Je suis présent sur le forum depuis le 17 sept 2005, et j’ai beaucoup appris au contact de chacun des intervenants. Je vous en remercie vivement. Le jour où je n’apprendrais plus rien sur le forum, mes visites seront moins fréquentes et mon intérêt reviendra certainement à l’informatique (comme d’habitude), à l’économie générale ou, peut-être à la préparation de mon futur diplôme (un executive MBA prévu pour dans 4 ans).
Pour l’instant, je n’en suis pas encore là. Revenons donc à « nos moutons » - expression super bien trouvée pour évoquer la bulle.
Au fur et à mesure de mes pérégrinations sur le forum, mes préoccupations ont dévié de « l’immobilier » vers « l’économie en général ». Effectivement, il est clairement démontré dans l’étude de JMP que l’immobilier ne peut être appréhendé hors de son contexte économique. Les notions
- de prix en monnaie constante
- de salaires
- d’inflation
- de taux d’effort
- de taux d’intérêt
- de rentabilité d’un investissement
- de spéculation
- de valeur refuge
- de solvabilité
- de hausse des prix
- d’environnement international
- de concurrence entre les monnaies
- de psychologie
- de confiance des ménages
- de croissance du PIB…
D’autre part, je l’ai déjà dit ici, je suis une vraie tête chercheuse en matière de « signaux faibles ». J’ai même écrit un mémoire de 100 pages sur ce sujet, lors de ma dernière année d’études.
Quelle est la liste de ces « signes d’alerte précoce » ?
- utilisation massive des valeurs refuges (or et art)
- forte demande des matières premières (y compris l’or en tant que MP). Apparemment, la demande serait supérieure de 5% à l’offre.
- Recours massif au LBO (Leverage buyout). A tel point que le terme de « bulle » a été employé à plusieurs reprises par les analystes.
- Retour de l’inflation, sauf que si on ne tient pas compte du prix du pétrole, nous serions déjà en déflation.
- Evocation par tous les partis du "protectionnisme".
- Apparition massive de « monnaie de singe ». Les planches à billets des pays industrialisés tournent à fond les manettes. La FED ne publie plus M3. Le crédit hypothécaire rechargeable américain est arrivé à des niveaux jamais vus jusque là et le gouvernement Français souhaite proposer ce type de crédit aux Français.
- Eloignement toujours plus grand des « fondamentaux économiques ». En septembre 2005, une maison de 120 m2 en province coûtait environ 48 ans de mon loyer actuel. Si l'on considère les années 1976-1996 sur Reims, on constate que le ratio prix du bien/loyer est de 190-200. Si bien qu'aujourd'hui, le 68 m2 que je loue à Reims devrait se vendre 84.000 Euros. Or, le 1er Nov 2005, ma voisine a vendu son appart à des primos accédants pour la modique somme de 150.000 euros. (Notez que son appart a moins de potentiel que le mien, puisque c'est un F3 dans lequel on a abattu une cloison => F2 bis. A croire que les primos-accedants n'ont jamais d'enfants...)
- Après la chute du nasdaq en 2001, Greenspan fait chuter le « prix de l’argent » et évite ainsi un rinçage total des épargnants américains. C’est un signal fort donné aux investisseurs immobiliers. C'est aussi le moment qu'ont choisi les plus futés pour se réfugier dans l'or.
- Le changement de norme comptable de la France fait apparaître une dette de 2000 Mds d’Euros. Ce qui, je le rappelle, fait peser une dette de 33.333 Euros sur la tête de chacun des 60 millions d’habitant de notre pays. (J'ai oui-dire que certains modérateurs aimeraient bien gagner ça dans l'année...). Je rappelle également qu'en 1996, à Reims, on se payait un 20m2 avec une telle somme.
- La bourse est quasiment euphorique. En réfléchissant un peu, j’arrive à faire du 12-15% sur l’année, avec des placements de grand-pères. Ceci dit, pour jouer en bourse, il faut commencer par avoir des économies.
- Le pouvoir d'achat immobilier des ménages a chuté de 45% depuis 1975.
- Les constructeurs automobiles sont dans le rouge. Les usines débraillent ici ou là, alors que la génération de véhicule qui vient de sortir est, à mon avis, un cru exceptionnel par rapport à leurs prédécesseurs directs. (206 vs 205, nouvelle 307 vs 307, 407 vs 406, C2 vs AX, C3 vs Saxo, C4 vs Xara, Clio III vs Clio II, Modus vs Clio II...)
- Après le bourbier Irakien, le complexe militaro-industriel américain est en mauvaise passe. Donc, relancer l’économie par ce biais semble exclu. Le congrès semble de plus en plus méfiant. G.W.BUSH multiplie les explications à l'encontre du peuple américain pour pouvoir poursuivre "son oeuvre".
- La FED identifie un risque systémique
- Le marché de l'immo est dans le "grand n'importe quoi". On voit des prix augmenter, après être resté 3 mois sur le marché. On entend, ici ou là, des témoignages de baisse sensible.
- Politiquement - et je vous remercie par avance de ne pas surenchérir - il semble que le journal Le Parisien [8 Déc 2005: "Derrière la crise des banlieues, Le Pen en embuscade"] soit le seul à avoir eu le courage de parler de celui qui se terre dans l'ombre et qui engrange les points. Ces dernières semaines, on a même vu Marianne titrer sur les scores du deuxième tour entre Villepin et Sarkozy, oubliant plusieurs choses fondamentales: (1)la gauche n'est pas morte (il faudrait certainement parler "DES gauches"). (2)Il y a des leçons de sciences politiques, en particulier celle du 21 avril, qu'on a bien vite oublié !! . Pas très sérieux tout ça !
- Des plans-médias gouvernementaux font état de pénurie dans certaines professions à l'horizon 2015 - PDF. Primo, je ne vois pas ce en quoi c'est nouveau. Michel Godet l'annonce depuis bien longtemps et en a même fait un ouvrage remarqué. Secundo, les excellentes nouvelles dans ce genre là, ça me rappelle une étude très sérieuse de l'OTAN sur les apparitions répétitives d'OVNI servant à masquer les frasques des gouvernements américains successifs. Tertio, Il y a 5 ans, on parlait d'aller chercher pléthore d'informaticiens en République Tchèque, en Roumanie et en Inde... tellement la pénurie était inéluctable. Aujourd'hui, on a pleins de vaillants informaticiens plein les poches, on ne sait pas quoi en faire, et, s'ils ont le malheur de rester en province, il sont condamnés à vivoter de petits jobs en petits jobs... tantôt une administration, tantôt la PME de 80 personnes faisant office de "champion local" dans son domaine d'activité. Ca me rappelle une anecdote ou une personne originaire de l’Ardèche me disait s'occuper d'une vingtaine de sites internet d'une communauté de communes. Quand je lui ait dit que je gérais un site diffusant 3 millions de pages par jour, il a eu vite fait de changer de conversation... Tout ça pour dire qu'il faut se méfier des effets d'annonces !
Notez que contrairement à pas mal de personnes sur le forum qui doutent de l'existence de la bulle, je suis convaincu qu'on vit l'éclatement au jour le jour, mais qu'on ne peut pas appréhender un phénomène lent avec un grossissement temporel tel que nous le pratiquons. Donc, pour moi, c'est un fait acquis. Je n'ai aucune raison de revenir toute les 5 minutes en disant "mais si mais si, je vais vous prouver qu'il y a une bulle et quelle va éclater". IL Y A UNE BULLE et ELLE ECLATE SOUS NOS YEUX... point barre -.
Politiquement, c'est un capharnaüm complet : Les français attendent tout simplement la succession de Chirac, le PS est pour l'instant en panne, les extrêmes se réjouissent, tout le monde est candidat avec des étiquettes représentatives de "vues de l'esprit"... On va finir par avoir des libéraux, des chrétiens-libéraux, des sociaux-libéraux, des républicains, des nationalistes, des socialistes, des sociaux-souverainistes, des libéraux-souverainistes, des écologistes de gauche, des écologistes de droite, le centre-droit, le centre-gauche, les minorités (rappelons-nous de Mme Taubira, chasseurs et pécheurs).... finalement - et ce sera peut-être la surprise des candidatures de 2007 - pourquoi pas des islamistes, libéraux-islamistes, sociaux-islamistes...
Tout ça pour dire quoi ? Pas de cap, pas de feuille de route, des candidatures multiples (qui battront certainement le record de 16 candidats en 2002 )... mais surtout, un éloignement de la réalité économique du pays "au nom des dogmes". // NOTE DE JD: merci de ne pas surenchérir sur la politique, il y a un forum dédié pour cela //
Economiquement, les plus grands experts nationaux hésitent entre l'inflation et la déflation. C'est du grand n'importe quoi, mais à force de faire confiance à un organisme étatique pour relever des chiffres d'une telle importance, même les experts n'ont plus de source pour pouvoir émettre un avis cohérent sur ce qui arrive. Effectivement, quand l'inflation ne tient pas compte des 10 produits qui ont augmenté le plus ces 20 dernières années, ça vole pas haut. (immobilier qui pèse pour 1/3 dans le budget des ménages, Pétrole - Il y a 10 ans, je faisais des pleins à 12 euros, aujourd'hui c'est 37 euros avec la même voiture -, les impôts locaux, la redevance TV... )
Socialement, les derniers évènements dans les quartiers ont clairement mis en lumière la nécessité absolue du changement. On parle de nouvelles vagues d'immigration, alors que nous avons 40% de chômeurs dans ces quartiers. Il est quasiment certain qu'il coûtera moins cher de former les personnes dans les citées pour qu'elles puissent combler des emplois, plutôt que de faire de nouvelles vagues d'immigration. Parce qu'en tout état de cause, si l'on opte pour la deuxième solution, on aura toujours 40% de chômeurs dans les cités.
Conclusion:
Notre état est en crise profonde. Si on met en perspective l'histoire de l'occident des 3 derniers siècles, on peut mettre en évidence des cycles de prospérité et des cycles de crises. Sans nécessairement faire état des théories économiques qui me sont chères (Kondratieff, Juglar, Schumpeter), on peut constater empiriquement quels sont les pays qui affichent des perspectives encourageantes :
- Bloc de l'est (Pologne, République Tchèque, Slovaquie, Slovénie, Roumanie...): Après 50 ans de communisme, ils sont aujourd'hui dans des périodes de croissance soutenues.
- Amérique Latine : Après des périodes très troubles vers la fin des années 1990, ils reviennent dans la course et font même figure de placement financier phare de l'année 2006.
- Japon : Ils ont subit une vraie déflation, pendant une période durable. Aujourd'hui, c'est certainement l'économie la plus saine en asie. Ils ont d'excellents fondamentaux.
Pour vous éclairer sur le sujet, il est intéressant de regarder attentivement les files sur le Japon et sur le cinquième cycle de Kondratieff.
Bonsoir,
JD.
Nota : Les agrégats monétaires s'appellent M1,M2 et M3.
- M1= billets, pièces, dépôts à vue des institutions financières.
- M2=M1+ placements non bloqués et dépôts à termes(<2ans).
- M3=M2+instruments négociables émis par les institutions financières et obligations (<2ans)