constat de désaccord (j'y reviendrai) : les classes sociales ama sont une réalité objective ET intersubjectives.
Je suis perplexe et serai triste de constater que tu as abandonné toute référence à des études sérieuses comme celles de Pinçon-Charlot. Et cela, pour te référer uniquement à une loi mathématique rassurante mais seulement partiellement juste, (comme probablement, et comme tout travail en sc.humaines, sont aussi partiellement justes les bourdieuseries). Je me demande ce qui induit ce virage "mathematic and that's it" mais je crains de le deviner et j'espère que tu reconsidèreras un peu ta position ...
On n'est pas réellement obligé d'en suivre les injonctions ? Dis-tu. Non, on n'est pas... si on le peut. Et pour maintes raisons, on ne le peut pas toujours.
Parfois, Wolgangk, si,on est obligé, pour maintes raisons, inutile de faire l'inventaire à la Prévert pour paraphraser Jeffrey.
Et parmi ces raisons qui peuvent "obliger" : il existe comme je le disais à Waroulala, et au moins pour certains, tout un tas d'injonctions ou de liens de loyauté inconscients qu'il arrive que l'on intériorise. Et c'est pas donné à tous de s'en défaire.
Pour x raisons, intelligence, clairvoyance, instinct de vie, créativité, contexte historique... et chance, tu as pu faire fi de ces injonctions (ou elles n'ont juste jamais existées), c'est sincère : je m'en réjouis. Plus qu'y a de gens qui vont bien, mieux que je me porte ! :D
Après, le "on" varie vachement. Et précisément Gauléjac et Ernaux (même si cette dernière me pompe l'air) se sont penchés sur les "on" qui se sont sentis "obligés ou qui ont réussi à se "désobliger".

Ce n'est pas parce que l'on sait mal quel 1 ou o,1 ou autres pour cent serait responsable qu'il n'y a pas de classe, et qu'il n'y a pas de classe dominante, ama tu le sais fort bien.

ps : l'honnêteté m'oblige lol à déclarer que le thème des trajectoires sociales est en quelque sorte "mon sujet" de prédilection, c'est toute une vie de réflexion. D'où ma "coriacité" absolument socialement déterminée mais assumée.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#136 Message par ProfGrincheux » 25 oct. 2022, 05:36

Les Pinçon-Charlot ne sont pas des gens sérieux. En tous cas, ils ont cessé de s’astreindre à la moindre objectivité et à la moindre rigueur quand ils sont partis à la retraite. Ils sont devenus des pamphlétaires.

Je n’ai pas envie de parler ici de ma vie. J’en parle bien assez dans d’autres files. Elle n’est pas plus interessante que les quatre-vingts premières années de la vie d’Annie Ernaux et peut être même moins si cela est possible.

Cette dernière m’est sympathique pour une et une seule chose, qu’elle ait organisé sa vie autour de l’acte d’écrire des livres de fiction. Moi, j’aime lire des livres de fiction, alors c’est potentiellement mon amie et je respecte infiniment son choix de courir l’aventure de la littérature.

En échange de mon amitié potentielle, je ne lui demande aucune rigueur ni aucune objectivité, ni ne me sens le droit d’exiger d’elle le respect de contraintes stylistiques, elle écrit bien ce qu’elle veut et comme elle veut, puisqu’elle ne présente pas son livre comme un travail scientifique en n’excipant pas d’une quelconque qualité de sociologue.

Comme le vigneron est potentiellement mon ami sauf au moment où il faut sortir la carte bleue et où la triste réalité de ma condition sociale subalterne vient ternir les promesses de joies sensuelles ou carrément les empêcher. Le type de came que produit Annie Ernaux offre pour beaucoup moins cher une joie, certes moins sensuelle, mais une joie tout de même et moins passagère, c’est donc une amie potentielle plus dans mes moyens.

Elle n’est restée qu’une amie potentielle puisque je ne l’ai pas lue. Son style et ses sujets ne m’attirent guère mais il se trouve qu’elle a trouvé un lectorat et que ça l’a menée, à l’hiver de sa vie, au pinacle de la respectabilité littéraire, sans qu’elle l’ait particulièrement cherché. Suite à quoi, elle a subi des critiques virulentes, dont elle se contrefiche probablement.

Pourtant certaines sont aussi cocasses que certains éloges de son œuvre. Pour le coup c’est l’éloge par ignatius qui m’a semblé le plus fort, un témoignage d’émotion de lecture pure et violente. Par quelqu’un qui, de par le contentement que lui apporte apparemment sa trajectoire sociale ascendante, quoi que cela signifie, y compris si cela ne signifie rien, est à priori une sorte d’ennemi politique pour une mélenchoniste bon teint. Peut être son émotion tient elle a des mauvaises raisons. Et alors? Lorsque nous tombons amoureux, est ce pour de bonnes raisons?
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#137 Message par ProfGrincheux » 25 oct. 2022, 05:37

Au fait il est revenu, pangloss?
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#138 Message par PACA » 25 oct. 2022, 09:14

Les critères d'ascension ou régression sociale peuvent être très différents, par exemple :
- la perte de l'anonymat avec le gain de notoriété peuvent être perçus comme un handicap social, ou non, irréversible.
- la perte de temps "utile disponible" induite par la supposée ascension sociale
- la perte de liberté de penser du fait de la perte d'anonymat.
....

Pour moi l'anonymat n'a pas de prix, m'afficher avec Mélenchon serait un handicap.... même avec un Nobel, l'image n'est pas forcément enviable, j'aurais un peu honte peut être ?

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#139 Message par WolfgangK » 25 oct. 2022, 09:28

guyomette a écrit :
25 oct. 2022, 00:35
WolfgangK a écrit :
24 oct. 2022, 23:43

La distribution des richesses suit une loi de puissance https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_puissance, donc il est toujours vain de plaquer des classes. On le voit bien avec les slogans : est-ce le problème, c'est les 1% ? les 0.1% ? … ?

Donc pour revenir aux classes sociales, elles ont une réalité intersubjective, donc on ne peut pas les ignorer complètement puisqu'on vit en société, mais elles n'ont pas de réalité objective, donc on n'est pas réellement obligé d'en suivre les injonctions.
Vraiment super intéressant ton témoignage. J'ai besoin de temps pour réfléchir à tes conclusions : ceci dit, en première intention, je ferais un constat de désaccord (j'y reviendrai) : les classes sociales ama sont une réalité objective ET intersubjectives.
Je suis perplexe et serai triste de constater que tu as abandonné toute référence à des études sérieuses comme celles de Pinçon-Charlot.
Je ne me souviens plus du titre du dernier livre des Pinçon-Charlot que j'ai lu, mais il montrait plutôt en exemple la solidarité "des riches", par exemple le fait que quelqu'un temporairement dans le besoin pouvait se voir prêter vêtement, voiture, voire logement s'il était dûment enregistré dans les registres de notabilité.

Les Pinçon-Charlot dénonçaient certes l'hypocrisie qu'il y a à promouvoir / imposer politiquement la concurrence (lutte ?) de tous contre tous, avec le néolibéralisme, en appliquant pour soi une solidarité de classe. Mais c'est là une illusion sur l'homogénéité des classes "riche" et de la catégorie "de droite" : les anciens riches conservateurs et les nouveaux riches néolibéraux ne sont pas les mêmes !
L'islamophobie n'est pas plus du racisme que l'antisionisme n'est de l'antisémitisme.
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#140 Message par Jeffrey » 25 oct. 2022, 10:27

ProfGrincheux a écrit :
25 oct. 2022, 05:37
Au fait il est revenu, pangloss?
Qui ça ?
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#141 Message par War Again » 25 oct. 2022, 11:19

guyomette a écrit :
25 oct. 2022, 00:35
il existe comme je le disais à Waroulala, et au moins pour certains, tout un tas d'injonctions ou de liens de loyauté inconscients qu'il arrive que l'on intériorise.
Je m'appelais Warhouha, pas Waroulala (quoique j'aime bien, ce sera mon prochain pseudo si je devais à nouveau perde mon compte). ;)

Je reviendrai sur ta réponse à ma trop laconique réponse quand j'en aurai le temps, pour ne pas reproduire le peu de développement qui conduit, je le crains, à ce que tu ne me comprennes pas (et j'en suis pleinement fautif).

Rapidement, cependant, je dois dire que la loyauté inconsciente que tu évoques m'intéresse fortement. C'est probablement d'ailleurs ce que je manque, parce que ça ne s'applique pas à mon cas particulier (et comme tout un chacun, mes opinions sont spontanément subjectives). J'adorerai avoir le temps d'en parler, notamment avec Jeffrey qui, si je ne me trompe pas, est également issu du monde ouvrier. Ma particularité, de ce point de vue, est que j'en viens parce que mon père a fait le choix d'émigrer. Il n'est pas né ni originaire de la classe ouvrière, il l'a rejointe en changeant de vie. Je n'ai donc pas, je le confesse, un sentiment d'appartenance très fort à cette classe. Mais par dessus tout, si je crois tout à fait à l'existence des classes sociales, je pense que le vécu, avec tout ce qu'il implique, explique bien plus l'appartenance d'un tel à sa classe sociale que sa valeur ou ses compétences intrinsèques.
Partant de là, je ne vois ni motif de fierté, ni motif de honte à appartenir à une classe ou à une autre.

Contrairement à ce que je disais en introduction, je suis à nouveau tombé dans le piège de la réponse immédiate et imprécise, j'en suis navré. C'est qu'il m'arrive de travailler, au travail. :/ Mais j'y reviendrai.
Ignorés : personne. Suffit de ne pas lire ceux que l'on juge indignes d'être lus. (sauf PACA, parce que je n'ai pas de soucis avec la contradiction, mais les vieux radoteurs, je ne les tolère que par obligation familiale)

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#142 Message par ProfGrincheux » 25 oct. 2022, 12:32

Jeffrey a écrit :
25 oct. 2022, 10:27
ProfGrincheux a écrit :
25 oct. 2022, 05:37
Au fait il est revenu, pangloss?
Qui ça ?
Il y a plusieurs possibilités:

- tu t'es converti à la cancel culture.
- tu perds ta mémoire à court terme.
- le forumeur en question a été banni pour plus d'une semaine suite à des échanges privés déplaisants.
- none of the above but in the same category.
Ignorés: Manfred, titano.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#143 Message par franckyfranck » 25 oct. 2022, 12:45

Bon puisque visiblement je me fais attaquer, je répondrai plusieurs choses :
1. Comme Coluche l'a dit il vaut mieux être riche et en bonne santé que pauvre est malade. De même je dirais qu'il vaut mieux être intelligent et cultivé que stupide et ignorant.
2. Donc au fond à un certain niveau si on ne fais pas dans le relativisme, il existe une hiérarchie. C'est comme si je compare la musique que j'ai écouté en Free Party à un Opéra, il y a une hiérarchie, et la musique de la Free ne gagne pas. Pourtant j'ai pris un immense plaisir à aller en Free et écouter de l'électro (et la on peut pas dire que j'étais avec des salauds de riches). Donc le fait de pouvoir apprécier. existe toujours Comparer ne veut pas dire qu'une chose a de la valeur et qu'une chose n'en a pas.
3. Puisque l'on parle d'une violence dans la confrontation des cultures, elle existe hors hiérarchie. Et j'ai essayé de montrer que dans la perception la hiérarchie est parfois inversée au début. D'ou le fait que certains "aient le cul entre deux chaises" parce qu'au fond il y a bien cela. Parfois on arrive dans un monde que l'on aimes pas ou que l'on aimes à moitié.

Plus généralement je comparerai cette expérience (à tout ce que j'en ai vu) à être un immigrant dans son propre pays. Et de même que l'immigrant qui aimes son pays d'accueil, il n'oublie jamais totalement sa culture mère qui l'a façonné à moins que celle ci le rejette. Et par pitié ce n'est pas une question de "fric" ou en tout cas pas que. Le fric ne remplace pas la culture, le sens et les connexions sociales. Le fric est un moyen qui permet des choses. Et par exemple une certaine ouverture d'esprit : Se dire qu'on va claquer 40 € dans un spectacle que l'on est pas sur d'apprécier parce que l'on est curieux, c'est le fric qui le permet. Sauf qu'à force de se confronter à la nouveauté ou à l'inconnu on finit parfois par s'élever.

Si je ne prends que mon cas je suis parti de la classe moyenne et j'ai fini par attérir ailleurs lorsque l'on m'a proposé de devenir "partner" du cabinet d'études ou je bosses. Partner cela signifie que, à un moment, on me propose de devenir actionnaire du cabinet. Ce qui signifie aussi que c'est une promotion "payante". Le jour ou on me l'a annonçé, on m'a filé un rendez vous un matin dans une banque privée afin que je vois pour le financement des parts et le reste. Je n'avais jamais imaginé me trouver dans cette situation un jour. Car globalement ce jour la, tu comprends assez vite que tu as la chance d'avoir accès à un autre monde. Et il y a plein de petits détails à la *** qui ont changés avec.

Est ce que pour autant je n'apprécie plus ce que j'appréciais avant ? Bullshit ! Après je dois reconnaitre que mes parents m'ont bien préparés à entrer dans ce monde dont ils ne fesaient pas parti. On m'a toujours encouragé à aller de l'avant et même lorsque certains de mes choix de vie n'étaient pas les leurs, il n'y a pas eu d'hostilité. Alors que je citais hier le cas d'un pote qui se fesait traiter de "gay" par ses propres parents parce qu'il avait ramené quelques goûts jugé "éffémiinés" de Paris. Et donc il y a d'autres cas ou la barrière, tu la perçois et tu te la prends dans la geule. Et il importe peu que ce soit la barrière qui te sépares avec le niveau du dessus qu'avec le niveau du dessous. Mais quand les tiens mettent même ininitentionellement des barrières à ta progression c'est dur. Un autre qui était pour le coup effectivement "gay" n'a jamais été accepté par ses parents quand ils l'ont su. Il avait déjà des problèmes pour communiquer avec eux avant … et des problèmes de communications avant tout court. Pourtant une des personnes les plus brillantes que je connaisse. Il a également fui dans l'expatriation pour pouvoir être lui même. C'est parfois le grand reset. Certains ont le luxe de ne pas avoir à faire ce choix, d'autres ne l'ont pas.

De même pour les amis, si je regarde mon groupe proche, nous sommes issus de différents millieux et c'est très hétérogène au point de vue du niveau d'origine. Le ciment est la participation à certaines associations étudiantes qui ont crée du "commun" vécu ensemble. Si tout le monde a bien réussi, les niveaux peuvent varier. Un pote a fini banquier d'affaire au Luxembourg, un autre a vendu sa boite une somme indécente. L'un d'eux est fonctionnaire. Et dans un sens cela ne pose pas de problème car tout le monde se respecte et parce que ce commun existe et parce que chacun suit son chemin. Et la je te dirai que les classes sociales n'existent plus même si on connais nos histoires respectives.

Mais peut être alors que plutôt qu'un modèle par classe sociale on devrait considérer un modèle de groupes sociaux. Dans ma province, j'étais un jeune geek a l'époque ou ce n'était pas super fashionable d'être un geek. L'arrivée à Paris dans une école d'informatique m'a perrmis de trouver un groupe avec des intérêts et une vision de la vie similaire. Et on s'est mutuellement aidés pour arriver ou l'on est individuellement. Ce qui m'a permis de me dépasser sur plein d'autres sujets chose qui aurait été impossible avant. Et au fond si tu m'avais demandé au bout de quelques mois de juger le groupe que je fréquentais avant de celui que je fréquentais maintenant j'aurais pu sans problème hiérarchiser. La classe sociale n'y aurait pas eu grand chose à voir celle-ci allant de fils de notable assez blindés à des gens qui clairement en chiaient financièrement. Au final, j'ai plus de choses en commun avec tous ces gens qu'avec les grands ou petits bourgeois au sens large, mais certains voudraient enfermer les gens dans une classe sociale. Classes sociales qui, étant trop larges, empéchent les gens de trouver leur "commun" et le bonheur qui va avec. Les soirées de bourges paumées et les soirées de prolo paumés se ressemblent tu change juste les drogues qui sont servies et le cadre.

Ce que l'on oublie chez les très riches dont Pinçon-Charlot disent qu'ils s'entraident c'est qu'il y a souvent beaucoup en commun entre eux car ce monde est très petit. Plus que la place sur le bottin mondain, il y a de fortes chances que leurs enfants aient fréquentés les mêmes écoles et les mêmes clubs (genre le Racing) ou qu'ils aient des activités sociales entre eux qui créent ces communs. Et bien sur c'est beaucoup plus simple d'avoir une expérience hors du commun en commun si tu es millionnaire que si tu gagnes le smic.

Voila, c'est brouillon mais c'est ce que je pouvais pondre la maintenant.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#144 Message par clairette2 » 25 oct. 2022, 13:37

guyomette a écrit :
24 oct. 2022, 18:18
Le physique n'a rien à voir avec la classe, tu es sérieuse ?
Mon père disait : "il n'y a pas de femmes laides, il n'y a que des femmes pauvres."
« La moitié des hommes politiques sont des bons à rien. Les autres sont prêts à tout » Coluche

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#145 Message par guyomette » 25 oct. 2022, 13:40

Moui ça se discute... faut voir quand même certaines rejetonnes de l'aristocratie centenaire et consanguine... Mais oui, pauvreté, santé, beauté, forcément un peu liés.
« la plupart des gens (...) croient à la pérennité de la mémoire (...) et à la possibilité de réparer (...). La vérité se situe juste à l'opposé : tout sera oublié et rien ne sera réparé.» Kundera, La Plaisanterie.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#146 Message par Ardoise » 25 oct. 2022, 13:43

Ça me fait penser qu'il faut que j'aille à la mairie pour changer de nom de famille, mais comment faire pour savoir quoi mettre à la place !
Et ne me parlez pas du fait d'être Vicomtesse, ça à juste fait suer quelques filles .

C'est quoi ton problème Guyomette, le fric, le pognon, l'oseille etc....... comme Wolfganknout :mrgreen:
Vous êtes arqués sur vôtre passé que vous connaissez, tout comme le dernier en date War again son père n'étant pas ouvrier, mais immigré d'où? On ne le sait pas, mais de confession musulmane ça on le sait .

Pour Ignatius je croyais qu'il avait été adopté, d'où un autre problème qui doit se greffer sur sa vision d'Annie la Prix Nobel.

J'ai lu toute la file sauf tout Umbertto Eco j'ai lu la moitié je n'ai pas réussi à lire "Le pendule de Foucault" mais il est plus drôle qu'Annie avec sa soupape. Et ils ont donné cela aux jeunes au Bac qu'elle bande de tarés. La soupape qui tourne n'existe plus y'a juste un sifflement. Annie est bien une littéraire, moi avec le premier mec avec qui partagé la vie à deux,j'ai laissé la vaisselle s'accumuler dans l'évier.
J'ouvre une file sur une habitude d'Umberto Eco et une question de Pascal Bruckner (qui vient de sortir un bouquin que j'hésite à lire)

Etre libéré, c'est aussi savoir fermé un livre qui vous ennuie, comme la religion.
Modifié en dernier par Ardoise le 25 oct. 2022, 13:49, modifié 1 fois.
Ardoise s'efface.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#147 Message par Ardoise » 25 oct. 2022, 13:44

guyomette a écrit :
25 oct. 2022, 13:40
Moui ça se discute... faut voir quand même certaines rejetonnes de l'aristocratie centenaire et consanguine... Mais oui, pauvreté, santé, beauté, forcément un peu liés.
Merci pour mes filles.
Ardoise s'efface.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#148 Message par guyomette » 25 oct. 2022, 13:58

M'enfin Ardoise, je pense pas à tes filles forcément (en plus je crois avoir vu une foto ou une au moins était jolie)je dis juste que j'ai rencontré des aristos pas trop jojo et dont le manque de grâce émanait clairement de pb de santé génétique. Mais mes excuses, si j'ai pu te froisser. M'apprendra !
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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#149 Message par WolfgangK » 25 oct. 2022, 14:13

guyomette a écrit :
25 oct. 2022, 13:58
M'enfin Ardoise, je pense pas à tes filles forcément (en plus je crois avoir vu une foto ou une au moins était jolie)je dis juste que j'ai rencontré des aristos pas trop jojo et dont le manque de grâce émanait clairement de pb de santé génétique. Mais mes excuses, si j'ai pu te froisser. M'apprendra !
Tu as raison, voir le sens 2. de https://fr.wiktionary.org/wiki/fin_de_r ... n_nominale .
J'en connais et ce qui est étrange à mes yeux, c'est que ce sont des cathos tradi, alors que pour moi, le génie catholique a justement été l'interdiction du mariage entre cousins y compris à des degrés très éloignés.
L'islamophobie n'est pas plus du racisme que l'antisionisme n'est de l'antisémitisme.
Que les racistes soient islamophobes n'implique pas que les islamophobes soient racistes.

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Re: Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

#150 Message par Ardoise » 25 oct. 2022, 14:35

guyomette a écrit :
25 oct. 2022, 13:58
M'enfin Ardoise, je pense pas à tes filles forcément (en plus je crois avoir vu une foto ou une au moins était jolie)je dis juste que j'ai rencontré des aristos pas trop jojo et dont le manque de grâce émanait clairement de pb de santé génétique. Mais mes excuses, si j'ai pu te froisser. M'apprendra !
Comme la co sanguinité Bretonne, y'en a partout dans le monde avant l'avènement des transports.
Ardoise s'efface.

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